Les conclusions d’une enquête menée pendant plusieurs mois par un organisme indépendant à la demande des responsables de L’Arche viennent de révéler que Jean Vanier, fondateur de l’association et décédé le 7 mai 2019, est accusé d’abus sexuels sur plusieurs femmes. « Nous sommes bouleversés par ces découvertes et nous condamnons sans réserve ces agissements », ont assuré les responsables de L’Arche.
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Tristesse, sidération, colère… C’est une onde de choc sans précédent qui s’est abattue ce samedi 22 février sur L’Arche, association internationale qui accueille dans près d’une quarantaine de pays des personnes ayant une déficience mentale. Jean Vanier, son fondateur, est accusé d’abus sexuels sur plusieurs femmes, révèlent les conclusions d’une enquête. Voulue par les responsables de L’Arche internationale et confiée à un organisme indépendant, elle portait notamment sur des témoignages mettant en cause son fondateur, Jean Vanier, et son lien historique au père Thomas Philippe qu’il désignait comme son père spirituel.
Période 1970-2005
Jean Vanier est accusé d’abus sexuels sur plusieurs femmes sur la base de témoignages « sincères et concordants portant sur la période 1970-2005 » de six femmes adultes, non handicapées. Avec ces victimes, Jean Vanier « a entrepris des relations sexuelles, généralement dans le cadre d’un accompagnement spirituel, et dont certaines ont gardé de profondes blessures », explique l’Arche internationale dans un communiqué. Ces femmes, sans lien entre elles, rapportent des faits similaires, « associés à un discours supposément spirituel ou mystique destiné à les justifier ». Ces agissements indiquent une emprise psychologique et spirituelle de Jean Vanier sur ces femmes et soulignent son adhésion à certaines des théories et pratiques déviantes du père Thomas Philippe. Au terme de cette enquête, rien n’indique que des personnes handicapées auraient été victimes d’actes inappropriés de la part de Jean Vanier.
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« Nous sommes bouleversés par ces découvertes et nous condamnons sans réserve ces agissements en totale contradiction avec les valeurs que Jean Vanier revendiquait par ailleurs », ont déclaré Posner et Stacy Cates Carney, responsables de L’Arche internationale dans une lettre adressée à leurs membres en date du 22 février. Reconnaissant le courage et la souffrance de ces femmes, ils ont tenu à demander à toutes, « pour ces faits qui se sont déroulés dans le contexte de L’Arche et dont certains ont été initiés par notre fondateur », pardon.
“Si le bien considérable qu’il fit tout au long de son existence n’est pas mis en question, nous allons cependant devoir faire le deuil d’une certaine vision que nous pouvions avoir de lui.”
Souvent présenté comme un modèle de charité, une figure incontournable de l’accueil et l’attention aux plus fragiles, Jean Vanier était pour de nombreuses personnes un modèle à suivre. « Pour beaucoup d’entre nous, Jean (Vanier) a compté parmi les personnes que nous avons aimées et respectées le plus », ont ainsi expliqué les responsables de L’Arche. « Nous mesurons le trouble et la douleur que ces informations vont provoquer chez beaucoup d’entre nous, à l’intérieur de L’Arche, mais aussi à l’extérieur… tant il aura inspiré et réconforté de nombreuses personnes partout dans le monde. Si le bien considérable qu’il fit tout au long de son existence n’est pas mis en question, nous allons cependant devoir faire le deuil d’une certaine vision que nous pouvions avoir de lui ainsi que de nos origines ».
Rendant hommage aux victimes, les évêques du Québec ont également tenu à conforter L’Arche dans sa mission : « Nul doute que l’image que nous nous faisons de Jean Vanier est ternie à jamais”, écrivent-ils. “Toutefois, les œuvres qu’il a mises sur pied gardent toute leur pertinence et leur prophétisme. Le soutien et l’estime que nous leur accordons doivent se poursuivre. »
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Comptant aujourd’hui quelque 10.000 membres répartis dans 154 communautés à travers le monde, L’Arche a su inspirer et réconforter des milliers de personnes. En choisissant de rendre publique cette information, les responsables de L’Arche comptent initier un chemin de transparence. Dans cette démarche, l’association a été accompagnée par les représentants de l’Église de France et la CIASE, la commission présidée par Jean-Marc Sauvé en charge de faire la lumière sur les abus sexuels dans l’Église. Les évêques de France ont ainsi tenu à exprimer « leur estime pour les responsables de L’Arche qui ont pris au sérieux les témoignages reçus et qui ont su adopter les moyens nécessaires pour qu’une enquête indépendante et approfondie soit menée ».
Dans les prochains mois, L’Arche Internationale va désormais mener une évaluation approfondie et indépendante de ses mesures actuelles de prévention des abus et de protection des personnes. En complément de celles déjà existantes au niveau local, une procédure centralisée de signalement à laquelle tous ses membres peuvent avoir accès dans un cadre sûr et confidentiel a été mise en place.
« On ne peut pas imaginer poursuivre notre cheminement en gardant de tels faits secrets », a ainsi confié Stephan Posner lors d’un entretien accordé à la chaîne KTO. « Si L’Arche veut poursuivre sa route, elle doit assumer cette partie-là de son passé. Ce que nous allons perdre en certitude, nous espérons le gagner et maturité et en lucidité et, je crois, cela nous permettra de poursuivre L’Arche avec plus de liberté ». Les résultats de l’étude ont été personnellement présentés au pape François et à l’archevêque de Canterbury et primat de l’Église anglicane, Justin Welby.
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