Près d’un an après la présentation par le gouvernement de sa stratégie de prévention et de lutte contre la pauvreté, plusieurs associations rappellent que malgré quelques — timides — avancées, les conditions de vie des personnes précaires se dégradent. « Un an après, il est bien trop tôt pour voir les résultats », confie à Aleteia Véronique Fayet, présidente du Secours catholique.
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C’était il y a un an. Le 13 septembre 2018, Emmanuel Macron annonçait un vaste plan de lutte contre la pauvreté doté d’un budget de 8,5 milliards d’euros. À l’heure du premier bilan, plusieurs associations dénoncent une incohérence entre ce plan et d’autres politiques qui ne font qu’aggraver la situation dans laquelle se trouve ces personnes en situation de précarité. Entretien avec Véronique Fayet, présidente du Secours catholique.
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Aleteia : Le gouvernement présentait sa stratégie de prévention et de lutte contre la pauvreté le 13 septembre 2018. Un an après, les moyens mis en œuvre sont-ils à la mesure des ambitions portées ?
Véronique Fayet : Le Secours catholique avait bien accueilli cette stratégie de lutte contre la pauvreté car nous avions été associés à la concertation. On savait que l’ambition en était limitée malgré l’énergie de la délégation interministérielle et les partenaires engagés. Je note néanmoins deux écueils. Le premier est qu’il faut du temps. Un an après il est bien trop tôt pour voir les résultats. Par exemple, il faudra attendre septembre 2020 pour voir la formation obligatoire pour les moins de 18 ans se mettre en place. Les résultats n’étant pas visibles pour le moment, rien n’a encore changé pour les personnes en situation de pauvreté. Le deuxième écueil vient des autres politiques menées à côté de la stratégie de prévention et de lutte contre la pauvreté et qui limitent voire annulent les effets de ce dernier. Par exemple, les allocations logements (APL) et les prestations sociales sont désindexées par rapport à l’inflation. Autre exemple, les charges d’électricité ayant augmenté, des familles sont obligées d’arbitrer entre différents besoins primaires tels que se chauffer ou se nourrir. Nous avons d’un côté une bonne stratégie, mais pas assez ambitieuse, et de l’autre des politiques fondamentalement dangereuses pour les plus pauvres.
Quels sont principaux points de blocage que vous identifiez qui empêchent une politique efficace ?
Le premier concerne la politique du logement. On a beau avoir des aides diverses et variées, si on n’arrive pas à se loger correctement il est compliqué voire impossible d’avoir une vie digne. J’ai en tête tous ces taudis, ces passoires thermiques qui attendent d’être rénovés et réhabilités. Comme évoquée précédemment, il y aussi l’augmentation des minima sociaux, la réforme du RSA…
“Le travail c’est la dignité, et la dignité est indispensable à la vie.”
On parle beaucoup de l’insertion par le travail : Emmanuel Macron s’est d’ailleurs rendu ce mardi 10 septembre à Bonneuil-sur-Marne pour visiter un chantier d’insertion. L’emploi est-il la solution pour enrayer la précarité et la marche vers l’exclusion ?
Bien sûr ! Si nous évoquons une hausse des minima sociaux pour les personnes en situation précaires c’est pour qu’ils se sentent plus en sécurité pour chercher du travail. Ces personnes n’ont qu’un refrain à la bouche : ils veulent travailler, se sentir utile ! Le travail c’est la dignité, et la dignité est indispensable à la vie. Nous avons un triptyque : revenu décent, accompagnement social renforcé, opportunités d’emploi et d’insertion multipliées. Tout ce qui va en ce sens, et nous sommes d’accord avec le gouvernement sur ce point, est une bonne chose.
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L’Église catholique est-elle suffisamment présente selon vous sur ces thématiques-là ?
Je suis fière de dire que grâce au Secours catholique mais aussi aux autres associations catholiques et chrétiennes, aux paroisses etc, l’Église ce n’est pas seulement des scandales. C’est aussi des millions de personnes engagées sur le terrain auprès des plus pauvres, des plus fragiles. Cette présence constitue pour une partie l’ADN de l’Église, peut-être ne le mettons-nous pas assez en avant. À nous d’agir ensemble et d’additionner nos talents.