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Compromis ou compromission pour les catholiques en politique ?

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Ferréol Delmas - publié le 16/05/18
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Alors qu’Emmanuel Macron souhaite « retisser les liens entre l’État et la religion catholique » comme il l’a affirmé devant la Conférence des évêques de France lundi 9 avril, au collège des Bernardins, il paraît, en effet, vital pour nos sociétés de méditer la sentence prononcée par le pape François lors d’une audience solennelle, en 2015 : « Un catholique ne peut regarder depuis le balcon ! ».

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Cette métaphore fait écho à l’enseignement du Catéchisme de l’Église catholique : « La soumission à l’autorité et la coresponsabilité du bien commun exigent moralement le paiement des impôts, l’exercice du droit de vote, la défense du pays » poussant le fidèle à réfléchir sur la beauté d’un tel engagement. Souvent rejetée, la participation à la vie de la Cité peut paraître source d’éloignement des paroles christiques, de renoncement à ses convictions, à ses valeurs, à sa foi. Ces peurs légitimes, le Saint-Père demande aux chrétiens de les dépasser, considérant le combat politique comme « une forme de martyre » pouvant amener à la « sainteté ». L’Église invite le fidèle au compromis c’est-à-dire à la concession sur des détails mineurs afin de pouvoir s’engager réellement pour les causes importantes.

L’Église en tant qu’institution ne peut participer à la politeia, à l’organisation matérielle et au fonctionnement des institutions de la Cité comme le rappelle Benoît XVI dans Deus caritas est : « L’Église ne peut ni ne doit prendre en main la bataille politique pour édifier une société la plus juste possible. Elle ne peut ni ne doit se mettre à la place de l’État. Mais elle ne peut ni ne doit non plus rester à l’écart dans la lutte pour la justice. Elle doit s’insérer en elle par la voie de l’argumentation rationnelle et elle doit réveiller les forces spirituelles, sans lesquelles la justice, qui requiert aussi des renoncements, ne peut s’affirmer ni se développer ». Elle se fait éveilleuse de conscience, participant pleinement à la politique dans son acceptation la plus large, le cadre général dans lequel une société s’inscrit. Ainsi, les papes successifs donnent des indications aux chrétiens pour un « engagement chrétien en politique ».


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Dix points non négociables sont ainsi affirmés dans une Note doctrinale concernant certaines questions sur l’engagement et le comportement des catholiques dans la vie politique, en 2002, par le cardinal Ratzinger. Il s’agit du devoir de respecter et de protéger les droits de l’embryon humain, de la protection et la promotion de la famille, de la garantie de liberté d’éducation des enfants, de la protection sociale des mineurs , de la libération des victimes des formes modernes d’esclavage (en particulier la drogue et la prostitution), du droit à la liberté religieuse, du développement dans le sens d’une économie qui soit au service de la personne et du bien commun , du respect de la justice sociale , du principe de solidarité humaine et du grand thème de la paix.

La religion sous le mandat d’Emmanuel Macron

Il est rare qu’un président de la République souhaite aller aussi dans ce que Nicolas Sarkozy appelait déjà « la laïcité ouverte ». Sans tomber dans une instrumentalisation, sans tomber dans la récupération, les propos d’Emmanuel Macron à ce sujet vont dans le bon sens notamment quand il rappelle que même si « le terme les racines chrétiennes de l’Europe a été écarté par les parlementaires européens, (..) l’évidence historique se passe parfois de symboles. » De même, le chef de l’État rappelle que « la sève catholique » a été l’un des piliers de la construction de notre pays. Plus encore, le Président s’oppose au développement d’une sorte de religion républicaine : « Mais je ne suis ni l’inventeur, ni le promoteur d’une religion d’État substituant à la transcendance divine un crédo républicain. » Des propos qui doivent, néanmoins, être replacés à l’aune des déclarations de ses soutiens comme le ministre et président de la République En Marche Christophe Castaner sur le « voile catholique » ou plus récemment du député macroniste Jean-Michel Fauvert sur les « prêches en latin ».


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Le portrait que dresse l’académicien Jean d’Ormesson dans son ouvrage, Au plaisir de Dieu, du duc Sosthène de Plessis-Vaudreuil, catholique intransigeant se repliant sur ses terres pour fuir le combat politique jugé « trop sale » est révélateur d’une certaine mentalité. Certains attendent toujours le candidat parfait, raillant par la même occasion leurs coreligionnaires qui s’investissent dans le champ politique. « Le problème de beaucoup de catholiques en politique, c’est l’idéalisme : la difficulté de confronter son idéal très élevé au réel, c’est à dire à l’imperfection de ce monde » explique l’abbé Pierre-Hervé Grosjean. En effet, cette frilosité des chrétiens pour l’engagement dans la sphère publique est historique.

Pour un catholicisme social

Déjà, lors des débuts du catholicisme social, la politique du Ralliement débutée par Léon XIII et ses encycliques Inter sollicitudines et Rerum Novarum était considérée par une partie des fidèles comme une trahison. C’est le courage de personnalités du catholicisme social qui a permis de faire entendre la voix de l’Église dans une société en pleine sécularisation. Ainsi, le député breton Albert de Mun, défenseur du corporatisme accepte de se séparer de beaucoup de ses amis et souhaite « placer son action politique sur le terrain constitutionnel pour se conformer aux décisions du souverain pontife ». En outre, il défend l’arrêt de travail obligatoire et une indemnité pour les femmes enceintes. Par ailleurs, l’industriel Léon Harmel va mettre en pratique les grandes orientations papales en offrant un cadre et des conditions de vie qui permettent un développement idéal et harmonieux des ouvriers et employés de son usine.


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Aujourd’hui, la question de l’engagement des catholiques en politique doit se faire dans des domaines prégnants pour l’avenir de notre société. Le Pape, avec son encyclique Laudate si’ appelle ainsi à réfléchir sur « la sauvegarde de la maison commune », à travers les questions environnementales notamment. Le texte papal appelle le lecteur à repenser les interactions entre l’être humain, la société et l’environnement, et pousse le le chrétien à s’opposer au consumérisme. Voilà de « nouveaux combats » pour les catholiques qui souhaitent s’engager en politique et plus largement pour les fidèles qui veulent œuvrer pour le bien commun.

Quelle meilleure conclusion que cette adresse du pape François, en 2013, à la jeunesse : « Donne le meilleur : si le Seigneur t’appelle à cette vocation, vas-y, fais de la politique, cela te fera souffrir, peut-être cela te fera-t-il pécher, mais le Seigneur est avec toi. Demande pardon et va de l’avant. »

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