Jésus est-il Dieu ou homme ? Cette question a divisé les chrétiens depuis les premiers temps. Brunor s’y attaque dans son dernier album : “La réponse murmurée”.
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Qui se souvient du pape Martin, le dernier pape martyr, et de Maxime le Confesseur ? Tous les deux sont morts pour avoir fait de la théologie. Ils avaient soulevé une question qui leur a coûté la vie… La fameuse “Question interdite”. “Interdite” par l’empereur romain d’Orient Constant en 648, car il souhaitait que le point de vue monothélite l’emporte, et ne voulait plus de débat sur la nature – ou les natures – de Jésus. Tout contrevenant était férocement réprimé, un comble dans un empire supposé être chrétien !
Les monothélites, qui avaient la faveur de Constant, affirmaient qu’il n’y avait en Jésus qu’une seule volonté, celle de Dieu, et qu’il n’y avait pas de volonté humaine en Jésus. “Je crois que nous sommes tous un peu monothélites sans le savoir, s’amuse Brunor, et c’est en découvrant le sort fait au pape Martin et à Maxime le confesseur que je me suis penché sur cette question. Pour moi, ils ont été de vrais martyrs, des témoins de la vérité, qui ont dessablé l’image que j’avais du Christ !”
Qu’est-ce que ça change ?
Fidèles au Concile de Chalcédoine de 451, les deux martyrs professaient qu’il y avait deux volontés en harmonie en Jésus, l’une humaine et l’autre divine. Dieu n’écrase pas la nature humaine, il s’y joint… Or, si l’on creuse le sujet, ça change tout, explique Brunor : “L’empereur Constant avait probablement une vision hiérarchique des choses. Pour lui, Dieu, en s’incarnant, écrase nécessairement l’humanité en Jésus. Cela pourrait passer pour des querelles byzantines, mais en réalité, la réponse que l’on apporte à cette question change totalement la vision du monde.”
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Le monothélisme donne l’image d’un Dieu dominateur, éloigné du Jésus de l’Évangile. “Au terme de mon voyage théologique, j’ai découvert une facette du visage du Christ. Il a comme nous une âme humaine… Il a véritablement vécu comme chacun d’entre nous ! Dieu n’a pas remplacé l’âme humaine de Jésus, il s’y est joint”, s’enthousiasme Brunor, qui nous invite à faire le voyage à sa suite.
Brunor, sa pelle et son seau
Quand on le voit partir avec ses crayons et ses pinceaux à la conquête de l’une des questions théologiques les plus débattues de tous les temps, on pourrait lui dire qu’il va trop loin. N’est-il pas comme un enfant qui, avec sa pelle et son seau projette de construire une réplique du Mont-Saint-Michel ? Pourtant, c’est tout le sel du travail de Brunor que de traiter légèrement, avec humour, des questions profondes. Une fois de plus, avec ce dixième album des “indices pensables”, la recette fonctionne.
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Le dessin est précieux pour soutenir le propos, en particulier pour les néophytes. Même ceux qui ont du mal avec les noms propres identifieront Cyrille d’Alexandrie grimé en shérif de l’Ouest (enfin de l’Est de l’Empire en l’occurrence) chargé de maintenir l’ordre théologique avec des méthodes expéditives. Ou, pour donner un autre exemple, le pseudo-Denys, qui se faisait passer pour Denys l’Aréopagite, et qui survole ici les pages, caché sous un masque de Zorro ! Tentatives d’assassinat, enlèvements, faussaires théologiques… Les rebondissements de cette 3e saison, rappellent parfois les scénarios des bonnes vieilles BD franco-belges, mais ici tout est vrai.
Enquête sur Dieu : les indices pensables : saison 3. Volume 10, La réponse (mur)murée, de Brunor, Brunor éditions, mars 2019.