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On pourrait croire que les fleurs dans les églises apportent une touche de beauté en fonction des saisons et des occasions. En réalité, l’art floral dans la liturgie permet certes de rappeler la beauté de la Création de Dieu, mais il a aussi ses codes qui s’enracinent dans le calendrier liturgique avec une symbolique spirituelle précise. Ainsi, chaque fête et chaque temps a sa couleur : le violet pour le Carême et l’Avent, le blanc et le jaune pour le temps pascal, le rose pour les deux dimanches de la joie (3e dimanche de l’Avent et 4e dimanche de Carême), comme en témoignent les vêtements des célébrants, qui surprennent souvent les fidèles. De la même façon, la forme et la couleur des bouquets doivent alors s’harmoniser avec ce calendrier, en respectant quant à leur disposition les consignes du Missel Romain.
Le Carême, qui a commencé le Mercredi des Cendres, est un temps d’union au mystère de Jésus qui a passé quarante jours dans le désert, résistant à toutes les tentations du diable avant sa crucifixion. Comme lui, un chrétien doit savoir jeûner et résister fermement aux tentations qui l’entourent. Pendant ce temps « au désert », les fleurs ornent les églises. Mais leur présence doit être sobre, simple et discrète, comme l'indique le Service de la Pastorale liturgique et sacramentelle. La plupart du temps, elles évoquent alors l’austérité de ce temps liturgique qui invite à retrouver l’essentiel. Une injonction doit néanmoins être respectée : la décoration de fleurs sur l’autel-même est interdite, à l’exception du quatrième dimanche (Lætare), des solennités et des fêtes.
Un seul fil conducteur pour tout le Carême
Pour composer les bouquets de Carême, en règle générale, on garde tout le long de ce temps un fil conducteur : une seule composition avec quelques variations au fil des dimanches. Cette base de la composition est très simple, dépouillée, pour symboliser le désert avec des branches d’arbre mortes qui annoncent la Rédemption par la Croix, des pierres claires et foncées qui figurent la terre et quelques fleurs séchées qui symbolisent la mort avant la Résurrection.
La composition peut-être partagée entre deux vases symbolisant ainsi une alliance de la Rédemption par la Croix et la Résurrection. Pour préparer Pâques au fil des dimanches, on y ajoutera des branches, des graines et des fleurs séchées en ajoutant ensuite des feuillages verts et des fleurs fraîches symbolisant la vie nouvelle du Ressuscité et sa victoire sur la mort.
Petit guide des bouquets de Carême :
Le 1er dimanche de Carême, on ajoute du sable sur les pierres foncées et des branches couvertes de lichens (mousse qui envahit les branches des arbres).
Le 2e dimanche de Carême est le temps de la transfiguration : des branches de cornouiller (arbuste à petites fleurs jaunes) vont alors enluminer le bois sec, accentuant le contraste entre la mort et la vie, entre la Passion et Pâques. Elles laissent ainsi paraître la gloire de Dieu. Des petits bouquets de jonquilles ou d’immortelles symbolisant l’espérance s’y ajouteront.
Le 3e dimanche de Carême rappelle ce que Jésus dit à la Samaritaine : "Si tu savais le don de Dieu" (Jean, 4-10). Une cruche avec des genêts et des jonquilles symboliseront alors la miséricorde qui fait passer de la mort à la vie.
Pour exprimer les paroles du 4e dimanche de Carême consacré à l'aveugle-né qui vivait dans les ténèbres, à côté des branches de bois mort on allumera un cierge pour signifier la lumière du Christ.
Enfin, le dernier dimanche du Carême, celui de la résurrection de Lazare, la composition florale soulignera alors le contraste entre la mort et la vie, en ajoutant aux branches un simple feuillage printanier.
Le Dimanche des Rameaux, le bouquet centré sur la Croix
Le Dimanche des Rameaux, le bouquet sera centré sur la Croix. Au pied d’une statue du Christ sur la Croix, aux pierres noires et blanches, ainsi qu’aux branches de bois mort, celles qui ont été le fil conducteur pendant tout le Carême, on ajoutera des palmes, le symbole de la victoire sur le mal, et des lys blancs qui montrent la participation de Jésus à la Gloire du Père. Enfin, l’ensemble sera complété de gerberas rouges qui évoquent le sang versé par amour pour l'humanité.
Toutes ces fleurs qui accompagnent le Carême sont là pour inspirer notre vie spirituelle et ses vertus. C’est la raison pour laquelle elles doivent avoir "la plus grande expressivité", comme l’a souligné le pape Jean Paul II dans sa Lettre Apostolique Vicesimus Quintus Annus : « Le pain et le vin, l’eau et l’huile, mais aussi l’encens, les cendres, le feu et les fleurs et presque tous les éléments de la création ont leur place dans la liturgie comme une offrande au Créateur et contribuent à la dignité et à la beauté de la célébration ».