L’État a décidé d’engager d’importants travaux de restauration nécessaires à la préservation du Grand Orgue de la cathédrale Saint-Louis de Versailles. Un orgue témoin, à sa manière, d’une page de l’histoire de France.
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Plus qu’un simple instrument liturgique, l’orgue de la cathédrale de Versailles, commandé en 1759 par Louis XV au facteur d’orgue Louis-Alexandre Clicquot, a été le témoin d’évènements qui ont marqué les débuts de la Révolution française. Les travaux devenaient donc impératifs pour préserver cet instrument unique. Quelques mois de plus et il aurait fini muet alors qu’il en a tant vu. À sa façon, il a été acteur de l’histoire de France. C’est lui qui a accueilli la messe d’ouverture des États généraux du 4 mai 1789. Ce jour-là, Louis XVI et Marie-Antoinette défilent à la tête de la procession, suivis du clergé et de la foule jusqu’à la cathédrale pour la messe du Saint-Esprit.
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Le 22 juin suivant, l’orgue est témoin de la seconde proclamation et de la signature du Serment du Jeu de Paume. Contacté par Aleteia, Jean-Pierre Millioud, quatorzième organiste et titulaire de l’orgue depuis 43 ans, raconte : “La salle du jeu de Paume étant retenue par un match, les députés ont décidé de laisser la partie se terminer et se sont rendus à l’église Saint-Louis pour jurer, une seconde fois, de ne pas se séparer avant d’avoir donné une Constitution à la France. On peut considérer, en quelque sorte, que la République est née dans la cathédrale de Versailles”.
Mais l’histoire mouvementée de l’orgue ne s’arrête pas là. En 1793, les révolutionnaires voyant dans l’étain des tuyaux de l’orgue une matière précieuse pour réaliser des balles décident de les faire fondre. M. Bêche, au nom de la municipalité de Versailles, pose alors des scellés de la République sur la porte et ordonne de ne pas toucher à l’instrument qui, déclare-t-il habilement, servira parfaitement “pour les cérémonies de la République”.
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Bien que l’usage liturgique soit alors détournée, l’objectif de M. Bêche était de sauver coûte que coûte ce précieux instrument de la folie révolutionnaire. Beaucoup d’orgues de France ont ainsi fait résonner, durant cette période trouble, des chants révolutionnaires comme la Marche des Marseillois et l’air Ça ira dont la version la plus connue reste celle publiée par l’organiste Claude Balbastre en 1792.
Si après la Révolution, les églises sont redevenues des lieux destinés à la louange de Dieu et non à celle de la République, il est arrivé d’entendre raisonner à nouveau quelques notes républicaines en de rares occasions. En janvier 2015, lors des attentats de Paris, alors que l’archevêque de Paris célébrait une messe en hommage aux victimes, Olivier Latry, organiste titulaire du Grand-Orgue de Notre-Dame, a improvisé sur la Marseillaise. L’Église et l’État étaient ainsi réunis dans le deuil le temps d’une messe.