Après la modération, la bienveillance, le bonheur et l’abandon, voici la résolution de la lecture que propose le Décalogue de la sérénité du saint pape Jean XXIII.
Quatrième résolution, lire : « Rien qu'aujourd'hui, je consacrerai dix minutes à la bonne lecture en me souvenant que comme la nourriture est nécessaire au corps, la bonne lecture est nécessaire à la vie de l'âme. »
Est-il besoin de commenter cette résolution du saint pape Jean XXIII ? Jésus dans le désert répondait au tentateur « Il est écrit : L’homme ne vit pas seulement de pain, mais de toute parole qui sort de la bouche de Dieu. » (Mt 4, 4).
Pour se distraire et pour s’instruire
Qu’est-ce qu’une bonne lecture ? J’avoue, lire un roman policier peut être un grand plaisir : suspens haletant, cheminement intellectuel tortueux pour parvenir à établir une vérité bien cachée, lutte entre l’intuition et la raison objective, tout cela saupoudré d’un peu d’action qui procurera une dose d’adrénaline venant corser la recette. Quand ils sont très bons, le sommeil ne vient qu’après la dernière page. De même, certaines bandes dessinées allient une histoire quelquefois singulière et des illustrations qui peuvent véhiculer une grande émotion. Il y a aussi des textes de littérature — roman, poésie, théâtre — qui sont de pures merveilles. Ils procurent des rencontres qui nous enrichissent, même si les personnages sont parfois fictifs et improbables comme un frère Guillaume de Baskerville ou un Abel Tiffauges. Et si l’Andromaque de Racine ou l’Hadrien de Yourcenar ne sont pas des copies conformes des personnages historiques, nous les aimons malgré tout aussi à travers ces lignes que nous lisons. Rien n’interdit à un livre de ce type d’être un bon livre, de distraire notre esprit, de le soustraire à la laideur quotidienne pour le confronter, parfois, à la beauté.
Il y a aussi les livres pour instruire. Quand ils traitent de sujets à conjectures comme par exemple la politique, ils peuvent emporter l’adhésion ou rebuter, ils peuvent tenter d’établir sincèrement un pan de vérité ou colporter des erreurs ou même tromper intentionnellement. L’important est qu’ils transmettent un savoir objectif et fassent réfléchir. Cela ne fonctionne pas toujours...
Pour se nourrir l’esprit, avec discernement
Et il y a bien sûr les livres qui traitent de l’esprit. Nos textes sacrés, d’abord : les Évangiles, le Nouveau et l’Ancien Testament. Il y a aussi les textes sacrés des autres religions et encore les mythes. Et puis il y a tous ceux qui glosent et traitent de la spiritualité, qui choisissent un angle et analysent les sujets, les approfondissent pour aider un lecteur dans son propre cheminement, sa compréhension du monde.
Ne nous leurrons pas : il y a aussi de moins bonnes lectures dans les livres à vocation spirituelle. Et le problème, c’est que l’on peut se fourvoyer de bonne foi, penser que ce livre serait bon, et gâcher à le lire les dix précieuses minutes qui sont parfois si difficiles à trouver. Peut-être faut-il considérer que ces dix minutes de bonne lecture sont une obligation de moyen et pas de résultat. Mais en réaction à un éventuel gâchis, il y a toujours moyen de lire et méditer un chapitre d’un des Évangiles. C’est une valeur sûre.
Pour la méditation
Lire pour méditer. Lire pour mieux nous convaincre de l’improbable bonne nouvelle, l’amour inconditionnel de notre Dieu envers chacun de nous. Lire pour apprendre ce que nous ignorons. Lire pour tenter de mieux comprendre ce que nous appelons les mystères, même si nous savons parfaitement que cela n’est pas entièrement possible. Lire pour trouver des exemples sur qui nous modeler et ainsi faire plaisir à notre Dieu. Lire pour réfléchir au monde et à ce que nous pouvons et nous devons lui apporter, pour qu’il se porte mieux, ou moins mal. Les catholiques ont la chance immense de confesser une foi qui encourage le travail de la raison, profitons-en !
Évidemment, il y a ceux qui trichent, ceux que leur règle oblige à consacrer chaque jour du temps, et plus de dix minutes, à la lecture. Je les envie parfois, et pourtant je sais bien que ce temps dont je prétends souvent ne pas disposer, il est parfois gaspillé en occupations bien plus futiles que de me nourrir de la parole de Dieu. Alors, oui, il faut s’efforcer de prendre un livre qui élève l’âme.
Merci mon Dieu d’avoir mis en nous assez de raison et assez d’envie pour chercher ta Vérité.