Après plus de trente années de mariage heureux, la vie de Sophie et Godefroy vole en éclats : Sophie est atteinte d’un cancer. Cette épreuve les révélera pourtant l’un à l’autre, leur permettant de toucher du doigt une autre forme de bonheur. Ce témoignage à trois voix montre l’itinéraire d’un couple qui, au-delà de la tempête, vit une véritable conversion du cœur. “La maladie nous a beaucoup rapprochés, avec Godefroy. Ou plutôt, elle nous a mis ensemble, côte à côte vers Dieu, et non pas seuls face à face”. Reste avec nous est la parole forte d’un couple qui a rencontré la maladie et du prêtre qui l’a accompagné dans cette étape de la vie. Sophie est décédée le 22 août 2018 mais elle a accepté d’écrire son témoignage au cours de sa maladie. Sa voix s’enrichit de celles de Godefroy, son époux, ainsi que de celle du père Paul Habsburg.
Février 2013. Sophie et Godefroy sont mariés depuis plus de trente ans. Parents de quatre enfants, ils goûtent à un bonheur sans nuage majeur. “Dans le bonheur, ce que nous croyions être le bonheur, ça marchait plutôt bien”, écrit Sophie. La maladie fait pourtant irruption dans leur vie à la façon d’une tornade violente et inattendue. Dotée d’une santé de fer, elle découvre qu’elle est atteinte d’un cancer des ovaires. “Biopsie, traitement, protocole, chimio, radiothérapie, marqueurs… autant de mots qui ne m’évoquaient rien. Je ne m’étais jamais penchée sur ce monde, sur “ces malades”, sur la maladie en général”, explique-t-elle. Cette épreuve non choisie bouleverse complètement le cours de leur existence et les révèle au fil des jours l’un à l’autre. “Un couple a une vocation, celle de rendre Dieu présent dans le monde”, écrit Sophie. La maladie leur permet justement de prendre conscience de cette vocation qu’ils ne connaissaient pas vraiment.
À la découverte d’une “autre dimension”
Ce chemin de foi et de confiance n’est pas sans heurts et sans résistances… signe de leur humanité. Assommés par la nouvelle, les deux époux choisissent au début de la garder secrète “pour ne pas faire de peine, pour ne pas inquiéter”. Peut-être même par orgueil, précise quant à elle Sophie. L’acceptation n’est pas toujours évidente. “Il y a eu des choses que je n’ai pas acceptées tout de suite complètement. […] Moi je ne voulais pas accepter pour Sophie. Dieu n’est pas là pour faire souffrir les gens”, reconnaît Godefroy. Il découvre ses limite, la difficulté de ne pas pouvoir prendre la place de l’autre, l’impuissance face à la souffrance. “La réalité, c’est que je ne souffre pas, c’est Sophie qui souffre, qui est angoissée. Je suis avec Sophie, à côté de Sophie, et même si je partage beaucoup de sa maladie, je ne suis pas malade”, note-t-il.
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À partir du moment où les deux époux se reconnaissent fragiles et vulnérables, leur vie prend une nouvelle direction. “Nos cœurs ont viré de cap ensemble”, écrit Sophie. Ils découvrent de façon authentique la beauté et la puissance de la fraternité. “Chacun s’est approché de nous et nous a portés. Autour de nous s’est formée une chaîne de réconfort, de soutien, d’entraide et d’amitié. Nous avons découvert combien nous avions besoin des autres, bien plus que nous ne pouvions l’imaginer”. En un mot, ils découvrent l’essentiel, ainsi que le résume Godefroy dans son mot d’accueil au début de la messe pour Sophie à Notre-Dame d’Auteuil, le 25 août 2018. Parlant de sa femme, il lance : “Ce cancer l’a projetée dans une autre dimension, dans ce que je viens d’appeler une aventure, spirituelle autant qu’humaine, qui l’a complètement portée et aussi transformée, parce qu’elle lui a permis de découvrir et de développer sa vocation première, celle d’aimer et d’être aimée”.
Reste avec nous, par Sophie et Godefroy de Bentzmann et Paul Habsburg, Mame, mars 2019, 15,90 €.