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Pour Paul Claudel, c’est la Vierge qui a “sauvé la France une fois de plus”

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Domitille Farret d'Astiès - publié le 09/11/18
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Dans le poème « La Vierge à Midi », l’écrivain Paul Claudel s’adresse à la Vierge Marie qui, selon lui, a sauvé la France pendant la Grande Guerre.

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C’est un soir de Noël 1886 que Paul Claudel est touché au cœur lors d’une rencontre fulgurante avec Dieu, se convertissant « en un instant ». Diplomate de métier, il ne vit pas la Grande Guerre sur le front mais là où ses fonctions le mènent, mettant ses compétences au service de la diffusion de l’information.

« Vous avez sauvé la France »

Avec « La Vierge à Midi », extrait du recueil Poëmes de guerre 1914-1916, le poète et futur académicien s’adresse à la Vierge Marie. « Je n’ai rien à offrir et rien à demander », s’écrie celui qui ne vient que pour contempler sa mère céleste. Car c’est elle qui, selon lui, a “sauvé la France une fois de plus”, intervenant “à l’heure où tout craquait”. Le cri de reconnaissance que le poète laisse monter sonne comme une hymne mariale, véritable ode à celle que l’on nomme également “l’Étoile du matin”.

Il est midi. Je vois l’église ouverte. Il faut entrer.
Mère de Jésus-Christ, je ne viens pas prier.

Je n’ai rien à offrir et rien à demander.
Je viens seulement, Mère, pour vous regarder.

Vous regarder, pleurer de bonheur, savoir cela
Que je suis votre fils et que vous êtes là.

Rien que pour un moment pendant que tout s’arrête.
Midi !
Être avec vous, Marie, en ce lieu où vous êtes.

Ne rien dire, regarder votre visage,
Laisser le cœur chanter dans son propre langage.

Ne rien dire, mais seulement chanter
Parce qu’on a le cœur trop plein,
Comme le merle qui suit son idée
En ces espèces de couplets soudains.

Parce que vous êtes belle, parce que vous êtes immaculée,
La femme dans la Grâce enfin restituée,

La créature dans son honneur premier
Et dans son épanouissement final,
Telle qu’elle est sortie de Dieu au matin
De sa splendeur originale.

Intacte ineffablement parce que vous êtes
La Mère de Jésus-Christ,
Qui est la vérité entre vos bras, et la seule espérance
Et le seul fruit.

Parce que vous êtes la femme,
L’Eden de l’ancienne tendresse oubliée,
Dont le regard trouve le cœur tout à coup et fait jaillir
Les larmes accumulées,

Parce que vous m’avez sauvé, parce que vous avez sauvé la France,
Parce qu’elle aussi, comme moi, pour vous fut cette chose à laquelle on pense,
Parce qu’à l’heure où tout craquait, c’est alors que vous êtes intervenue,
Parce que vous avez sauvé la France une fois de plus,

Parce qu’il est midi,
Parce que nous sommes en ce jour d’aujourd’hui,
Parce que vous êtes là pour toujours,
Simplement parce que vous êtes Marie,
Simplement parce que vous existez,

Mère de Jésus-Christ, soyez remerciée !

Paul Claudel (1868 † 1955), de l’Académie française.
« La Vierge à midi », Poëmes de Guerre 1914-1916. Édité par Nouvelle Revue Française, Paris, 1922



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