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En Afrique, « l’Église catholique se trouve du côté de l’homme »

Protest Kinshasa

Des prêtres catholiques de RDC lors de la marche du 31 décembre 2017.

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Agnès Pinard Legry - published on 10/06/18
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Secrétaire général de la Conférence Épiscopale de Centrafrique, le père Joseph Tanga-Koti revient pour Aleteia sur l’engagement de l’Église dans les transitions démocratiques en Afrique. L’Afrique, terre de mission. Le Vatican a recensé en 2015 plus de 222 millions de catholiques sur le continent africain, soit près d’un Africain sur cinq. Ils représentent 17 % des catholiques dans le monde. En parallèle, en cinq ans, le nombre de prêtres diocésains sur le continent a augmenté de 20 % pour atteindre 30 500 en 2015. L’occasion pour Aleteia de faire le point avec le père Joseph Tanga Koti, secrétaire général de la Conférence Épiscopale de Centrafrique, sur la manière dont l’Église catholique et les prêtres s’engagent dans les transitions démocratiques sur le continent africain.

Aleteia : Quel regard portez-vous sur la situation religieuse en Centrafrique ?
Père Joseph Tanga-Koti : La République centrafricaine compte quelques 80% de chrétiens, 10% de musulmans et 10% d’animistes. Mais pour sortir notre pays de la crise, nous devons œuvrer en réseau, une seule religion ne peut résoudre le problème. C’est pourquoi une plateforme des confessions religieuses de Centrafrique (PCRC) a été lancée. Plus récemment, l’attaque perpétrée le 1er mai dernier dans l’église Notre-Dame de Fatima à Bangui et qui a coûté la vie à 24 personnes est intolérable. Ce sont des terroristes qui ont pour unique objectif de provoquer des conflits entre chrétiens et musulmans. Il est important de ne pas faire de confusion afin d’éviter une confessionnalisation de la crise en Centrafrique. Le pouvoir politique voudrait instrumentaliser les religions pour justifier les tensions mais la cause profonde est intimement liée à la volonté de pouvoir et de contrôle des ressources naturelles du pays. Elle trouve ses origines dans la corruption, le clientélisme, la faiblesse des institutions ou encore l’impunité et l’insécurité.


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Dans certains pays africains les pressions exercées contre l’Église catholique sont nombreuses. D’où viennent-elles ?
En Centrafrique, l’Église catholique a un contact assez facile avec le pouvoir. Ceux qui veulent faire pression sont ces terroristes, ces mercenaires qui tentent de déstabiliser le pays en jouant sur une division factice entre les chrétiens et les musulmans. En République démocratique du Congo (RDC), l’Église catholique a pris la tête de l’opposition contre le gouvernement de Joseph Kabila. Une opposition pacifique qui a été violemment réprimée par le régime en place.


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De quel côté se trouve les Églises d’Afrique ?
L’Église catholique se trouve du côté de l’homme, de l’humain. Elle en défend le développement et les valeurs. Ce qui concerne l’homme concerne l’Eglise catholique. Dans nos pays nous sommes confrontés à des situations difficiles. Quand des acteurs politiques disparaissent ou tentent de s’imposer – ou de se maintenir – par la force, la seule autorité qui reste est l’Eglise. Par exemple, en RDC, l’Accord de la Saint-Sylvestre du 31 décembre 2016 qui prévoyait la tenue d’une élection d’ici la fin 2017 a été signé entre le pouvoir et l’opposition sous l’égide de l’Eglise catholique. Entre 2013 et 2015, des milices majoritairement chrétiennes anti-balaka et des ex-rebelles à dominante musulmane de la Séléka, ont mis la Centrafrique à feu et à sang. La visite du pape François en 2015 a été un signal fort et a facilité le processus démocratique dans le pays. Cela a abouti à la signature, en septembre 2016 d’un accord-cadre entre le Saint-Siège et la République centrafricaine fixant « le cadre juridique entre l’Église et l’État, régissant les questions d’intérêt commun ».

Existe-t-il une solidarité entre les différentes Églises africaines ?
Oui, cette solidarité est établie au niveau institutionnel avec, par exemple, le Symposim des Conférences Épiscopales d’Afrique et de Madagascar (SCEAM). Cette structure a été officiellement lancé en 1969 avec la première visite d’un pape en Afrique (Paul VI). Au niveau sous régional, nous avons aussi quelques organisations des églises africaines telles que l’Association des conférences épiscopales de l’Afrique centrale (ACEAC).


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Entre silence et prise de parole, quelle doit être la position de l’Église catholique pour accompagner les transitions démocratiques en Afrique ?
Elle a un rôle important à y jouer : celui d’éveilleur de conscience. Son rôle est de proclamer, d’enseigner les valeurs de l’Évangile que sont l’amour, le respect de la personne humaine etc. Elle a également un rôle à jouer dans l’éducation. En Centrafrique, par exemple, il y a une faillite de l’éducation au niveau de l’État, c’est donc l’Église qui a pris le relai. Les différents mouvements chrétiens tels que la Jeunesse étudiante chrétienne (JEC) permettent aussi d’appréhender ce qu’est la démocratie : s’il y a l’acte citoyen qu’est le vote, il y a aussi – et surtout – la participation à la construction d’une nation, d’un pays.

Que pensez-vous des relations entre le pape François et les Églises d’Afrique ?
Nous nous sentons très soutenus par le pape François. En venant en 2015 en Centrafrique, en passant une nuit dans notre pays, le pape François nous a montré sa force et sa volonté. Il est très attentif à ce qui se passe ici et ses prises de parole lors de débordements sont toujours d’une grande pertinence. Le pape François est le pape des pauvres, des laissés pour compte, des abandonnés. Nous nous sentons proches de lui et sa foi, d’une simplicité remarquable, ne peut que nous inspirer et nous appelle à nous dépasser.


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Comment l’Église d’Afrique s’inscrit-elle dans l’Église universelle ?
L’église en Afrique est jeune et c’est une église qui ne cesse de croitre. C’est une Église de qui l’Église universelle devrait beaucoup attendre car elle lui a beaucoup donné. En Afrique, l’Eglise est surtout une affaire de jeunes… et c’est une chance pour toute l’Église ! Ce dynamisme ne doit pas rester à notre niveau !

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