Ce 13 mars, François clôture la sixième année de son pontificat. Elle restera sûrement comme l’annus horribilis du 266e chef de l’Église catholique, pris dans la tourmente des abus sexuels et de leur gestion. Le synode des jeunes, la publication de l’exhortation Gaudete et exsultate, les JMJ de Panama et les succès diplomatiques sont presque passés inaperçus face à cette tourmente des abus.
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La sixième année du pontificat du premier pape latino de l’histoire restera sûrement comme celle où sa popularité aura été mise au défi des scandales d’abus sexuels et de leur gestion. Ceux-ci ont culminé en août dernier avec la publication de la virulente lettre de témoignage de Mgr Carlo Maria Viganò, ancien nonce aux Etats-Unis. Il venait directement accuser le souverain pontife et de nombreux cardinaux d’avoir fermé les yeux sur les abus commis par l’ancien cardinal McCarrick. Une accusation grave et argumentée, publiée seulement quelques jours après la “lettre au peuple de Dieu” du pape François pour inviter à une action “globale et communautaire” pour lutter contre les abus sexuels.
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Jamais vraiment démenties par le Vatican, ces accusations venaient s’ajouter à d’autres scandales, notamment aux États-Unis, en Australie et au Chili. Le pape François n’avait-il d’ailleurs pas convoqué à Rome en mai dernier tous les évêques de ce dernier pays pour une discussion franche sur le sujet ? La rencontre à huis clos s’était alors conclue sur la démission de tous les prélats chiliens. Sur la trentaine, le chef de l’Église catholique en a accepté sept. Par ailleurs, quelques mois plus tard deux prélats originaires de ce pays ont été renvoyés de l’état clérical, condamnés pour avoir agressé des mineurs.
Toujours en dehors de Rome, le cardinal Daniel Wuerl a démissionné en octobre de sa charge d’archevêque de Washington, la capitale américaine. Le prélat était mis en cause pour sa gestion passée de cas d’abus sexuels et pour son silence – qu’il dément – sur son prédécesseur l’ancien cardinal McCarrick. En France, le cardinal Philippe Barbarin, archevêque de Lyon et à ce titre “primat des Gaules”, a annoncé le 7 mars qu’il allait prochainement rencontrer le pape pour lui remettre sa démission. Quelques heures plus tôt, il était condamné à six mois de prison avec sursis pour ne pas avoir porté devant la justice les accusations d’abus à l’encontre d’un prêtre, le père Preynat.
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Un sommet sur la protection des mineurs en demi-teinte
Toujours en France, les médias ont révélé en janvier que le nonce apostolique, Mgr Luigi Ventura, faisait l’objet d’une enquête pour agression sexuelle. Le gouvernement français — qui ne dispose toujours pas d’ambassadeur près le Saint-Siège — a demandé au Vatican de “prendre ses responsabilités” sur l’épineuse question de l’immunité diplomatique dont jouit le représentant du Pape en poste à Paris depuis 2009.
Ces turbulences se sont propagées jusqu’au Conseil des cardinaux, ce conseil restreint imaginé par le pape François et annoncé seulement un mois après son élection. Les cardinaux George Pell, alors préfet du Secrétariat pour l’économie, Francisco Javier Errázuriz, archevêque émérite de Santiago (Chili), et Laurent Monsengwo Pasinya, en ont ainsi été “remerciés” fin décembre. Parmi ces trois prélats, les deux premiers font l’objet de poursuites dans des cas d’abus sexuels, l’un accusé d’en avoir lui-même commis, l’autre d’en avoir caché.
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Pour répondre à ces scandales et au risque de “perte de crédibilité” de l’Église dans l’annonce de l’Évangile, le souverain pontife a convoqué à Rome tous les présidents de conférences épiscopales, du 21 au 24 février. Organisée avec rigueur et finesse, cette rencontre a permis aux évêques du monde entier de comprendre l’urgence de la protection des mineurs. Toutefois, le bilan semble être en demi-teinte, puisqu’aucune véritable mesure concrète n’a été annoncée à l’issue de cette rencontre. Si le pape avait affirmé en l’ouvrant attendre des mesures “concrètes et efficaces”, il avait néanmoins mis en garde auparavant contre une “attente surdimensionnée”.
