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Marie s’avance, portant l’Enfant Jésus dans ses bras. Le prêtre Syméon les accueille. Carpaccio nous invite ici à contempler la scène de la présentation de Jésus au temple, telle que saint Luc nous la rapporte dans son Évangile, "quand fut accompli le temps prescrit par la loi de Moïse pour la purification". Cette Présentation au temple, qui date de 1510, était destinée à une église vénitienne. Actuellement exposé à la Galerie de l'Académie de Venise, le chef d’œuvre vaut d’être découvert comme une véritable catéchèse, en prenant son temps.
Deux suivantes accompagnent la Vierge et portent les tourterelles prévues par la loi. Deux hommes se tiennent derrière le prêtre, tenant son vêtement. Les regards sont graves, tout en intériorité et méditation, car il est vrai que le vieillard annonce à Marie : "Toi-même, ton âme sera transpercée d’un glaive." Seul Jésus, le regard tourné vers Syméon, esquisse un sourire, comme ignorant la portée des paroles qui viennent d’être prononcées. L’enfant est montré nu, dans son humanité charnelle. Les visages forment un ruban qui occupe toute la largeur du tableau. Trois anges musiciens, en contrebas de la scène principale, viennent compléter la composition. Le peintre les représente sans ailes, moyen pourtant fréquent dans l’iconographie de les identifier. Leur attitude est tout à fait détendue et tranche avec la solennité de l’ensemble. Ils accompagnent l’événement de leurs instruments, cromorne, luth et viole de bras, utilisés à la Renaissance. La musique adoucit la gravité du moment.
Les étoffes s’animent d’élégants drapés, jusque dans la nappe d’autel qui garde la marque de ses pliures. Les couleurs lumineuses et profondes, rouges, bleus, verts orangés et roses se juxtaposent harmonieusement. Les vêtements, robes et manteaux, restent simples. Seule la chape de Syméon est particulièrement précieuse, brodée de motifs floraux sur fond or, à la bordure ornée de scènes bibliques.
Ce tableau devait être placé au-dessus d’un autel. On retrouve, en arrière-plan de la composition, une coupole qui rappelle le caractère sacré du temple de Jérusalem dans lequel se passe la scène décrite. L’architecture peinte reprend celle de la chapelle à laquelle le tableau était destinée, dans l’église Saint-Giobbe à Venise. La lumière arrive, rasante, de la droite du tableau, éclairant les visages des femmes, créant un jeu d’ombre avec ceux des hommes. Elle met aussi en valeur la mosaïque de la coupole, aux végétaux stylisés sur fond d’or, et le lustre de bronze et de verre.