Rahab compte parmi les personnages de la Bible dont les mœurs sont réprouvées par la morale de l’époque. À la périphérie de la société, c’est pourtant par elle que la volonté divine s’accomplira en permettant la chute de Jéricho et la prise de la ville par Josué.
Jéricho, passage obligé
Jéricho dont le nom signifie “Lune” est un lieu stratégique sur la rive ouest du Jourdain à une vingtaine de kilomètres de Jérusalem. Première ville du pays de Canaan, cette Terre promise est convoitée par les fils d’Israël menés par Josué selon la promesse divine. Or, ce promontoire qui surveille le passage vers le reste du pays est aussi célèbre pour ses puissantes fortifications. Josué et ses hommes qui viennent de franchir le Jourdain se doivent donc d’abattre cette cité pour entreprendre le reste de leur conquête. Aux fins de trouver une faille dans l’impressionnant dispositif de défense de l’une des plus puissantes villes de l’époque, Josué envoie deux espions qui sont accueillis au sein même de la cité par une femme de Jéricho : Rahab.
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Rahab, la prostituée
La Bible rapporte qu’à peine arrivés, les émissaires de Josué trouvent, en effet, refuge chez Rahab, dont le nom zan peut être traduit par large, généreuse, nourricière, aubergiste, mais aussi prostituée. Si l’historien antique Flavius Josèphe évoque sa qualité de tenancière d’auberge, l’histoire retiendra une image moins honorable en la décrivant comme une prostituée notoire, peut-être pour un effet de contraste plus saisissant encore avec la suite de son comportement. Une condamnation morale maintes fois répétée dans la Bible qui trouve là également une occasion de stigmatiser les prostitutions sacrées qui étaient alors pratiquées dans les temples de Canaan.
Un comportement valeureux
Informé par ses propres espions, le roi de Jéricho intime à Rahab de lui livrer ces espions. Mais, par un courage exemplaire, cette dernière les ayant cachés sur la terrasse de sa maison dans des tiges de lin, prétend qu’elle les a accueillis sans savoir qui ils étaient, et qu’ils sont déjà repartis à la nuit. Une fois le danger éloigné, Rahab prête encore secours aux deux émissaires en leur donnant une corde de fil écarlate pour qu’ils puissent descendre par sa fenêtre donnant sur le rempart. La femme de Jéricho ne demande qu’une seule chose : qu’elle-même et ses parents aient la vie sauve lors de la prise de la ville, car elle sait qu’elle risque la mort non seulement pour avoir abrité des espions, mais aussi pour son mensonge. Les deux hommes lui promettent par serment de les sauver et lui demandent d’attacher la même corde à la fenêtre pour qu’elle et les siens soient épargnés lors de l’assaut.
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Rahab sauvée par ses œuvres
Josué tint parole et lorsque les fameux cors des Israélites eurent abattu les enceintes fortifiées de Jéricho, Rahab et toute sa famille furent sauvés, la Bible rapporte qu’elle habitat à partir de ce jour au milieu d’Israël car elle avait été l’auteur d’une véritable profession de foi avec un mémorable aveu de la toute puissance de Dieu : « Le Seigneur, Votre Dieu, est Dieu là-haut dans les cieux et ici-bas sur la terre ». Cette piété dans le Dieu d’Israël lui vaudra ainsi non seulement d’avoir la vie sauve lors de la prise de la ville, mais également sa conversion. Les écrits rabbiniques la présentent également comme l’épouse de Josué, la mère de Booz et par là-même l’aïeule de David, symbole qu’une païenne pouvait atteindre le Salut. Rahab est donnée comme ayant le don de prophétie et figure même dans la généalogie de Jésus, ce qui fera dire à Jean Calvin : « Elle est la vision des choses invisibles […] quelque petite et fragile que fût la connaissance de Dieu de cette femme, malgré tout, quand elle se soumit à l’autorité de Dieu, elle produisit l’attestation de son élection ».