Je me réjouis de la troisième exhortation apostolique du pape François sur l’appel à la sainteté dans le monde actuel. Le titre nous y invite, Gaudate et Exsultate ; il est tiré de la première phrase du texte : « Soyez dans la joie et l’allégresse » (Mt 5, 12). Rédigé à la première personne dans un style vif, ce texte est peut-être le plus fort et le plus personnel de François, où il intègre deux de ses thèmes fondamentaux : la joie de l’Évangile et la réforme de l’Église. C’est une remarquable synthèse de ses convictions qu’il a mûrie au fil du temps. L’exhortation, divisée en cinq chapitres et 177 paragraphes, est écrite sur le ton de la conversation. Le Pape présente la sainteté comme une réalité toute proche, possible, celle de la « porte d’à côté », destinée non à une élite, mais à la « classe moyenne », « ceux qui vivent proches de nous et sont un reflet de la présence de Dieu » (paragraphe 7). Il prolonge l’appel prophétique de Jean Paul II : « N’ayez pas peur », en tutoyant le lecteur pour mieux l’interpeler : « N’aie pas peur de la sainteté » ; « N’aie pas peur de viser plus haut, de te laisser aimer et libérer par Dieu. N’aie pas peur de te laisser guider par l’Esprit saint ».
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Les saints réformateurs
Jean Paul II, à la suite du concile Vatican II qui a montré que nous sommes tous appelés à la sainteté, avait placé la sainteté en tête des priorités pastorales de toute l’Église pour le troisième millénaire (Cf : Novo millennio ineunte). Pour lui, la sainteté est ce qu’il y a de plus essentiel à l’Église, puisqu’elle révèle la vitalité de l’Esprit saint dans ses membres. Benoît XVI a continué sur cette lancée en donnant, de 2006 à 2011, plusieurs catéchèses du mercredi sur les saints et saintes du calendrier liturgique. Il avait déjà dit au journaliste Peter Seewald : « Les vrais réformateurs de l’Église, grâce auxquels elle est redevenue plus simple et a ouvert ainsi de nouveaux accès à la foi, ont toujours été les saints ». (Le sel de la terre, 1997).
Gaudate et Exsultate se situe au cœur de toute réforme personnelle et ecclésiale, puisque Dieu est mis au centre. Le ton est donné dès le début : « Le Seigneur demande tout ; et ce qu’il offre est la vraie vie, le bonheur pour lequel nous avons été créés. Il veut que nous soyons saints et il n’attend pas de nous que nous nous contentions d’une existence médiocre, édulcorée, sans consistance. »
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“Plus que demander, prier, c’est d’abord écouter Dieu”
François prévient que son exhortation n’est pas un traité sur la sainteté ; son objectif est de « faire résonner une fois de plus l’appel à la sainteté, en essayant de l’insérer dans le contexte actuel, avec ses risques, ses défis et ses opportunités ». Il invite le peuple de Dieu à « progresser vers la sainteté », à vivre les Béatitudes en agissant comme Jésus « à contrecourant de ce qui est habituel, de ce qui se fait dans la société. » Le Pape mentionne, à l’occasion, les saints réformateurs qui ont transformé l’Église, ceux et celles que j’appelle « ces fous admirables » : Benoît de Nursie, Bernard de Clairvaux, François d’Assise, Ignace de Loyola, Jean de la Croix, François de Sales, et bien d’autres. Il rappelle le « génie féminin » qui a contribué aux réformes de l’Église :
« Même à des époques où les femmes ont été plus marginalisées, l’Esprit saint a précisément suscité des saintes dont le rayonnement a provoqué de nouveaux dynamismes spirituels et d’importantes réformes dans l’Église. Nous pouvons mentionner sainte Hildegarde de Bingen, sainte Brigitte, sainte Catherine de Sienne, sainte Thérèse d’Avila ou sainte Thérèse de Lisieux. Mais je tiens à évoquer tant de femmes inconnues ou oubliées qui, chacune à sa manière, ont soutenu et transformé des familles et des communautés par la puissance de leur témoignage. »