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Bioéthique : « Le vote du texte au Sénat est loin d’être une formalité »

La ministre de la Santé et de la Solidarité au Sénat le 22 janvier 2020.

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Agnès Pinard Legry - publié le 04/02/20
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Après avoir achevé l’examen du projet de loi bioéthique, le Sénat va voter, mardi 4 février, l’ensemble du texte. Si la qualité des débats a été unanimement saluée, l’issue du vote n’est pas certaine.

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Les sénateurs auront passé huit jours, du 21 au 29 janvier, à examiner le projet de loi bioéthique. Si les débats ont été animés, et denses, « chacun a été respectueux de l’opinion des uns et des autres et nous avons pu nous exprimer posément », confie à Aleteia Muriel Jourda, sénatrice LR du Morbihan et co-rapporteur de la commission spéciale bioéthique du Sénat. « Les débats ont été suivis par les sénateurs et les positions ont été assez pesées et posées ». Un vrai débat, certes, qui malheureusement, « dans le contexte social du moment, n’a pas eu suffisamment d’écho », regrette de son côté Guillaume Chevrollier, sénateur LR de la Mayenne. « Compte tenu de la gravité des sujets abordés cela aurait mérité plus de médiatisation ».

Après les débats et le vote en hémicycle article par article, les sénateurs doivent voter ce mardi 4 février, le texte dans son ensemble. Un texte bien différent de celui voté par l’Assemblée nationale mais aussi de celui proposé par la commission spéciale du Sénat. « Nous sommes revenus sur beaucoup de positions de la commission, je pense notamment à la levée de l’interdiction des embryons chimériques ou à l’extension à titre expérimental du diagnostic préimplantatoire » souligne Muriel Jourda. « La bioéthique faisant partie des sujets sur lesquels il n’y a pas de réflexe partisan, de vote de groupe, nous n’avons jamais la certitude qu’une commission soit représentative de l’hémicycle ».


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Si le texte proposé au vote aux sénateurs ce mardi ouvre bien la procréation médicalement assistée (PMA) aux couples de femmes et aux femmes seules, il en limite le remboursement pour les seuls cas d’infertilité. Il supprime également l’autoconservation des ovocytes, change les modalités de levée de l’anonymat et modifie complètement le système de filiation proposé par l’Assemblée nationale en proposant d’établir la filiation de la mère d’intention, c’est-à-dire celle qui n’a pas accouché, par voie d’adoption. « On a essayé, à travers les discussions, de mettre un certain nombre de verrous », précise Guillaume Chevrollier. Par exemple, pour que l’interdiction de la GPA soit effectivement appliquée, le Sénat a voté un amendement, porté par Bruno Retailleau (LR), interdisant la transcription complète dans l’état civil français d’un acte de naissance étranger d’un enfant français né d’une GPA, qui mentionnerait un parent d’intention. Il en va de même pour l’expérimentation d’un dépistage préimplantatoire recherchant les anomalies chromosomiques chez les embryons (DPI-A) pour améliorer le taux de réussite des fécondations in vitro. Alors que la commission spéciale l’avait autorisé, la chambre haute du Parlement a supprimé cette disposition, par 181 voix contre 123, du projet de loi bioéthique.

Le verre à moitié plein ou à moitié vide

« Si le débat a été qualitatif, je ne suis globalement pas satisfaite du texte », reconnaît Muriel Jourda. Défavorable à l’élargissement de la PMA, elle reconnaît que « quitte à avoir introduit cet article, elle se félicite des autres éléments votés par le Sénat concernant la filiation, l’anonymat et le non-remboursement par la Sécurité sociale ». De même pour les amendements votés qui posent, selon elle, des « garde-fous ». « Mais c’est un texte qui va être compliqué à voter », reconnaît-elle volontiers. Chargée de l’explication de vote de son groupe, Les Républicains, Muriel Jourda l’assure : « ce sera tout sauf une formalité ».


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Car la question est de savoir si on regarde le verre à moitié plein ou à moitié vide. Il y a d’un côté l’élargissement de la PMA, qui relève d’une discussion sociétale, et le reste du texte qui relève directement de la bioéthique. « Ces deux versants cohabitent mal », reconnaît-t-elle volontiers. « C’est un texte saucissonné avec une partie sociétale et le reste lié à des problématiques de recherche », indique de son côté Guillaume Chevrollier. Concrètement, malgré les “verrous” posés tout au long du texte (maintien de l’interdit des embryons chimériques, refus de l’extension du DPI…), le vote de l’élargissement de la PMA, même sous-conditions (non-remboursement pas la Sécurité sociale, mode de filiation modifié…) est difficilement envisageable pour nombre de sénateurs. À l’inverse, ceux qui étaient favorable à l’élargissement de la PMA aux couples de femmes et aux femmes seules peuvent ne pas vouloir voter le régime dans lequel elle va être appliquée. « Ceux qui étaient pour un texte plus restrictif était contre l’élargissement de la PMA… et l’inverse est vrai », résume Muriel Jourda.

Une incertitude qui laisse planer le doute quant à l’issue du vote des sénateurs. « Si le vote global est négatif on ne renvoie aucun texte à l’Assemblée et la suite risque d’être compliquée », reconnaît Guillaume Chevrollier. « Chacun trouvera son équilibre, ou pas, sur le texte », précise Muriel Jourda. « En votant pour on valide des éléments qui ne nous plaise pas et en votant contre on lève des éléments auxquels on tient… C’est un choix assez cornélien qui est tout sauf évident ».


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