S’il oblige chacun à modifier ses habitudes, le confinement, pourtant nécessaire dans la lutte contre la propagation de l’épidémie de covid-19, exacerbe le quotidien déjà difficile de nombreux Français.
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Après l’effet de surprise et quelques – nombreux – ajustements, une routine du confinement semble s’être installée dans le quotidien des Français. Si pour certains elle se vit relativement sereinement, pour d’autres, elle ne fait qu’exacerber les difficultés déjà nombreuses de leur quotidien. Femmes battues, habitants des quartiers sensibles, détenus, enfants placés… Pour eux, le confinement vient renforcer les obstacles et épreuves qu’ils rencontrent habituellement. Conscients de cela, le gouvernement, des associations et des professionnels se mobilisent.
Les détenus, doublement confinés
Privés de liberté pour les crimes et délits qu’ils ont commis, les prisonniers se trouvent désormais également privés d’activités et de visite. Depuis le début du confinement mardi 17 mars, les activités ont été suspendues à l’intérieur des établissements pénitentiaires et les parloirs fermés. “Les personnes détenues vivent un confinement dans le confinement. Elles sont privées de tout lien avec l’extérieur“, a témoigné Jocelyne (prénom modifié), aumônière de prison à Marseille, auprès du Secours catholique. Pour pallier l’isolement avec la famille, le ministère de la Justice a attribué à chaque détenu un montant de 40 euros par mois pour appeler leur famille mais le manque de cabines téléphoniques génère une frustration. En parallèle, la ministre de la Justice, Nicole Belloubet a indiqué que 3.500 détenus avaient “été libérés” dans le cadre de mesures destinées à désengorger les prisons. Le Conseil d’État doit examiner en ce sens ce vendredi un recours en référé d’associations de défense des droits des détenus et de syndicats d’avocats et magistrats.
Les femmes battues, victimes collatérales
Conséquence indirecte du confinement, les violences conjugales progressent : +32% en zone gendarmerie en une semaine et +36% dans la zone de la préfecture de police de Paris. Pour permettre aux femmes victimes d’appeler à l’aide, le ministre de l’Intérieur a expliqué jeudi 26 mars lors de son passage sur France 2 qu’il avait été décidé, en accord avec l’Ordre national des pharmaciens, de mettre en place un dispositif au sein des pharmacies pour alerter les forces de l’ordre. Marlène Schiappa a annoncé de son côté la mise en place à partir de ce lundi 30 mars de “points d’accompagnement éphémères” dans des centres commerciaux pour accueillir les victimes et le déblocage d’un million d’euros pour venir en aide aux associations de terrain. Les avocats du barreau de Paris se mobilisent également pour les victimes de violences conjugales avec la mise en place d’une plateforme avec consultations gratuites et permanence téléphonique.
Habitants des quartiers sensibles, des difficultés exacerbées
Dans les quartiers dits sensibles, le confinement vient renforcer les inégalités. S’il reconnaît la nécessité dans la lutte contre la propagation du covid-19, le président de l’association Le Rocher – Oasis des cités, Alain Froment, raconte : « Dans les cités, cette première semaine de confinement a généré une immense détresse. Incompréhension des mesures gouvernementales, panique des parents face à l’incapacité à assurer l’école à la maison, solitude accrue… ». Face à cette situation, plusieurs actions ont été lancées localement, par des collectivités, des entreprises et des associations « formant une « résistance » solidaire, à l’arrière de la première ligne tenue par les médecins, chercheurs et personnel soignant ».
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Les sans-abri, enfermés dehors
Privés de logement et de solidarité – les Français et bénévoles d’associations étant eux-mêmes confinés chez eux – les sans-abri ont rapidement été identifiés par le gouvernement comme un public à risque. Pour permettre une meilleure prise en charge, les autorités ont prolongé de deux mois la trêve hivernale jusqu’à fin mai, de quoi suspendre les expulsions et éviter des remises à la rue pour les 14.000 personnes logées en centres d’hébergement d’urgence seulement pendant l’hiver. En parallèle, plus de 5.000 places supplémentaires sont désormais mobilisées dans les hôtels pour héberger les sans-abri pendant l’épidémie et 40 sites de confinement sont actuellement prêts à accueillir des SDF malades du covid-19, a annoncé le ministère du Logement. Côté solidarité, les associations s’organisent pour assurer un service minimum de maraudes et de distribution de colis alimentaires.
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Les enfants placés, une jeunesse oubliée
Le confinement imposé par les autorités met à rude épreuve la protection de l’enfance en France, déjà sous tension depuis plusieurs années. Actuellement, quelque 175.000 mineurs (dont 60.000 en foyers ou familles d’accueil) sont placés sous la protection de l’Aide sociale à l’enfance (ASE). Pour faire face aux conditions « exceptionnelles » de la crise épidémique, le secrétariat d’État chargé de la Protection de l’enfance a annoncé un « assouplissement » des normes encadrant l’accueil des mineurs dans les foyers de l’ASE. Une ordonnance adoptée en Conseil des ministres permet ainsi de « déroger aux conditions minimales techniques d’organisation et de fonctionnement » habituelles, dont le niveau de qualification des professionnels, ou encore les taux d’encadrement. Il introduit également la possibilité d’un taux d’occupation de 120%, mais le tout « en veillant à maintenir des conditions de sécurité suffisante dans le contexte de l’épidémie de covid-19 ». Parmi les assouplissements mis en place, le gouvernement a prévu d’autoriser certaines structures, qui habituellement ne proposent qu’un accueil de jour, à héberger aussi les enfants la nuit. L’objectif : maintenir une « continuité de service » en dépit d’un absentéisme important du fait de l’épidémie.