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À Port-en-Bessin, on bénit la mer

Mgr Boulanger présidant la procession nautique sur le vaisseau amiral "Le Vilou".

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Foucauld Boutte - publié le 10/08/18
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Depuis 1908, tous les cinq ans, l’évêque de Bayeux-Lisieux vient bénir la mer à Port-en-Bessin. Si l’événement – qui se déroule ce 11 août – témoigne de la dévotion mariale des marins, il s’agit aussi d’une occasion privilégiée de lier foi populaire et tradition locale.

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Depuis 1908, tous les cinq ans, l’évêque de Bayeux-Lisieux vient bénir la mer à Port-en-Bessin. Si l’événement – qui se déroule ce 11 août – témoigne de la dévotion mariale des marins, il s’agit aussi d’une occasion privilégiée de lier foi populaire et tradition locale.

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Que ce soit par son immensité, sa beauté ou sa férocité, la mer a quelque chose de sacré. À Port-en-Bessin, dans le Calvados, on semble en être convaincu. En plein mois d’août, en cette fin de semaine, c’est l’effervescence. Rues, bateaux, maisons… Toute la commune a revêtu ses plus beaux habits de fête. Il faut dire que l’événement est d’importance puisqu’il s’agit de la grande bénédiction de la mer, qui a lieu tous les cinq ans aux alentours du 15 août dans le port depuis 1908.

Une tradition médiévale

“En réalité, en 1908, on n’a fait que remettre en valeur une tradition datant du Moyen Âge”, confie à Aleteia Mgr Boulanger, évêque de Bayeux-Lisieux, qui préside l’événement. “Les marins partaient souvent pour de longs mois, sans savoir s’ils allaient revenir. En les attendant, les femmes priaient beaucoup la Vierge Marie”, explique-t-il.

Le lieu de travail des marins est donc aussi un lieu de mort. “Dans la Bible, la mer est toujours symbole de mort”, analyse l’évêque. “Il y a toute une symbolique que nos contemporains ne peuvent pas comprendre. Par exemple, avant que Moïse n’écarte les eaux de la mer rouge, un fort vent d’est chasse la mer toute la nuit : c’est en fait l’Esprit saint qui chasse les ténèbres. Et dans l’Évangile, la mer est le lieu où habitent les forces du mal, et où vont se jeter les porcs dans lesquels Jésus a chassé les démons (Mc 5, 1-20, ndlr). Quand Jésus marche sur l’eau (Mt 14, 25, ndlr), en réalité, il écrase les forces des ténèbres. À notre baptême, nous sommes plongés dans l’eau, dans la mort, avant de ressusciter avec le Christ !”.


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Si le culte que les marins bretons vouent à sainte Anne est bien connu, la dévotion mariale des marins l’est beaucoup moins. “Depuis que saint Bernard de Clairvaux (1090-1153, ndlr) a appelé Marie stella maris, “l’étoile de la mer”, une grande dévotion mariale s’est ancrée dans les ports”, raconte Mgr Boulanger. “D’ailleurs, en Normandie, on priait déjà l’Immaculée conception au Moyen Âge, avant que le dogme ne soit affirmé par l’Église au XIXe siècle. C’est une foi populaire, que l’Église a légitimée, mais qui avant n’avait pas besoin de son aval, ni de celui des évêques”, ajoute-t-il en riant.

Un hommage aux marins disparus

À Port-en-Bessin, la fête commence par une procession jusqu’à la croix du quai Félix Faure. Une quarantaine de gerbes y sont déposées pour faire mémoire des marins disparus en mer (dont deux ont péri cette année). “Ici, on fait mémoire des ancêtres, c’est de la foi populaire. Et c’est aussi le cas pour les jeunes : ils connaissent l’histoire de leur famille car ils ont tous des photos de leurs ancêtres disparus”, insiste Mgr Boulanger.

Après la procession terrestre, place à la procession nautique. L’évêque monte sur le vaisseau amiral Le Vilou et mène une grande procession au large pour bénir chaque navire ainsi que son équipage. Une gerbe est jetée à la mer pour rendre hommage aux disparus. “On bénit chaque équipage, en appelant chaque patron par son nom”, explique l’évêque de Bayeux-Lisieux. “Nous prions pour les hommes afin que la mer soit le lieu qui les nourrisse. Mais, à la suite de Laudato Si’ (cf n°40), nous prions aussi pour que les marins travaillent à protéger leur environnement. Qu’ils soient non pas des prédateurs, mais des protecteurs. Cela touche beaucoup les marins. Ils détestent la surpêche, les gros bateaux qui détruisent les fonds marins. Ils aiment la mer et ils veulent la protéger”.


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Un rite qui fait partie de la vie du port

À Port-en-Bessin, l’Église a toujours voulu être présente dans la vie de la cité. Ainsi, le père Emmanuel Perrot, curé de la paroisse, est aussi membre des sauveteurs en mer. Et son prédécesseur allait tous les matins aider les débardeurs du port. Ceci explique peut-être pourquoi la “Mission de la mer”, un mouvement chrétien consacré au bien-être moral et spirituel des marins, est née dans cette ville en 1925.

Une messe à l’église de Port-en-Bessin est ensuite célébrée dans l’après-midi par Mgr Boulanger, avant la tenue d’une procession aux flambeaux jusqu’au sanctuaire Notre-Dame-des-Feux qui clôture la journée. “Les Portais me demandent souvent des messes pour leurs familles. Je suis touché par la foi de ce peuple. Elle ne s’exprime pas forcément dans des rites réguliers, mais elle est enracinée dans une profonde tradition”, s’émeut Mgr Boulanger.

“On peut rire, aujourd’hui, de ces rituels”, commente-t-il. “Mais derrière, il y a des conséquences humaines car on entretient la mémoire des familles. Or, la mémoire aide à tenir dans les moments tragiques. Aujourd’hui, l’Europe souffre d’une rupture de transmission, comme disait le cardinal Lustiger. On ne se réfère plus aux ancêtres, à l’arbre généalogique. S’il y a des racines, l’arbre tient bon dans la tempête. Mais un peuple qui n’a pas de racines est un peuple qui n’a pas d’avenir”.

Découvrez la traditionnelle bénédiction de la mer de Port-en-Bessin en cliquant sur la première image :

 

 

 

 

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