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En France, la traite humaine n’est pas un concept, c’est une réalité

Adolescente pleure

Photo d'illustration.

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Domitille Farret d'Astiès - publié le 07/02/20
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À l’initiative du pape François, le 8 février est consacré à la prière et la réflexion au sujet de la traite humaine. Si celle-ci prend de nombreux visages, elle reste encore méconnue. Or, elle est très réelle, y compris en France.

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Lorsqu’on pense traite humaine, on l’associe souvent à de lointains réseaux de prostitution ou encore à des négriers d’antan transportant des esclaves africains pour les vendre. La journée mondiale de lutte contre la traite humaine, le 8 février, vient pourtant rappeler que cette réalité ne concerne pas que de vagues pays lointains et qu’elle existe aussi ici, en France.

La traite humaine fait chaque année 40 millions de victimes dans le monde, dont un tiers d’enfants selon un récent rapport de l’ONU. Toutes ne sont pas officiellement reconnues et en 2016, seulement 24.000 ont été identifiées. Des chiffres “énormes”, selon Geneviève Colas, coordinatrice du collectif “Ensemble contre la traite des êtres humains” pour le Secours Catholique Caritas France. Après les drogues et la contrefaçon, c’est en effet la forme de trafic la plus lucrative au monde, avec 150 milliards de dollars de bénéfice annuel pour les trafiquants. Parmi les victimes, 70% sont des femmes ou de jeunes filles.

Des victimes “recrutées” sur les réseaux sociaux

“La traite prend des formes très variées et aujourd’hui, elle se diversifie”, souligne Geneviève Colas. D’après elle, le développement des réseaux sociaux a servi aux exploitants. Instagram, Facebook, ces applications de notre quotidien sont aussi autant de mines d’or pour les réseaux mafieux qui cherchent à exploiter et à soumettre. “Avec internet, il est plus facile d’hameçonner quelqu’un pour ensuite l’exploiter. C’est très facile par ce biais-là de trouver de futures victimes”.

En France, “on rencontre à la fois des victimes étrangères et des populations vulnérables. Mais comme beaucoup de choses se font de manière cachée, c’est difficile à repérer” déplore Geneviève Colas. De plus, dans l’Hexagone, seules la police et les inspecteurs du travail sont habilitées à identifier formellement les victimes, ce qui, souligne-t-elle, n’est pour le moment “pas suffisant”.

Un engrenage pour les mineurs

“Le trafic de mineurs est réel”, insiste-t-elle, expliquant que cette réalité reste encore mal connue du grand public. Parmi les victimes, des adolescents en rupture avec leurs familles, d’autres en souffrance ou à la limite de la déscolarisation. “Les trafiquants recherchent des personnes vulnérables, à la rue, sans abri, sans travail, qui n’ont pas le réseau nécessaire pour s’en sortir. Et grâce aux réseaux sociaux, ils ont les moyens de savoir sur qui ils vont tomber”. Cela peut être une adolescente ayant besoin de tendresse qui va suivre un jeune homme prévenant qui se retrouve malgré elle jetée dans un réseau de prostitution. Elle évoque ainsi le sort de Lisa*, cette jeune fille qui à 14 ans devenue malgré elle, de fil en aiguille, secrétaire d’un réseau de prostitution.


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La forme la plus courante rencontrée chez les mineurs est la contrainte à commettre des délits. “La mendicité forcée est au coin de la rue. On voit des mineurs auxquels on demande de ramasser vingt téléphones portables par jour mais souvent, ils sont traités comme des délinquants”. D’autres sont utilisés pour vendre des fruits, des avocats ou des fleurs à la sortie du métro en échange d’un logement. Sans papiers et sans domicile, ils sont complètement vulnérables et à la merci des exploitants qui se servent de cette faille.

Le gros réseau, une idée reçue

“Une forme de traite peut en entraîner une autre et les enfants cumulent souvent les formes d’exploitation”, relève Geneviève Colas. Certains, contraints de voler dans le métro, sont également exploités sexuellement. On voit aussi beaucoup d’esclavage domestique. Certaines fillettes deviennent de véritables bonnes à tout faire, parfois au sein de leur propre famille. Elle sont volontairement isolées et coupées de tout rapport en-dehors de la maison, et comme elles ne parlent pas la langue française, sont d’autant plus vulnérables.

Et contrairement aux idées reçues, il ne s’agit pas forcément de gros réseaux, au contraire. “En France, ce sont plutôt des individus qui exploitent telle ou telle personne. C’est parfois une ou deux personnes, un réseau familial. On n’arrête pas 60 personnes d’un coup”. Le travail important accompli par les institutions et les associations est nécessaire pour lutter contre ce phénomène. “En France, nous avons de bonnes lois par rapport à la traite, mais encore des difficultés dans leur application. Il y a tout un travail un travail de prévention à faire auprès des publics exclus, chez les roms, dans les bidonvilles, mais aussi de sensibilisation pour montrer que la traite existe”.

*Le prénom a été changé.

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