À 25 ans, Romain Brifault est un artiste épanoui qui a créé sa propre maison de couture. Autiste Asperger, son itinéraire n’est pas classique. Aleteia l’a rencontré.
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« Ma singularité, c’est un petit truc en moins qui me donne un petit truc en plus : la créativité ». C’est ainsi que se décrit Romain Brifault, jeune autiste de 25 ans devenu styliste. Autiste, styliste, des mots qui riment chez lui de façon singulière. Il est en effet atteint du syndrome d’Asperger, une forme d’autisme sans déficience intellectuelle ni retard de langage qui induit des difficultés dans la socialisation et les relations avec les autres. Dans Ma différence est ma force, il raconte son histoire. Aleteia l’a rencontré.
Un objectif : « arriver à vivre avec les autres »
Sa réussite, Romain la doit d’abord à son talent, mais aussi au soutien inconditionnel de sa famille. Car quand le jeune homme parle de ses parents et de ses trois frères, on sent bien que chez eux, c’est à la vie, à la mort. « Ils ont toujours tout fait pour m’accompagner », lance-t-il en évoquant les siens qui, insiste-t-il, ne l’ont jamais « laissé tomber ». « Dans la famille, nous nous sommes toujours dit la vérité sans langue de bois. La fratrie, chez nous, ce n’est pas rien : nous avons des valeurs très profondes », souligne-t-il. Enfance et adolescence sont ponctués de hauts et de bas. Les apprentissages des codes sociaux sont laborieux et le jeune garçon peine à se faire une place et à créer des amitiés, ainsi qu’il le partage dans son livre. « Aller acheter du pain, par exemple. Nous, on doit tout apprendre. Dire bonjour. […] Passer à la caisse. […] Regarder dans les yeux ». Il décrit son parcours scolaire et professionnel comme un véritable parcours du combattant. « Dès l’enfance, mon objectif n’a jamais été d’être comme tout le monde, mais d’arriver à vivre avec les autres », ajoute ce garçon qui ne rentre pas dans les cases.
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Des rencontres marquantes
Depuis son plus jeune âge, Romain est passionné par la mode. Il aime regarder les tissus, découvrir leurs textures, créer, dessiner, imaginer… Quand il parle de son métier, il transmet la passion qui l’anime de manière palpable. « Mes connexions neuronales ne sont pas les mêmes que celles des personnes classiques », affirme-t-il avec simplicité. Une différence qui lui donne une grande sensibilité créative. « Ce n’est pas un problème mais véritablement une force. J’ai découvert que j’étais un vrai artiste à part entière ». Grâce à différentes personnes qui l’appuient et croient en lui – une psychologue, son accompagnatrice scolaire, une religieuse, des professeurs bienveillants, une styliste professionnelle –, le jeune garçon avance bon an mal an et intègre finalement le monde de la mode, qui correspond à ce qu’il a toujours aimé, battant à plate couture tous les préjugés qui lui avaient fait obstacle.
En 2013, Romain lance son activité avec son frère Alexandre et ouvre sa propre maison de couture. « Nous vivons en famille une aventure formidable », poursuit-il. Alors que son frère de 22 ans s’occupe de la gestion de l’entreprise, lui se concentre sur la partie création. Il collabore avec de grands noms de la couture, comme Saint James et cherche à donner du sens à son travail, ayant à cœur d’aider les plus fragiles, en particulier les personnes âgées ou handicapées.
« À l’école, on n’apprend pas à dire qu’on a besoin de tout le monde. J’ai vraiment des valeurs ancrées dont je me sers tous les jours. J’ai la chance de pouvoir allier mode et côté humain ». Cet artiste hors norme cherche à donner de l’humanité à ses créations. Il a ainsi créé toute une gamme de vêtements pour des personnes avec un handicap physique, comme une robe de mariée pour une femme en fauteuil roulant. « Je veux changer le regard des gens et, pour cela, il y a un certain nombre de marches à franchir », explique-t-il à Aleteia.
« Avec ma sensibilité, j’aspire à tout le contraire d’un “monde sans différence” qui sous-entendrait qu’il faut les cacher, ne pas en parler, pour ne pas les faire exister. Ma volonté est bien de proposer des vêtements qui correspondent à chaque personne, quelle que soit sa morphologie, voire son handicap éventuel », peut-on lire dans son livre. « J’ai une perception de la différence qui est tellement naturelle que tout cela se fait sans tension, avec respect. J’ai vécu la différence de l’intérieur. »