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Vivre le jeûne eucharistique avec les martyrs de l’Albanie communiste

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Cimetière de Shkodër (Albanie), lieu où les 38 martyrs d'Albanie auraient été exécutés durant le régime communiste.

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Camille Dalmas - publié le 03/04/20
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Les périodes de jeûne eucharistique ont été nombreuses dans les régimes totalitaires, toujours très anti-religieux. L’un des pires cas est peut-être celui de l’Albanie communiste pendant la seconde moitié du XXe siècle.

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Depuis 1945 jusqu’à la fin des années 1980, un prêtre ne pouvait entrer en Albanie qu’illégalement. Dans “le premier État totalement athée du monde”, selon la formule du dictateur Enver Hoxha, il ne fait pas bon être croyant. Dès l’après-guerre, le séminaire et les lycées jésuites sont fermés, car considérés comme contraires aux préceptes du marxisme-léninisme. Tous les membres non-Albanais des ordres religieux sont expulsés. L’archevêque de Shkodrë, Mgr Gaspër Thaçi, est envoyé en prison où il meurt de maladie en 1946. En 1948, c’est au tour de Mgr Gjergj Volaj, évêque de Sapë puis de Mgr Frano Gjini, évêque de Rrëshen de donner leur vie pour le Christ. Enfin le primat d’Albanie, Vincent Prenushi, après avoir été longuement torturé par ses bourreaux,rejoint en 1949 la trentaine de prêtres et de moines assassinés par le pouvoir albanais.


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Sous la poigne implacable de Hoxha, qui considérait que les régimes soviétiques puis maoïstes n’étaient pas assez communistes, une société antireligieuse s’impose. Les évêques titulaires et leurs vicaires sont envoyés se balader dans les rues de leur diocèse avec inscrit sur leur front : ‘j’ai péché contre le peuple’. Le pire advient entre 1967 et 1984 : les rites religieux sont alors tout simplement interdits. Des punitions très sévères, souvent la prison ou la mort, sont données à ceux qui transgressent ce règne de terreur. Les prêtres survivants sont envoyés dans les ‘goulags’ locaux où ils travaillent dans des mines de cuivre. Les lieux de culte sont détruits ou réaffectés. Les communautés catholiques locales sont donc privées de toute Eucharistie et séparées de leurs prêtres.

40 ans de jeûne eucharistique

Pourtant, un catholicisme souterrain se maintient. Le cardinal Ernest Simoni, emprisonné pendant des années par le régime, témoignait dans un entretien donné à Vatican Insider en 2016 : “Pendant les années de prison je n’ai jamais dérogé à mon devoir. Je disais la messe de mémoire, en latin, et distribuais la communion en cachette. Je cuisais l’hostie dans des petits fours à essence qui servaient pour les chantiers ou bien j’allumais un feu de bois. Le vin, je le substituais par la pulpe de raisins que je pressais. En hiver, j’utilisais des flacons de vins que m’apportaient mes parents.”

Certains payent pourtant leur désobéissance de leur vie : Mgr Erns Coba, administrateur apostolique de Shkodrë, est interrompu alors qu’il célébrait en secret une messe. Un groupe de jeunes fanatiques le roue de coup et le laisse sans vie. En 1985, Enver Hoxha meurt et son successeur Adil Carçani laisse les communautés religieuses chrétiennes et musulmanes un peu plus libres tout en maintenant les interdictions de culte, mais il faudra attendre 1990 pour que les religions soient à nouveau autorisées. Le 4 novembre de cette année, le première messe est célébrée.


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Le cardinal Simoni raconte ce grand moment de joie : “J’étais heureux. Je me souviens que ce jour-là sont venues de nombreuses personnes. Elles n’avaient pas perdu l’espérance, elles n’avaient pas perdu la foi : aucune dictature ne peut arrêter Jésus. J’étais heureux de pouvoir parler de Lui aux fidèles et les aider à Le suivre parce que ce n’est pas celui qui répétera “Seigneur, Seigneur“ qui entrera dans le Royaume des cieux, mais celui qui applique la volonté du Père.” En 1992, un nouveau primat d’Albanie et archevêque de Tirana est nommé par le Saint-Siège. Le jeûne eucharistique aura duré pour certains plus de 40 ans. Les saints martyrs d’Albanie ont été béatifiés en 2016 par le pape François.


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