Le pape François a achevé son voyage apostolique en Lituanie, Lettonie et Estonie, après quatre jours de visites sur des lieux symboles des sombres années de leur histoire
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Après la visite historique de Jean-Paul II en 1993, au lendemain de leur sortie de la zone d’influence de la Russie, c’est le souvenir d’une visite pleine de symboles que le pape François a choisi de laisser aux trois pays Baltes – la Lituanie, la Lettonie et l’Estonie – 100 ans après la création de l’État estonien et de l’État letton, ainsi que la restauration de l’État lituanien. Le Saint-Père est arrivé porteur d’un message de “proximité”, revisitant les sombres années de leur histoire et les encourageant à s’engager dans le présent pour “récupérer la racine et garder toujours vivant en eux ce qu’il y a de plus authentique et de plus original” pour construire leur avenir, comme il a expliqué aux autorités et à la société civile lituanienne, à son arrivée à Vilnius, le 23 septembre.
Dans cette région, où une foi non plus de résistance mais tournée vers l’avenir, animent les chrétiens – majoritaires en Lituanie (à 79% catholiques), et en Lettonie ( à 70% luthériens) et très minoritaires dans la très laïque Estonie (à 10% protestants et orthodoxes) – le pape a appelé à revêtir “les armes du dialogue et de la compréhension, du respect et de la fraternité”.
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Travail de mémoire
A tous les chrétiens, au troisième jour de son voyage, le Pape a lancé un appel à s’engager ensemble pour faire résonner la foi “dans les différents secteurs de la société”. Il l’a fait lors d’une prière commune dans la cathédrale luthérienne de Riga, en Lettonie, où il a mis en garde luthériens, catholiques et orthodoxes, contre une foi devenue “un objet du passé, une attraction touristique et de musée qui rappelle les faits d’une époque, d’une haute valeur historique, mais qui a cessé de faire vibrer le cœur de ceux qui l’écoutent”. Lors d’une messe dans le petit sanctuaire d’Aglona (Est), abritant une Vierge noire, il a invité à mettre de côté “les rancœurs et les méfiances”, spécialement en cette heure de l’histoire où “semblent revenir des mentalités qui nous invitent à nous méfier des autres, qui, avec des statistiques, veulent nous démontrer que nous serions mieux, nous aurions plus de prospérité, il y aurait plus de sécurité, si nous étions seuls”.
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Garder la mémoire et l’assumer pour faire de cette région “un modèle de fécondité”, a insisté le pape François dans son premier discours en Estonie, à Tallinn, ce mardi 25 septembre, dernière étape de son voyage apostolique. A ce peuple “le moins croyant” des trois pays baltes – 75% de la population se déclare sans religion – mais où la communauté catholique connaît une certaine renaissance depuis la visite de Jean Paul II, le Saint-Père a une nouvelle fois fait allusion à “la capacité d’endurance” des peuples baltes face à l’adversité que l’Histoire leur a tant de fois opposé, et rappelé que même là où ils sont peu nombreux, les chrétiens sont “le témoignage que là où est le Christ, il y a toujours des opportunités de conversion”. Le pape a donc exhorté les catholiques à ne pas hésiter à sortir pour témoigner de l’amour du Christ, à sortir dans leurs quartiers pour dire à beaucoup de personnes “toi aussi tu fais partie de notre famille”.
Défendre les racines
“Ne cédez pas au découragement ni à la tristesse, ne perdez pas la douceur et, moins encore, l’espérance !”, a exhorté le Pape dans la cathédrale catholique Saint-Jacques de Riga (Lettonie), le lundi 24 septembre. Il s’adressait tout particulièrement aux vieilles générations qui ont traversé “toutes sortes d’horreur – la guerre, la répression, la persécution, l’exil – se sont dépensées corps et âme pour la liberté du pays” et semblent aujourd’hui oubliées dans la vie quotidienne, comme “un wagon de queue” au sein d’une société qui n’en a cure et les laisse souvent dans la misère. “Vous êtes les racines d’un peuple, les racines des jeunes bourgeons qui doivent fleurir et porter du fruit”, leur a-t-il dit, alors “défendez ces racines, gardez-les vivantes pour que les enfants et les jeunes s’y greffent et comprennent que tout ce qui, sur l’arbre, a fleuri, vit de ce qui se trouve sous terre”.
