Une étude de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) dresse un panorama mondial édifiant des conséquences de la consommation d’alcool.
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L’alcool est nocif pour la santé, nocif au point de tuer. C’est ainsi que nous pourrions résumer le message lancé par le Global Status Report on Alcohol and Health 2018, diffusé le 21 septembre dernier par l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) [1]. En effet, “malgré certaines tendances mondiales positives (…), le nombre des maladies liées à l’alcool restent inacceptable”, relèvent les auteurs du document. Un document de 450 pages, annexes et tableaux compris, qui passe en revue les problèmes liés à la consommation d’alcool.
5,3% des décès dans le monde dus à l’alcool
Selon le rapport, environ trois millions de personnes sont mortes à cause de l’alcool en 2016. Cela représente 5,3% de la totalité des décès dans le monde, soit plus d’un décès sur 20. La consommation d’alcool est également à l’origine de 132,6 millions années de vie corrigées du facteur invalidité (AVCI en français, Disability Adjusted Life Years [DALY] en anglais) perdues. Il y a néanmoins un motif de satisfaction dans ce tableau plutôt sombre, à savoir une légère diminution du nombre de décès entre 2016 et 2012. Cette année là les 3,3 millions de décès dus à l’alcool représentait 5,6% du nombre total de décès dans le monde en une année.
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L’écart entre les hommes et les femmes est très net. Quand trois hommes meurent à cause de l’alcool, on ne dénombre qu’une seule femme. Concrètement, d’après les estimations de l’OMS, en 2016, l’alcool a causé environ 2,3 millions de décès et 106,5 millions d’AVCI chez les hommes. Chez les femmes, ces chiffres tombent à 700.000 décès et 26,1 millions d’AVCI. Selon les experts de l’agence des Nations Unies, 237 millions d’hommes et 46 millions de femmes souffrent par ailleurs de troubles liés à la consommation d’alcool. C’est en Europe et dans les Amériques que les prévalences sont les plus élevées : 14,8 % chez les hommes et 3,5 % chez les femmes en Europe. 11,5 % chez les hommes et 5,1 % chez les femmes dans les Amériques. D’après les estimations du Beijing 302 Hospital, où plus de 40.000 patients atteints de maladies hépatiques sont traités chaque année, le nombre de cas ayant des maladies liées à l’alcool a plus que doublé entre 2002 et 2013.
Des statistiques glaçantes
En 2016, parmi les décès attribuables à l’alcool, plus du quart (28,7%), sont dus à des accidents, 21,3% à des pathologies digestives, 19% à des maladies cardiovasculaires, 12,9% à des maladies infectieuses et 12,6% consécutifs à cancer. Par ailleurs, près de la moitié (49%) des AVCI (accidents vasculaires cérébraux ischémiques) attribuables à la consommation d’alcool étaient dues à des maladies non transmissibles et à des problèmes de santé mentale, et environ 40% à des traumatismes.
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Parmi les quelque 900.000 décès dus à l’alcool en 2016, environ 370.000 étaient dus à des accidents de la circulation, 150.000 à des accidents auto-infligés et environ 90.000 à des actes de violence interpersonnelle (comme une dispute). En ce qui concerne précisément les accidents de la circulation, 187.000 personnes autres que des conducteurs ont été tuées. Selon les données d’un centre hospitalier de traumatologie à Melbourne, en Australie, de 2009 à 2014, près du quart (24,7%) des piétons blessés dans des accidents de la route l’ont été à cause de l’alcool. En 2016, on attribue à la consommation d’alcool la responsabilité de 7,2% des cas de mortalité dite « prématurée » (ou précoce) chez les personnes de moins de 70 ans, et de plus d’un décès sur dix, soit 13,5%, chez les jeunes adultes de 20 à 29 ans.
2,3 milliards de consommateurs
L’OMS estime dans son rapport qu’aujourd’hui 2,3 milliards de personnes boivent de l’alcool. Alors que dans certaines régions du monde, le nombre des buveurs a diminué (par exemple en Europe) ou est resté stable depuis 2000, une augmentation a été constatée dans la région du Pacifique, passant de 51,5% en 2000 à 53,8% aujourd’hui. Le rapport indique également que la consommation totale d’alcool par habitant chez les personnes âgées de plus de 15 ans, est passée de 5,5 litres d’alcool pur en 2005 à 6,4 litres en 2010, pour ne plus bouger jusqu’en 2016.
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Malgré une baisse de 12,3 litres par habitant à 9,8 litres sur la période 2005-2016, les niveaux de consommation les plus élevés sont enregistrés dans la région européenne de l’OMS. Les Amériques et le Pacifique occidental occupent respectivement la deuxième et troisième place. Alors que la consommation moyenne mondiale d’alcool pur est de 32,8 grammes par jour, 44,8% de l’alcool enregistré — 25,5% de l’alcool consommé dans le monde ne l’est pas — est consommé sous forme de « spiritueux » ou de distillats. Viennent ensuite les bières (34,3%) et les vins (11,7%).
155 millions d’adolescents boivent
En ce qui concerne les jeunes générations, poursuit le rapport OMS, leurs habitudes de consommation reflètent celles des adultes. Au niveau mondial, plus d’un quart (26,5%) des 15-19 ans boivent, soit 155 millions d’adolescents. Le taux le plus élevé est constaté dans la région européenne (43,8%). Puis nous trouvons les Amériques et le Pacifique occidental en deuxième et troisième position : environ 38% pour les deux régions.
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Le phénomène de la dite “consommation épisodique excessive” (ou HED de l’anglais heavy episodic drinking) chez les jeunes de 15 à 19 ans se révèle inquiétante en Europe et dans les pays à revenus élevés comme l’Australie, le Canada et les États-Unis. Le phénomène s’observe également dans certains pays d’Amérique du Sud où le taux de consommation d’alcool par habitant est élevé, comme l’Argentine et le Chili. Le taux de HED chez les jeunes est de 24,1% (soit près d’un sur quatre) dans la région européenne de l’OMS et de 18,5% (près d’un sur cinq) dans les Amériques.
Des pistes pour agir
“Il est temps d’agir plus fermement pour contrer cette grave menace pour le développement de sociétés saines”, déclare le Directeur général de l’OMS, Tedros Adhanom Ghebreyesus, dans un communiqué de presse. “Beaucoup trop de personnes, ainsi que les membres de leur famille et de leur entourage subissent les conséquences de l’abus d’alcool, qui est à l’origine d’actes de violence, de traumatismes, de problèmes de santé mentale et de maladies telles que les cancers et les accidents vasculaires cérébraux”, ajoute-t-il.
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“Tous les pays pourraient contribuer davantage à réduire les coûts sanitaires et sociaux de l’abus d’alcool”, souligne à son tour le Dr Vladimir Poznyak, Coordonnateur de l’Unité Prise en charge de l’abus de substances psychoactives à l’OMS. Parmi les différentes mesures à prendre, celui-ci suggère une augmentation des taxes sur les boissons alcoolisées, des restrictions à la publicité en faveur de l’alcool ou son interdiction, et des restrictions à la disponibilité matérielle de boissons alcoolisées.