Le pape François ne cesse d’exhorter les chrétiens à vivre l’Évangile en se déplaçant jusqu’aux périphéries. La mission peut prendre différentes formes. Et aussi divers visages. Découvrez celui de sœur Nadège, missionnaire en Afrique subsaharienne durant plusieurs années.À 27 ans, sœur Nadège a déjà une sacrée expérience missionnaire. Originaire du Burkina Faso, elle fait partie de la Congrégation Notre-Dame des Apôtres, fondée en France en 1876, une communauté religieuse tout particulièrement tournée vers les femmes et les enfants. “Notre charisme”, explique-t-elle, “c’est d’aller vers les femmes et de les aider à s’épanouir”. Elle prononce ses vœux en 2009. La jeune sœur est rapidement envoyée à Djougou, au Bénin. Là-bas, elle rejoint les femmes dans les villages de brousse, dans des lieux très isolés qui ne sont parfois accessibles qu’en mobylette, et les accompagne dans divers domaines. Formation à “l’hygiène domestique” (notamment à la régulation des naissances au moyen de méthodes naturelles), aide dans la gestion de l’argent, le soin du ménage et des enfants…
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Évangélisée par les prostituées
L’intrépide missionnaire est ensuite envoyée à Abidjan (Côte d’Ivoire), dans le quartier de Biétry, plutôt aisé, mais où l’on trouve également une grande pauvreté. On lui confie alors un centre de formation en couture et alphabétisation pour femmes et jeunes filles. Parmi elles, beaucoup ne sont pas allées à l’école et certaines vivent de la prostitution. “Le centre était notre moyen pour approcher ces filles et essayer de voir comment nous pouvions les aider à s’en sortir. Beaucoup de prostituées venaient pour apprendre à lire et à écrire, ou bien pour perfectionner leur français. Nous pouvions échanger avec elles, comprendre pourquoi elles en étaient là. C’était toujours une question de pauvreté. Je les écoutais, je causais avec elles”. Pour mieux comprendre la réalité de ces femmes, la religieuse passe du temps incognito dans un salon de coiffure tenu par quelques-unes de ces femmes sans qu’elles puissent en vivre. Là, elle découvre peu à peu leur vie. Bientôt, les prostituées découvrent qu’il s’agit d’une “femme de Dieu”. Mais ce n’est pas un obstacle à la relation. “Peu à peu, une relation de confiance s’est établie”, témoigne-t-elle. “Je sentais vraiment qu’elles développaient une certaine forme de spiritualité. Ces femmes venaient à la catéchèse et à la messe. Elles priaient en se tenant au fond de l’église, offraient des bouquets de fleurs à la Vierge. De nombreuses personnes les jugeaient, mais moi j’étais très touchée. C’était des très jeunes filles. Certaines n’avaient que 16 ou 17 ans”.
“La mission, c’est le chemin”
Puis, l’infatigable sœur est envoyée au Togo pour étudier la philosophie, tout en secondant la responsable d’un internat pour jeunes filles. L’objectif de cette mission ? Être attentive à elles et les aider à grandir. “Ces différentes expériences m’ont formée à l’écoute”, souligne-t-elle. “De nature, je suis quelqu’un qui aime parler et qui n’a pas beaucoup de patience pour écouter. Cela m’a permis de comprendre certaines réalités. J’ai fait des expériences que je n’imaginais pas et qui m’ont profondément marquée”. Elle évoque la simplicité des personnes rencontrées et la puissance du partage chez les plus humbles. Elle raconte non sans émotion l’histoire de cette dame aux faibles moyens, venue vers elle avec deux tubercules d’igname (un légume assez précieux car il a une forte valeur nutritive). La sœur refuse par réflexe ce cadeau qui lui semble trop généreux. “Cette femme s’est mise à pleurer, poursuit-elle. Dès lors, je n’ai plus osé refuser le don du pauvre”. Elle formule ainsi ce cri du pauvre : “Je te donne ce que j’ai du fond de mon cœur. Si tu refuses mon don, c’est comme si tu me refusais moi-même. J’ai découvert des cultures qui m’ont permis de comprendre que la mienne n’était pas forcément la meilleure”, poursuit-elle. “Pour moi, il y a une dimension de mission dans le fait de recevoir ce que l’autre partage avec moi. La mission, c’est partager ce que j’ai reçu comme don et accueillir ce que l’autre m’offre en retour. Ce n’est pas quelque chose d’extraordinaire. La mission, c’est le chemin”. Aujourd’hui, sœur Nadège se forme en France. Mais demain, la mission l’attend. “Je suis prête à aller partout, là où la mission m’appelle”.
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