La « décence commune » d’une société manifeste à travers le vêtement des représentations symboliques puissantes, qui font l’unité culturelle d’un peuple. Si le choix de l’habit ne peut pas se décréter ou s’interdire, la convenance sociale renvoie à une vision de l’homme et de la femme qui appelle le respect.
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Un récent sondage IFOP publié par le Journal du Dimanche indique ce qu’il faut bien appeler un rejet par l’opinion française des signes visibles de l’islam, particulièrement le voile qui est une manière de s’auto-stigmatiser, de se marquer, de se désigner comme musulmane. Il serait trop rapide de voir d’abord dans ce rejet une montée de l’intolérance religieuse contre l’islam, le raidissement d’un ultra-laïcisme à la française ou l’effet d’une hostilité de principe envers les croyants musulmans. Au-delà de la question de l’islam politique, qui progresse notamment par l’affirmation des marqueurs identitaires, nous sommes confrontés à un problème de décence commune : un pays a des modes de vie et des coutumes qui s’expriment aussi par le vêtement.
Des lois non-écrites
D’une certaine manière, beaucoup de Français, lorsqu’ils croisent une femme en voile ou un homme en djellaba, ont une petite musique plus ou moins consciente dans la tête qui leur dit : « En France, on ne s’habille pas comme ça. » Et il est vrai qu’en France, ce n’est pas un usage de s’habiller ainsi. Les us et coutumes fonctionnent en quelque sorte comme des lois non-écrites qui intériorisent dans l’esprit commun une compréhension instinctive de ce qui convient de ce qui ne convient pas. Cette forme de décence commune transcende les classes sociales et les appartenances communautaires.
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Certes, la décence vestimentaire n’est pas un uniforme, elle ne peut être précisément définie et codifiée, mais elle existe : il y a dans notre esprit quelque chose qui nous dit que tel vêtement est décent et tel autre ne l’est pas, avec des nuances, bien sûr, selon le lieu, les circonstances et le contexte. Les punks choquaient jadis le plus grand nombre parce qu’ils ne respectaient pas la décence vestimentaire commune. C’était conscient et assumé : par la différenciation vestimentaire, ils revendiquaient leur rupture avec la société, une contre-culture. Le vêtement dit ainsi quelque chose de son appartenance ou non au « commun ».
Ce que dit le vêtement
Le vêtement manifeste en effet une culture, une mémoire, une anthropologie, des représentations symboliques puissantes. À cet égard, le voile vient heurter de plein fouet les représentations collectives que nous avons de la beauté féminine, du mode de relations entre les hommes et les femmes, du statut des femmes dans la société.
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En France — et plus largement en Europe — les femmes mettent volontiers en valeur les avantages et les formes de ce que l’on nomme le « beau sexe », c’est-à-dire la gent féminine dans son ensemble. En France, il est décent de porter un décolleté, une jupe au-dessus du genou, d’arborer une belle chevelure en liberté. Cela ne signifie en rien des mœurs légères ou le fait que le corps de la femme ainsi magnifié soit disponible au désir impérieux de l’homme.
La valorisation de la femme
En France, il y a une élégance féminine, une valorisation de l’éternel féminin, qui s’incarne dans des tenues qui, conjuguées à une certaine tenue, manifestent une bienfaisante beauté, inspirent le respect du regard masculin, l’éduquent et le grandissent, tant il est vrai que le « beau » élève le monde.
Ces facteurs de profonde psychologie sociale sont en jeu dans l’affaire du voile. Ainsi, le rejet des vêtements musulmans ne constitue pas un rejet du croyant musulman comme tel, mais une affirmation de ce que nous sommes et une demande de le respecter et de s’y adapter.
Tribune publiée partenariat avec Radio Espérance, 6 novembre 2019.