Si ces dernières années les papes Benoît XVI puis François ont procédé à des nominations de femmes au Vatican, ils suivent en réalité l’exemple de leur prédécesseur Pie XI, le Pape de l’entre-deux-guerres. En 1934, les Musées du vatican avaient embauché une allemande, Hermine Speier
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Élu en 1922, Pie XI est un homme qui aime marcher. Alors, quand la pluie l’empêche de sortir avec sa soutane blanche dans les jardins du Vatican, il se promène longuement dans les galeries des Musées du petit État, accompagné de son ami Bartolomeo Nogara, le directeur des Musées du Vatican.
En 1934, celui-ci propose d’embaucher Hermine Speier, brillante archéologue allemande née en 1898. Une femme donc, ce qui ne s’est encore jamais fait au Vatican. Mais là où la proposition s’avère particulièrement audacieuse, c’est qu’il ne s’agit pas seulement d’une femme mais aussi d’une juive. L’Europe est alors en pleine tourmente antisémite.
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Outre les compétences indéniables de la jeune femme, l’embaucher est aussi l’occasion pour Pie XI de montrer adroitement son opposition catégorique aux lois antisémites que l’Allemagne nazie est en train de mettre en place. Lois qui avaient d’ailleurs fait perdre son emploi à Hermine Speier : elle avait été licenciée de l’Institut allemand d’archéologie de Rome, comme tous les fonctionnaires de confession juive.
Si l’Allemagne ne sait pas reconnaître les qualités de ces citoyens, d’autres le feront ! Et les Musées du Vatican vont confier de véritables responsabilités à leur nouvelle recrue. Sa première mission sera de répertorier, classifier et archiver 20 000 négatifs photographiques d’œuvres d’art. Puis à peine un an plus tard, elle est chargée d’organiser une collection d’art étrusque léguée aux Musées du Pape.
Comme les premiers chrétiens
En 1939, à la veille de la guerre, Pie XI décède et c’est un de ses très proche collaborateur, le cardinal Eugenio Pacelli, qui est élu sous le nom de Pie XII. Alors que l’Allemagne nazie est plus menaçante que jamais, que le Vatican est entouré par l’Italie fasciste, il n’hésite pas à confirmer le choix de Pie XI d’employer cette femme juive.
La même année, Hermine se convertit au catholicisme et reçoit à cette occasion un télégramme de félicitations du souverain pontife. Preuve de l’affection réelle du Pape pour cette femme qui ne partageait jusqu’alors pas sa foi en Jésus-Christ.
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Malgré son baptême, Hermine Speier est toujours considérée comme juive par les nazis qui occupent la ville de Rome en 1943-1944 et Pie XII s’occupe personnellement de sa protection. L’archéologue allemande est ainsi cachée parmi les religieuses du couvent des Catacombes de Sainte-Cécile ! Si jamais les nazis venaient à fouiller le couvent, elle pourrait alors s’enfuir dans les catacombes par un passage secret. Comme les premiers chrétiens…
Après la guerre, Hermine Speier reprend son travail aux Musées du Vatican. La direction de la collection des antiquités lui est confiée, inaugurant dès lors une tradition : depuis, il y a toujours un Allemand parmi l’équipe dirigeante des Musées du Pape.
Après plus de trente ans au service du Saint-Siège, Hermine prend sa retraite à la fin des années 1960, avant de mourir en 1989. Sa tombe reflète bien sa vie : elle est enterrée à l’intérieur du Vatican dans le cimetière… allemand !