« Dieu est amour » : la bible est le seul texte sacré dans lequel on puisse lire une telle phrase sur Dieu. Elle est prononcée par un unique auteur : saint Jean. Toute la spiritualité johannique tient dans ces quelques mots. Le Père Michel Hubaut, dans son livre Le Verbe s’est fait chair, fait le pari de rendre accessible à tous les non-initiés la profondeur de cet évangile.Dans son exhortation apostolique La joie de l’Evangile, le Pape François nous engageait à approfondir notre lecture spirituelle de l’Evangile pour y voir la source véritable de toute vie de prière. C’est en effet dans l’évangile que l’on peut découvrir le visage du Christ tel qu’il est apparu aux hommes. Il nous faut donc accueillir « le sublime trésor de la Parole révélée », qui doit être « une porte ouverte à tous les croyants ». C’est dans cette optique que le père franciscain Michel Hubaut a rédigé tour à tour des commentaires des évangiles de saint Marc, saint Luc et saint Matthieu. L’évangile selon saint Jean a la réputation d’être le plus poétique et le plus mystique. Il peut donc paraître plus difficile d’accès. Michel Hubaut dans son ouvrage sur l’évangile selon saint Jean démontre le contraire et montre à quel point on peut y goûter une lumineuse simplicité.
Un ouvrage d’une simplicité toute franciscaine
Pas à pas, l’auteur nous guide et nous permet de comprendre les paroles mystérieuses du Christ et de l’évangéliste. Il déroule l’évangile verset par verset et en donne toute la dimension. On y ressent la douceur évangélique propre à la simplicité franciscaine. C’est probablement ce qui est adapté pour saisir la richesse symbolique cet évangile. Il existe en effet de nombreuses sommes exégétiques autour de l’évangile selon saint Jean, mais elles sont la plupart du temps illisibles pour le commun des fidèles. Avec cet ouvrage, tout devient plus lumineux et il nous semble qu’au début de son évangile, ce n’est pas seulement de Jean le baptiste, mais également de lui-même que nous parle Jean :
« La lumière brille dans les ténèbres, et les ténèbres ne l’ont pas arrêtée. Il y eut un homme envoyé par Dieu ; son nom était Jean. Il est venu comme témoin, pour rendre témoignage à la Lumière, afin que tous croient par lui. Cet homme n’était pas la Lumière, mais il était là pour rendre témoignage à la Lumière. Le Verbe était la vraie Lumière, qui éclaire tout homme en venant dans le monde. » (Jn 1, 5-9)
La joie d’être enfant et aimé de Dieu
Selon le père Michel Hubaut, la particularité de saint Jean tient dans le rapport qu’il instaure entre Dieu et les hommes. Il est en effet le seul à utiliser le terme « enfants de Dieu » pour désigner les croyants, quand saint Paul par exemple parle « d’adoption ». Jean va ainsi jusqu’à dire que les croyants sont « nés de Dieu ». En effet, on peut lire : « Ils ne sont pas nés du sang, ni d’une volonté charnelle, ni d’une volonté d’homme : ils sont nés de Dieu ».
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Cette idée d’être né de Dieu sous-entend que c’est Dieu seul qui engendre la vie, que notre vie entière est un don, une grâce, et que toute notre vie revient à vivre de ce don et de cette grâce. On sort alors de la logique du jugement et de la comptabilité des péchés, dès lors que l’on perçoit la puissance infinie du don total fait par Dieu. Saint Jean écrit : « Dieu a envoyé son Fils dans le monde, non pas pour juger le monde, mais pour que, par lui, le monde soit sauvé. Celui qui croit en lui échappe au Jugement ». C’est ce don qui permet de vivre de l’amour de Dieu et c’est cet amour qui donne la « joie parfaite » : « Comme le Père m’a aimé, moi aussi je vous ai aimés. Demeurez dans mon amour. Si vous gardez mes commandements, vous demeurerez dans mon amour, comme moi, j’ai gardé les commandements de mon Père, et je demeure dans son amour. Je vous ai dit cela pour que ma joie soit en vous, et que votre joie soit parfaite » (Jn 15, 8-11).
Je ne vous appelle plus serviteurs, je vous appelle amis
L’évangile selon saint Jean nous fait clairement sortir d’une logique de jugement pour aller vers une logique de don et de grâce. Tout est don, tout est donné, tout est grâce : la mission de l’homme est essentiellement d’accueillir cette grâce. Il n’est donc plus serviteur ou esclave de Dieu dans un rapport exclusif d’obéissance ou de soumission. Il n’est pas simplement disciple. Il est bien plus que tout cela, il est l’ami du Christ : « Je vous appelle mes amis, car tout ce que j’ai entendu de mon Père, je vous l’ai fait connaître » (Jn 15, 15).
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On comprend à quel point l’enjeu de la vie spirituelle à la suite du Christ n’est pas d’abord une affaire de morale, de bon comportement, mais de relation à entretenir avec Dieu, que ce soit le Christ, comme ami, et le Père, en se sachant enfant de Dieu. C’est cette relation en tant que telle qui se vit dans l’esprit saint. Tout est donc avant tout affaire de relation, d’amitié et d’amour, et non de théorie ou d’idéologie.
Toute la spiritualité de saint Jean peut se résumer dans ces quelques mots : « Dieu est amour ». Vivre en Dieu, vivre d’une vie de prière, être saint, tout cela se résume à « demeurer dans l’amour de Dieu ». C’est là que réside notre vocation d’enfants de Dieu et la joie immense d’être chrétien. C’est cette vision qui nous permet de comprendre l’importance accordée par le Pape François à la joie, que ce soit la joie de l’Evangile – dans son exhortation Evangelii Gaudium) ou la joie de l’amour – dans son exhortation Amoris Laetitia.