La ville d’Emmaüs est évoquée par l’Ancien Testament au livre des Maccabées lors de la révolte asmonéenne et de Judas Maccabée s’emparant de la cité. Mais ce sont surtout les Évangiles avec le fameux récit des pèlerins d’Emmaüs qui donneront toute leur saveur et notoriété à ce célèbre lieu biblique.
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Si de nos jours, le nom d’Emmaüs évoque spontanément pour les chrétiens le récit livré par Luc en son Évangile après la Résurrection du Christ, la cité était cependant déjà connue à la période tardive de l’Ancien Testament lors de la révolte asmonéenne. À moins d’une trentaine de kilomètres de Jérusalem, ce lieu dont l’étymologie signifierait « sources chaudes » jouissait, en effet, d’une position stratégique.
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Au IIe siècle avant J.-C., les juifs de Judée menés par Judas Maccabée se révoltèrent contre les Séleucides, ces Grecs dominant la région pendant la période hellénistique. Les deux premiers Livres des Maccabées relatent ces événements opposant Juifs aux Séleucides menés par le général Gorgias : « Alors Gorgias prit cinq mille hommes et mille cavaliers d’élite, et leva le camp pendant la nuit pour s’approcher du camp des juifs et les frapper à l’improviste ; et des hommes qui étaient de la citadelle leur servaient de guide. Judas l’apprit et il se leva, lui et les vaillants, pour frapper le gros de l’armée du roi, qui était à Emmaüs ; car cette armée était encore dispersée hors du camp. Gorgias vint donc dans le camp de Judas pendant la nuit et n’y trouva personne ; et il les cherchait dans les montagnes, en disant : ils fuient devant nous » (1Martyrs, 4). Le jour levé, Judas apparaît alors dans la plaine avec 3.000 hommes seulement, sans boucliers ni épées, face à eux, une armée puissamment équipée… Mais, Judas galvanise ses hommes : « Ne craignez point leur multitude, et ne redoutez pas leur choc. Souvenez-vous de quelle manière nos pères furent sauvés dans la mer Rouge, lorsque le Pharaon les poursuivait avec une armée nombreuse ».
Dieu était effectivement avec eux et l’ennemi fut exterminé, pas un païen ne réchappa à la bataille d’Emmaüs. L’endroit fut pour l’Ancien Testament un lieu de foi, et c’est cette même foi que réclamera Jésus de nouveau à Emmaüs…
Sur le chemin d’Emmaüs
L’Évangile de Luc (Lc 24, 13-32) rapporte un épisode profond et touchant avec les pèlerins d’Emmaüs. Si le récit est connu et ne finit pas depuis d’être une source de méditation pour les croyants et pour les artistes, il mérite cependant par sa beauté d’être brièvement rappelé : « Le même jour, deux disciples faisaient route vers un village appelé Emmaüs, à deux heures de marche de Jérusalem, et ils parlaient entre eux de tout ce qui s’était passé. Or, tandis qu’ils s’entretenaient et s’interrogeaient, Jésus lui-même s’approcha, et il marchait avec eux ».
Les disciples ne reconnaissent pas Jésus et s’étonnent que ce dernier ne sache pas ce qui vient de se passer à Jérusalem. Le Christ poursuit et les interroge : « Quels événements ? » Ils lui répondirent : « Ce qui est arrivé à Jésus de Nazareth, cet homme qui était un prophète puissant par ses actes et ses paroles devant Dieu et devant tout le peuple : comment les grands prêtres et nos chefs l’ont livré, ils l’ont fait condamner à mort et ils l’ont crucifié. Nous, nous espérions que c’était lui qui allait délivrer Israël. Mais avec tout cela, voici déjà le troisième jour qui passe depuis que c’est arrivé ». Devant leur incrédulité, Jésus leur répond : « Esprits sans intelligence ! Comme votre cœur est lent à croire tout ce que les prophètes ont dit ! Ne fallait-il pas que le Christ souffrît cela pour entrer dans sa gloire ? ». Alors, il leur rappelle tout ce qui dans les Écritures se rapportait à sa venue sur terre. Mais, les disciples ne le reconnaissent toujours pas…
Jésus feint alors de poursuivre son chemin, et les disciples le pressent dès lors de rester avec eux et de partager leur repas. « Quand il fut à table avec eux, ayant pris le pain, il prononça la bénédiction et, l’ayant rompu, il le leur donna. Alors leurs yeux s’ouvrirent, et ils le reconnurent, mais il disparut à leurs regards. Ils se dirent l’un à l’autre : « Notre cœur n’était-il pas brûlant en nous, tandis qu’il nous parlait sur la route et nous ouvrait les Écritures ? ». Avant ce repas, le cœur des disciples n’était, en effet, pas suffisamment ouvert pour reconnaître celui qui était à la source de leur foi, et la répétition des gestes de l’Eucharistie par le Christ fut nécessaire pour leur ouvrir les yeux… Combien faut-il en effet de gestes pour que chacun ouvre les yeux, tel est le message de foi d’Emmaüs…
La postérité d’Emmaüs
Si les lieux de ce repas ne sont plus identifiés de nos jours après une longue tradition perdue, naguère rapportée par Origène et saint Jérôme, les restes d’une première basilique suivie d’un autre édifice byzantin pourraient cependant confirmer ces lieux comme ceux de l’Évangile de Luc. Quoi qu’il en soit, Emmaüs demeure indéniablement synonyme depuis ces évènements bibliques de marche vers la foi, chaque croyant pouvant se reconnaître dans ces deux disciples aveuglés par la rationalité et limités dans leur croyance au Christ ressuscité. Ce passage émouvant développe une richesse d’éléments qui ne cessera d’être commentée depuis lors. Le Christ met en œuvre la première Lectio Divina après sa Résurrection en méditant la Parole avec eux. Mais son action ne se « limite » pas seulement à l’interprétation des textes, Jésus associe également très étroitement la force de l’Eucharistie lors du repas pris avec eux. C’est lorsque le Christ bénit et rompt le pain partagé qu’ils Le reconnaissent : leurs yeux s’ouvrent alors, rapporte l’Évangile.
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Il n’est pas, dès lors, étonnant que les plus grands peintres aient plus volontiers retenu cette scène finale, ce repas partagé à Emmaüs, que le cheminement même sur la route d’Emmaüs. Des œuvres passées pour nombre d’entre elles à la postérité, dont celles notamment de Duccio, Rembrandt, Le Caravage, Véronèse, Pontormo, Vélasquez, Bassano et, plus proche de nous, Maurice Denis. D’admirables créations artistiques qui ne cesseront, en effet, de magnifier cet épisode fort et sensible de l’Évangile, ce célèbre repas d’Emmaüs.