Les idées les plus irrationnelles s’installent dans l’opinion quand la politique se transforme en religion. L’obsession du mal conduit à l’utilisation du mal pour lutter contre le mal. Ainsi naissent les aveuglements collectifs.Dans son livre Aveuglements, religions, guerres, civilisations, publié en 2018 aux éditions du Cerf, Jean-François Colosimo reprend et étend la thèse fondamentale de Carl Schmitt (1888-1985), l’un des plus grands penseurs de la politique au XXe siècle, sur l’état de désordre de la planète. Cette thèse est simple : la vie politique de l’humanité est confrontée aux forces du mal qui veulent le chaos. Face à cela il n’y a qu’une solution : d’abord une religion, ensuite une religion politique, enfin une religion politique utilisant le mal afin de remédier au mal. En Occident, par le passé, au temps de l’Inquisition — soutient Carl Schmitt — le modèle de cette religion a été donné par la théologie-politique mise en place par le catholicisme. Par la suite, Hitler s’est inspiré de la théologie politique afin de légitimer la guerre au nom du salut de la nation érigée en idole. Ce qui a valu à Carl Schmitt d’être considéré comme l’un des théoriciens du nazisme.
Théologie politique et aveuglement
Aujourd’hui, la théologie politique correspond parfaitement à ce qui se passe avec l’islamisme. Pensant que l’Occident incarne le mal, celui-ci entend le combattre par une religion, par une religion politique, enfin par une religion politique utilisant le mal afin de lutter contre le mal. Le livre de Jean-François Colosimo dresse un parallèle entre la théologie politique et l’aveuglement. Quand, étant obsédé par le mal on ne voit comme solution qu’une religion politique pratiquant le mal, on est effectivement aveuglé. On en voit plus le mal que l’on pratique. Et pour cause ! Impossible de le voir puisque, quand on pratique le mal on ne le pratique pas, on lutte contre lui. Qui plus est, ce mal étant censé ramener l’ordre dans la cité il est politiquement rationnel. Enfin, mettant fin au mal sur terre, il n’est pas simplement politiquement rationnel. Il est religieusement salutaire.
La théologie politique appliquée à la PMA
Lors de la question de la PMA on a pu constater une incapacité de la part de leurs défenseurs à entendre les arguments opposés à ce projet. La PMA pose deux questions fondamentales : celle de la disparition du couple homme-femme comme couple fondateur de la transmission de la vie et celle de la disparition du père dans l’éducation d’un enfant. Pour toute réponse aux questions qui ont été soulevées à ce sujet, il a simplement été répété en boucle : « Les opposants à la PMA sont intolérants. Ils ont homophobes. Ce sont des réactionnaires. Ils s’opposent à l’évolution. » Ce refus de répondre et d’argumenter n’est pas un hasard.
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Les partisans de la PMA sachant très bien que ce projet est violent et n’osant pas le reconnaître, ceux-ci changent de terrain quand il en est question, en ne parlant plus de la fin du couple homme-femme et de la mort du père mais des opposants à la PMA, la question devenant non pas ce qu’ils disent mais ce qu’ils sont. Lorsque ce glissement se produit, on retrouve point par point les trois éléments de la théorie de Carl Schmitt.
Le mal contre le mal
Tout commence par la question du mal. Aux yeux des partisans de la PMA, qui sont leurs opposants ? Des militants au fonctionnement assimilable à celui des nazis, c’est-à-dire Le mal sur la terre. Pour une raison simple. Hitler par le passé a fait déporter non seulement les juifs et les tziganes mais les homosexuels. Être contre la PMA aujourd’hui est la même chose que déporter les homosexuels hier. Forts de cet amalgame les partisans de la PMA peuvent alors passer à la deuxième étape de leur stratégie : faire taire par la force tous ceux qui critiquent la PMA en les empêchant physiquement de s’exprimer après leur avoir ôté toute dignité en les faisant passer pour des l’incarnation du mal.
Les partisans de la PMA sont majoritairement de gauche, même s’il y a des gens de gauche pour être contre et des gens de droite pour être pour. Pour la gauche, d’ordinaire, trois choses incarnent le mal : l’amalgame, la stigmatisation et la suppression de la liberté d’expression. Qu’à cela ne tienne, quand il s’agit de lutter contre les opposants à la PMA, le mal n’est plus un mal mais un bien. Ainsi, faire un amalgame entre Hitler et les opposants à la PMA n’est plus un problème. Stigmatiser ces opposants en les montrant du doigt, non plus. Enfin, empêcher Sylviane Agacinski de faire à Bordeaux une conférence sur le statut de l’homme à l’heure des nouvelles technologies non plus. Notons le bien. Sylviane Agacinski n’était pas venue faire une conférence contre la PMA mais sur le statut de l’être humain à l’heure du transhumanisme. Qu’importe ! Elle a exprimé son opposition à la PMA. Cela suffit pour qu’elle soit désormais interdite de parole dans un lieu public. Les opposants à sa venue ont justifié leur violence en expliquant que la conférence de Sylviane Agacinki n’était pas honnête, aucun contradicteur n’ayant été convié pour un débat. Déplacement du débat une fois de plus, la question n’étant plus le thème de la conférence de Sylviane Agacinski sur le statut de l’homme aujourd’hui mais sa personne elle-même.
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Premier lien donc entre les partisans de la PMA et Carl Schmitt : l’utilisation du mal pour éradiquer le mal. Pas de liberté pour les ennemis de la liberté, disait Saint-Just. Amalgame, stigmatisation et interdiction de parole pour tous les opposants à la PMA. N’oublions pas à cet égard l’amalgame entre La Manif pour tous et les djihadistes, fait par Marlène Schiappa, secrétaire d’État à l’Égalité, lors d’une interview à Valeurs actuelles.
La tolérance et l’amour
Deuxième élément pour faire taire l’opposition à la PMA : le recours à la caution politique. À l’heure où le populisme d’extrême-droite fait peur, lutter contre les opposants à la PMA c’est défendre la démocratie, les droits de l’homme et la paix civile. Donc, message lancé aux politiques : si on veut sauver la démocratie et les droits de l’homme, prière d’être pour la PMA.
Enfin, troisième élément, religieux celui-là. La PMA c’est la tolérance et, derrière elle, l’amour, vertu ô combien chrétienne. D’où ce message lancé aux religions : si on veut sauver la tolérance et l’amour, prière d’être pour la PMA. Message reçu cinq sur cinq par les Églises qui ont reconnu le mariage gay.
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Le couple « mère-mère » : une absurdité totalitaire
Cette stratégie est aujourd’hui payante. L’aveuglement fonctionne à merveille. Lorsqu’il est question de la PMA, les Français se déclarent pour la tolérance et l’évolution. La fin du couple homme-femme comme couple fondateur de la vie ? La disparition du père ? Ils ne voient pas. Ils ne comprennent pas. Ils tombent des nues. Ils haussent les épaules. Ils changent de conversation. On hausse les épaules. Pendant ce temps-là, sans avoir été consultée afin de savoir si elle est d’accord, la société devient… arc-en-ciel.