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Dans le Tarn, sur les pas de Dom Robert

Marie Le Goaziou
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Marie Le Goaziou - publié le 24/02/18
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À deux pas de l’abbaye de Dom Robert, En Calcat, l’ancienne abbaye-école de Sorèze accueille ses merveilleuses tapisseries qui nous entraine derrière un papillon, au milieu des fleurs de la montagne noire.

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« Dans une tapisserie, on se promène, on flâne. Un détail vous conduit à un autre, un rouge mène au bleu. Tout à coup, on découvre un oiseau, un écureuil qui voulait se cacher, on en cherche d’autres, comme on va aux champignons… Pour faire court, disons que la peinture est un art d’espace tandis que la tapisserie est un art du temps… » affirmait Dom Robert (1907-1997), lui qui avait choisi de rendre hommage à la Création dans ses tapisseries.

De son vrai nom Guy de Chaunac-Lanzac, Dom Robert a réussi à conjuguer sa vocation artistique et sa vocation religieuse à l’abbaye bénédictine d’En Calcat, à Dourgne dans le Tarn où il entre en 1930. Auparavant il a été dessinateur pour tissus chez un soyeux lyonnais après avoir été formé à l’école des arts décoratifs de Paris. Et durant son service militaire dans les Spahis au Maroc, il en profite pour pratiquer l’aquarelle et les croquis de chevaux.

Moine à l’abbaye d’En Calcat

Lorsqu’il découvre pour la première fois l’abbaye bénédictine d’En Calcat, il décide de venir s’enraciner dans cette  montagne noire, dernière « virgule » du Massif central, dotée d’une nature particulièrement riche due à ces deux types de climat, méditerranéen côté Est et océanique coté Ouest. Ces études de théologie et de philosophie l’éloigne un temps de ses pinceaux mais dès qu’il est ordonné prêtre, il se remet au dessin pour orner un évangéliaire pour lequel il utilise son goût pour les livres d’heures médiévaux et les miniatures persanes.

Marie Le Gouaziou

© Marie Le Goaziou
Les chèvres du Larzac, tapisserie de basse lisse laine et coton, 2,50m sur 1,70m a été tissée aux ateliers Goubely d’Aubusson en 1993. (coll AEC)

Puis, sur le chemin de la démobilisation en 1940, Dom Robert est ébloui par une cour de ferme. Dès lors, il continue inlassablement d’observer et de reproduire la nature qui l’entoure. Les dessins et aquarelles sur ce thème vont se succéder. Ils deviendront ses premiers cartons de tapisserie.

Peintre cartonnier atypique

« C’est par circonstances que j’ai fait de la tapisserie, c’est par un appel que je suis entré au monastère. C’est de naissance que je dessine » déclarait l’artiste. C’est en effet sa rencontre avec Jean Lurçat en 1941 qui va l’orienter vers la tapisserie dont il comprend tout de suite les contraintes techniques et les possibilités artistiques. Il maitrise très vite l’exécution des cartons chiffrés qui permettront aux liciers d’Aubusson de tisser ses modèles foisonnants de détails et de couleurs.



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Ses premières tapisseries représentent le printemps, l’été et l’automne… C’est un succès immédiat et grisant, pas toujours compatible avec la vie monastique. Il s’éloigne alors d’En Calcat pour une abbaye bretonne avant d’arriver en Angleterre, dans le Devon à l’abbaye de Buckfast où il délaisse ses croquis d’animaux de basse cour et de papillons pour ceux de moutons et des poneys du Dartmoor qui viendront orner désormais ses tapisseries qu’il continue à faire tisser à Aubusson.

Marie Le Gouaziou

© Marie Le Goaziou
À l’entrée du Musée, Dom Robert nous accueille, noyé dans un bosquet de genêts.

« Dans une tapisserie, on se promène, on flâne. Un détail vous conduit à un autre, un rouge mène au bleu. Tout à coup, on découvre un oiseau, un écureuil qui voulait se cacher, on en cherche d’autres, comme on va aux champignons… Pour faire court, disons que la peinture est un art d’espace tandis que la tapisserie est un art du temps… »

Une collection tissée à Aubusson

Sa collaboration avec les ateliers d’Aubusson s’est particulièrement développée avec l’atelier de Suzanne Goubely qui associe de nombreux artistes contemporains à ses productions. De 1930 à 1997, son atelier crée plus de 700 cartons, d’une quarantaine d’artistes. Parmi cette production, Dom Robert est l’un des cartonniers les plus représentés.



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Après les années fastes de 1950 à 1980, la tapisserie passe de mode mais Suzanne Goubely, refusant de fermer son atelier et de licencier ses dernières licières, décide de tisser sur ses fonds propres les cartons de Dom Robert pour constituer une collection qu’elle lègue à l’abbaye d’En Calcat à sa mort en 1997… la même année que celle de l’artiste !

Marie Le Gouaziou

© Marie Le Goaziou
Dans le musée de l’Abbaye-Ecole, une remarquable maquette montre l’importance des bâtiments et son imbrication dans la petite ville de Sorèze

L’écrin de l’abbaye-école de Sorèze

À la tête d’une extraordinaire collection d’une centaine de tapisseries dont les deux tiers sont tissées sur des cartons de Dom Robert, les moines d’En Calcat ont voulu la partager avec le public, mais encore fallait-il trouver les lieux pour accueillir un tel fonds ! À quelques kilomètres d’En Calcat, se trouve un ancien collège royal militaire dont le père Lacordaire fera au XIXe une école à la renommée internationale car les enfants venaient de tous les territoires français éparpillés dans le monde.



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Cet ensemble extraordinaire de bâtiments, encore utilisé en pensionnat jusqu’au début des années 1990 va se transformer sous la houlette de la Région, du département et de la commune en un immense centre culturel avec deux hôtels, un centre de formation, un musée de l’ancienne école qui retrace la vie quotidienne des élèves durant plus de deux siècles… puis pour s’échapper vers la montagne noire si proche, le musée Dom Robert et de la tapisserie contemporaine.

Le monde de la tapisserie

Dans un dédale d’espaces permettant de comprendre toute la conception d’une tapisserie, mais aussi d’apercevoir les réserves du musée, les tapisseries de Dom Robert vont nous faire l’école buissonnière… titre de l’une de ses œuvres. On découvre aussi bien la technique de tissage grâce à un métier monumental qui parfois s’anime lors du passage d’une licière en démonstration, que l’envers du décor, tout ébouriffé de fil de laine comme ce petit mouton présenté dans une vitrine double face, ou bien une glace placée face à la tapisserie et à coté du carton fait comprendre toute la difficulté de ce savoir faire de la tapisserie d’Aubusson, classé au patrimoine de l’humanité par l’Unesco… Bref, tout un monde, celui de Dom Robert, qui n’a cessé de dessiner cette nature qui l’entourait afin de louer Dieu.

Marie Le Gouaziou

© Marie Le Goaziou
Marie Claude Daubusson a bien connu Dom Robert lorsqu’elle était lissière à l’atelier Goubely. Désormais, elle vient régulièrement tisser au sein du musée pour transmettre ce savoir-faire inscrit depuis 2009 sur la liste du patrimoine culturel immatériel de l’Unesco.

Abbaye-école de Sorèze – Musée Dom Robert et de la tapisserie du XXe siècle -1 Rue Saint-Martin, 81540 Sorèze. Téléphone : 05 63 50 86 38  – Ouvert toute l’année.

Abbaye d’En Calcat, 8 D85, 81110 Dourgne. Téléphone : 05 63 50 32 37

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