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Aux milliers de jeunes, à Vilnius, en Lituanie, le Saint-Père a recommandé de puiser à ces “racines”, à ces “joies” et ces “souffrances”, à ces “valeurs” dont seules les personnes âgées ont la clef et qui sont un rempart contre le repli, l’égoïsme ou la superficialité “devant la souffrance, devant les difficultés ou le succès passager”. Aux lettons, encore divisés entre citoyens de souche et une importante communauté russe, il a recommandé de “miser de nouveau sur le frère, sur la fraternité universelle” et “paix et harmonie” entre eux. “Que la Vierge vous protège et vous accompagne toujours”, leur a-t-il dit en offrant un rosaire à la Vierge du sanctuaire d’Aglona, fondé par les frères dominicains en 1700.
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Attention au “chant des sirènes”
A son arrivée en Lituanie, le pape François s’est insurgé contre “les voix qui sèment la division et l’affrontement” ou “qui proclament que l’unique manière possible de garantir la sécurité et la survie d’une culture réside dans l’effort pour éliminer, effacer ou expulser les autres”. Dans ce contexte, justement parce qu’ils ont “souffert dans (leur) chair les tentatives d’imposer un modèle unique qui annule ce qui est différent avec la prétention de croire que les privilèges de quelques-uns sont au-dessus de la dignité des autres ou du bien commun”, les lituaniens peuvent, selon lui, “devenir un pont qui unit l’orient et l’occident de l’Europe”. Et comme eux les lettons et les estoniens.
Alors attention à ne pas écouter “le chant des sirènes”, a recommandé le Saint-Père, à ce propos, à Kaunas, en Lituanie, lors de l’angélus. Le souverain pontife a exhorté avec insistance à ne pas “courir” derrière “une manière de penser, une idéologie, un discours dominant” qui pousse à “user de la violence ou de la répression pour faire plier ceux qui, simplement par leur agir quotidien honnête, simple, assidu et solidaire, manifestent qu’un autre monde, une autre société est possible”.
Pèlerinage de miséricorde
Dans ces pays qui n’ont pas oublier les décennies d’oppression et occupation soviétique après avoir souffert de la terreur nazie pendant la seconde guerre mondiale, c’est un véritable pèlerinage de miséricorde aux divers monuments aux morts que le pape a accompli. Comme à Riga, la capitale lettone, où il est allé se recueillir sur le Monument de la Liberté érigé en l’honneur des soldats morts au combat durant la guerre d’indépendance lettone (1918-1920) et où, sous l’occupation soviétique, entre 1944 et 1991, il était interdit d’y déposer des fleurs: un crime dont les auteurs étaient punis par la déportation en Sibérie.
En Lituanie, la veille, il s’est rendu au mémorial de la Shoah, et au Musée des Occupations et des combats de la liberté, avant d’aller déposer une gerbe de fleurs au pied du monument aux victimes des Occupations, et demander au Seigneur de ne pas permettre “que nous soyons sourds au cri de tous ceux qui, aujourd’hui, continuent d’élever leur voix jusqu’au ciel . Ces visites étaient le prolongement, la veille, de la vénération publique du tableau de Jésus miséricordieux avec les jeunes, sur le parvis de la cathédrale de Vilnius. Tableau peint sous la conduite de sainte Faustine Kowalska, à la demande du Seigneur : “Je donne aux hommes un vase, avec lequel ils doivent venir puiser la grâce à la source de la miséricorde. Ce vase, c’est ce tableau, avec l’inscription: ‘Jésus, j’ai confiance en Toi’”.
“Soyez des pères et des mères de miséricorde”, a recommandé le pape François au clergé et aux consacrés des trois Pays baltes, au deuxième jour de sa visite, en la cathédrale de Kaunas – ancienne capitale de la Lituanie.
Une liberté durement conquise à protéger
Et une dernière recommandation aux Estoniens, mais à travers eux, à tous les habitants des pays Baltes. “Vous n’avez pas conquis votre liberté pour finir esclaves du consumérisme, de l’individualisme ni de la soif du pouvoir ou de la domination”, a exhorté le pape François en conclusion de sa visite en Estonie, ce 25 septembre. Il a invité : “Faisons le choix aujourd’hui d’être des saints… Nous devons vaincre la peur et abandonner les espaces sécurisés”. Certains se considèrent libres lorsqu’ils vivent sans Dieu ou séparés de lui. Ils ne se rendent pas compte que, de cette manière, ils voyagent dans cette vie comme des orphelins, sans maison où revenir”, a-t-il déclaré à la messe Place de la Liberté, à Tallinn. “La sainteté n’est pas réservée à une élite”, a-t-il assuré, mais doit être un témoignage dans chacune des “occupations quotidiennes”.
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