Un nouveau rapport de la Banque mondiale tire un bilan mitigé de l’extrême pauvreté dans le monde selon les régions.
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Selon un nouveau rapport de la Banque mondiale (BM) sur la pauvreté dans le monde, paru le 17 octobre dernier, une personne sur dix vit dans l’extrême pauvreté. Pauvreté et prospérité partagée 2018 : résoudre le puzzle de la pauvreté révèlent qu’en 2015, 10% de la population mondiale vivait en dessous du seuil de pauvreté extrême, c’est-à-dire avec un revenu inférieur à 1,90 $ par jour. Ce taux, souligne le président de l’Institut, Jim Yong Kim, dans un communiqué de presse, est le plus bas jamais enregistré dans l’histoire. En effet, en 25 ans (1990-2015), l’extrême pauvreté est passée de 36% à 10% au niveau mondial, malgré un léger ralentissement entre 2013-2015. Ralentissement qui pourrait s’accentuer entre 2015 et 2018, selon les prévisions de la Banque mondiale, avec un taux inférieur à 0,5% par an, qui fera tomber le taux d’extrême pauvreté à 8,6%.
En chiffres, 735,9 millions de personnes vivaient dans l’extrême pauvreté en 2015, contre 804,2 millions en 2013 (soit 11,2% de la population mondiale). Dans la période 2013-2015, le nombre de personnes vivant dans l’extrême pauvreté a baissé de 68 millions, soit l’équivalent de la population de pays comme la Thaïlande ou le Royaume-Uni.
Différences régionales
Même si de manière inégale, l’extrême pauvreté a diminué dans la quasi-totalité des régions du monde. La baisse la plus importante est enregistrée en Asie du Sud, qui comprend les géants démographiques que sont l’Inde (plus de 1,3 milliard d’habitants) et le Bangladesh (164,7 millions). Le nombre de personnes vivant avec moins de 1,9 dollar par jour, dans cette région, a baissé de 58,1 millions entre 2013 et 2015, passant de 274,5 millions (16,2%) à 216,4 millions (12,4%). Au cours de la même période, 25,9 millions de personnes se sont relevées de cet état d’extrême pauvreté dans la macro-région de l’Asie de l’Est et du Pacifique, passant de 73,1 millions (3,6%) à 47,2 millions (2,3%) de personnes. La diminution en Amérique latine et dans les Caraïbes a été plus modeste, avec 2,1 millions d’habitants fuyant l’extrême pauvreté, qui touchait encore 25,9 millions de personnes en 2015 (contre 28 millions en 2013).
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Paradoxalement, en Afrique subsaharienne, si le taux d’extrême pauvreté a baissé de 1,4% entre 2013 et 2015, passant de 42,5% à 41,1%, le nombre de personnes vivant dans des conditions d’extrême pauvreté a augmenté de 8,3 millions au cours de la période 2013-2015, passant de 405,1 millions de personnes à 413,3 millions en deux ans. La Banque Mondiale rappelle que sur les 27 pays du monde où les taux d’extrême pauvreté sont les plus élevés, 26 sont subsahariens. Une des explications est la croissance rapide – voire “effrénée”, souligne le Süddeutsche Zeitung – de la population sur le continent. La situation du Nigeria, qui compte aujourd’hui près de 191 millions d’habitants, est emblématique. Il est le pays le plus peuplé de tout le continent et le septième du monde. Selon les estimations des Nations Unies, d’ici 2050, la population nigériane dépassera celle des États-Unis et deviendra le troisième pays le plus peuplé de la planète, après la Chine et l’Inde.
Selon la Banque Mondiale, c’est justement le Nigeria, s’il ne l’est pas déjà, qui devrait compter le plus grand nombre d’habitants vivant dans des conditions d’extrême pauvreté. Place qui revenait à l’Inde jusqu’en 2015, ce pays représentant près du quart du nombre total des pauvres dans le monde.
Impact des conflits et des situations d’instabilité politique
Le rapport de la Banque mondiale met également en lumière l’impact des guerres ou des conflits et les situations d’instabilité politique. La situation au Moyen-Orient et en Afrique du Nord, en est une bonne illustration. Dans cette macro-région, le taux d’extrême pauvreté est passé de 2,6% en 2013 à 5% en 2015, subissant donc une augmentation de 2,4%, c’est-à-dire presque le double. En chiffres, cela signifie que le nombre de personnes avec un revenu inférieur à 1,90 $ par jour est passé de 9,5 millions à 18,6 millions dans la région, subissant donc une augmentation de 8,1 millions de personnes. Pour la Banque mondiale, ces résultats sont la preuve que les progrès réalisés par le passé “ne peuvent être tenus pour acquis”.
Cette forte augmentation, en net contraste avec d’autres régions, est imputable au conflit en Syrie, et à la guerre civile (ou disons plutôt guerre par procuration) au Yémen où les violences ont entrainé la « pire crise humanitaire jamais causée par l’homme dans le monde », selon le Bureau des affaires humanitaires des Nations Unies (OCHA). Cela vaut également pour l’Afrique subsaharienne qui comptait en 2015 plus de la moitié des personnes vivant dans l’extrême pauvreté (413 millions de personnes sur un total de 736 millions).
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Alors qu’en 2015, le taux de pauvreté dans 35 pays vivant dans des conditions dites « fragiles et conflictuelles » (SFC) était de 35,9%, subissant une hausse de 1,5% par rapport à 2011, la même année près d’un quart (23%) de tous les pauvres était concentré dans cette catégorie de pays. Selon la Banque mondiale, l’extrême pauvreté est de plus en plus associée à cet état de fragilité institutionnelle et aux conflits.
L’équivalent d’un café Starbucks
Autres disproportions relevées par la Banque mondiale, plus des trois quarts des pauvres du monde vivent dans les zones rurales ; et persiste un écart entre les hommes et les femmes. Au niveau mondial, on compte 104 femmes pour 100 hommes qui vivent dans des pauvres, mais de 109 femmes pour 100 hommes en Asie du Sud, où les enfants sont deux fois plus à risque de vivre dans une famille pauvre.
Le rapport de la Banque mondiale rappelle qu’en 2015, plus de 85% des pauvres étaient concentrés dans deux régions du monde : l’Afrique subsaharienne et l’Asie du Sud. Alors que dans 84 des 164 pays examinés, l’Afrique subsaharienne enregistrera toujours un taux de pauvreté à deux chiffres en 2030, si aucun changement majeur d’orientation n’est fait. Rappelons que dans cette région, 84,5 % de la population vit avec moins de 5,5 dollars par jour, autrement dit plus ou moins le prix d’un Venti Caffe Latte dans un Starbucks de New York, comme relève CBS News.
Près de la moitié (environ 46%) de la population mondiale vit en dessous de ce seuil, considéré comme le seuil de pauvreté dans les pays à revenu moyen et élevé, c’est-à-dire 3,4 milliards de personnes, selon un communiqué de la Banque mondiale. Un peu plus d’un quart (26,2%), soit 1,9 milliard de personnes, vivent avec moins de 3,2 dollars par jour, qui est le seuil de pauvreté dans les pays à revenu intermédiaire inférieur.
Au regard de tous ces résultats, il y a donc bien eu des progrès mais le chemin qui reste à parcourir pour atteindre les objectifs fixés par l’ONU, s’annonce encore ardu.