Voici quatre conseils extraits des “Exercices spirituels” de saint Ignace de Loyola pour vous aider à mieux comprendre certains sentiments.
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Dans ses Exercices spirituels, saint Ignace de Loyola décrit les sentiments humains avec tant de précision et de finesse qu’ils restent toujours d’actualité, près de 500 ans après avoir été rédigés. On peut considérer que le fondateur de l’ordre des Jésuites était un fin psychologue bien avant que la psychologie ne soit un sujet d’études, et plus de deux siècles avant que le terme même de psychologie ne soit inventé. Les Exercices spirituels recensent un certain nombre de conseils concrets sur la gestion des sentiments — positifs ou négatifs — qui peuvent être résumés en quatre points : l’identification des sentiments, l’acceptation, la compréhension et l’action.
L’identification des sentiments
Saint Ignace a tendance à décrire les sentiments de manière visuelle et concrète : 󠅐”J’appelle consolation toute augmentation d’espérance, de foi et de charité, et toute joie intérieure qui appelle et attire l’âme aux choses célestes et au soin de son salut, la tranquillisant et la pacifiant dans son Créateur et Seigneur. J’appelle désolation les ténèbres et le trouble de l’âme, l’inclination aux choses basses et terrestres, les diverses agitations et tentations…”.
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Identifier les différents sentiments qui nous habitent n’est pas toujours chose aisée. De nos jours, on entend souvent dire qu’il faut “se connecter à ses sentiments intérieurs”. Mais nous n’y arrivons pas toujours. Cela peut venir de notre éducation : un enfant auquel on dit de ne pas attacher trop d’importance à ses désirs et à ses sentiments prendra pour habitude d’enfouir ses sentiments au plus profond de lui-même, et aura, une fois adulte, souvent du mal à les exprimer. Il est aussi fréquent que l’on refoule nos sentiments après un choc ou un traumatisme.
De manière générale, il nous arrive à tous d’être “dans le déni”, d’être aveugle à certains de nos sentiments. Souvent, c’est parce que l’on se focalise trop sur ce que l’on devrait ressentir plutôt que sur ce que l’on ressent réellement. Il se peut aussi que l’on s’intéresse plus aux sentiments des autres qu’aux siens que l’on préfère ignorer ou mettre de côté.
Quand un sentiment nous traverse, évitons donc de l’étouffer. Au contraire, essayons de l’identifier, cherchons à savoir s’il tend plutôt vers la consolation ou vers la désolation.
L’acceptation
Dans l’absolu, les sentiments ne sont ni bons ni mauvais. Même la colère ou la jalousie ne sont pas en soi de mauvaises choses. Ce sont plutôt des informations qu’il nous appartient d’analyser. Le choix nous revient ensuite de prendre de bonnes ou de mauvaises décisions.
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Saint Ignace avait parfaitement conscience de cela. Dans ses Exercices spirituels, il ne fustige ni ne condamne les émotions négatives. A contrario, il n’encense pas outre mesure les “consolations”. Par exemple, il fait ce constat objectif que pour une personne entamant un cheminement spirituel, la voie de la vertu semble simple et joyeuse, alors que plus elle entre en intimité avec Dieu, plus elle est gagnée par la tristesse et le découragement. Mais il ne dit pas que l’une de ces phases est meilleure que l’autre : toutes deux s’inscrivent dans un processus naturel.
La compréhension
Saint Ignace a entamé sa conversion lorsqu’il a pris conscience, à la lecture de récits de chevalerie et de guerre, qu’il ressentait en premier lieu de la joie et de l’excitation, mais que très vite celles-ci laissaient place à de la tristesse et de la déception. À l’inverse, quand il lisait des vies de saints, il constatait que l’opposé se produisait. Ce sont cette analyse et cette compréhension des sentiments qui le traversaient qui l’ont amené à sa conversion.
Les sentiments sont des réalités complexes. Prenons l’exemple d’une personne alcoolique qui, dans la plupart des cas, se voit comme quelqu’un d’éminemment solitaire, alors qu’en réalité, sa volonté de rester seule chez elle tient au fait qu’elle veuille boire sans être jugée et sans en être empêchée. Elle n’est donc pas nécessairement quelqu’un de solitaire en soi. Les choses sont souvent bien plus complexes qu’elles n’en ont l’air. Certains ressentis méritent qu’on les approfondisse.
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Saint Ignace parle beaucoup du sentiment d’anxiété, de ce qu’il appelle “la désolation”. Là encore, il s’exprime de manière très concrète. Ainsi, il conseille par exemple de ne prendre aucune décision importante quand nous sommes perturbés et anxieux, car ces états ne permettent pas d’avoir les idées claires. Ce n’est qu’une fois notre calme retrouvé que nous pouvons prendre des décisions objectives qui ne seront pas dictées par notre angoisse.
L’action
Certes, nos sentiments sont importants, mais ils restent des sentiments. Ils sont des sources d’information à prendre en compte, mais ils sont aussi par nature passagers, changeants, tributaires de notre condition physique… si bien que nous ne devons pas nous y fier aveuglément. La capacité à pouvoir distinguer les sentiments constructifs des moins bons s’acquiert au gré d’une certaine maturité. Une émotion qui nous aidera à atteindre un objectif, en accord avec nos principes, sera bénéfique et nous aidera à avancer. À l’inverse, nous sentons parfois que des émotions nous orientent dans une direction qui n’est pas bonne. Il convient alors de combattre ces sentiments négatifs, ou du moins d’attendre qu’ils s’estompent. Il peut aussi être intéressant de chercher à comprendre d’où viennent certaines réactions négatives (égoïsme, peur, etc.). Elles sont parfois le signe de problèmes plus profonds qui méritent d’être creusés, pour aboutir à une meilleure connaissance de soi souvent synonyme de mieux-être.
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Saint Ignace attire notre attention sur le caractère inconstant des sentiments humains, et nous apprend à nous remémorer nos moments de bonheur quand nous sommes dans la souffrance. À l’inverse, il nous enjoint de ne pas oublier, quand nous nous sentons bien, que des moments de désolation vont revenir. Le premier conseil peut sembler évident : dans les moments difficiles, on essaie toujours de se dire que “tout passe”, qu’”après la pluie vient le beau temps”, que toute situation négative nous fait grandir… Le deuxième conseil peut sembler plus difficile à entendre. Il est pourtant d’une profonde sagesse. Garder une forme de réalisme quand tout va bien permet d’être mieux préparé quand les moments difficiles surviennent, et ainsi d’être mieux armé pour les affronter… afin de laisser à nouveau place à la consolation.