Changements au Vatican
De même, la communication du Vatican a elle aussi connu des changements importants. Mgr Dario Edoardo Viganò a dû démissionner en mars 2018 du poste de préfet du Dicastère pour la communication, après la publication truquée d’une lettre de Benoît XVI. Celle-ci devait justement venir accompagner une collection d’ouvrages publiée pour le 5e anniversaire du pontificat. Quelques mois plus tard, le 31 décembre, les deux directeurs du Bureau de presse annonçaient leur démission surprise. Quant au directeur de L’Osservatore Romano, Giovanni Maria Vian, il était remercié quelques jours avant Noël.
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Par ailleurs, d’autres dicastères clôturent cette sixième année sans responsable à leur tête. Ainsi le successeur du cardinal français Jean-Louis Tauran, décédé en juillet alors qu’il était président du Conseil pontifical pour le dialogue interreligieux, n’a toujours pas été désigné. Quant au Secrétariat pour l’économie, il est privé de numéro 1 et de numéro 2. Le premier, le cardinal Pell n’a pas été reconduit après l’annonce d’un verdict le reconnaissant coupable d’agressions sexuelles sur mineurs. Le second, Mgr Alfred Xuereb, a été nommé nonce en Corée il y a plus d’un an.
Une année marquée par les jeunes
Au-delà de ces scandales et de ces changements, la sixième année du pontificat a également été marquée par la publication de la troisième exhortation apostolique du souverain pontife, Gaudete et exsultate “sur l’appel à la sainteté dans le monde actuel”. Court et enthousiaste, ce texte a reçu un très bon accueil parmi les fidèles, même s’il reste toutefois moins connu que les deux précédentes exhortations, Amoris laetitia et Evangelii gaudium.
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De plus, le pape François a présidé en octobre 2018 le troisième synode de son pontificat, centré sur “les jeunes, la foi et le discernement vocationnel”. Tenue dans un esprit bien plus apaisé que les deux synodes sur la famille (2014 et 2015), cette rencontre a été vécue comme une “nouvelle Pentecôte” pour de nombreux participants. Le document final proposait notamment une conversion du rapport aux structures ecclésiales, pour une communauté au “style synodal”. Suite à ce synode, une exhortation apostolique devrait paraître le 25 mars prochain.
En janvier, le chef de l’Église catholique a retrouvé les jeunes au Panama, pour les Journées mondiales de la jeunesse (JMJ). Si ce rassemblement n’a pas été l’édition rassemblant le plus de pèlerins, elle aura été l’occasion pour l’évêque de Rome de mettre les ‘périphéries’ au cœur du monde catholique. Après avoir invité les jeunes “à se réveiller” lors des JMJ de Cracovie en 2016, ces rencontres ont permis au pontife de leur indiquer la direction à prendre : la mission et le souci des plus faibles, “pas demain, mais maintenant”.
Des succès diplomatiques
Dans un tout autre domaine, l’année écoulée aura également été marquée par une importante réalisation diplomatique : la signature d’un accord “provisoire” entre le Saint-Siège et la Chine continentale sur la nomination des évêques. Si celui-ci doit encore montrer ses fruits, il s’agit d’une avancée dans un pays où les persécutions contre les chrétiens sont fréquentes. Pour favoriser l’unité, le souverain pontife a également levé l’excommunication pesant sur les évêques ordonnés sur décision de Pékin et sans mandat pontifical.
Autre succès diplomatique : le voyage du 3 au 5 février aux Émirats arabes unis. Pour la première fois de l’histoire, un chef de l’Église catholique posait le pied sur le sol de la péninsule arabique. Au cours de ce voyage, le pontife a signé un document “pour la paix mondiale et la coexistence commune” avec le grand imam de la mosquée université Al-Azhar, considéré comme la plus haute autorité de l’islam sunnite. Ce texte est de la “plus haute importance”, considérait alors Alessandro Gisotti, directeur ad interim du Bureau de presse. Ce chemin interreligieux devrait se poursuivre au cours de la 7e année de pontificat, dès les 30 et 31 mars avec le voyage au Maroc.
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