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L’abbé Charlemagne, acteur d’espérance pour les enfants orpailleurs du Burkina Faso

FATHER CHARLEMAGNE

Le Père Charlemagne

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Eric de Legge - publié le 15/11/17
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Au Burkina-Faso, l’abbé Charlemagne Sawadogo se porte au chevet des enfants qui travaillent sur des sites illégaux d’orpaillages. Avec le soutien de la Fondation Raoul Follereau, il tâche de les convaincre de prendre soin de leur vie toute entière. Et cela commence par l’école.

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Prêtre depuis cinq ans dans le diocèse d’Ouahigoya (Burkina-Faso), le père Charlemagne Sawadogo, 33 ans, est responsable de la pastorale auprès des familles et des enfants travaillant sur des sites d’orpaillages illégaux. Il explique à Aleteia en quoi consiste sa mission et pourquoi elle est essentielle pour la survie des enfants.

Aleteia : Pouvez-vous nous décrire le quotidien des enfants et des familles qui travaillent dans les sites d’orpaillages que vous visitez ?
Abbé Charlemagne Sawadogo : La région d’Ouahigoya est sans doute la région la plus pauvre du Burkina-faso. L’orpaillage illégal est une activité de survie pour de nombreux habitants. Mais c’est un travail éprouvant pour lequel de nombreux jeunes et même des enfants sont sollicités par leurs propres familles. Sur les sites illégaux, parents et enfants sont payés pour creuser des trous profonds et étroits desquels ils sortent des cailloux et du sable qu’ils concassent pour trouver de l’or. Ces cailloux sont passés dans des moulins et il en ressort un mélange qui est lavé selon une technique rudimentaire. Ce lavage nécessite d’utiliser des produits dangereux qui contiennent du mercure. Car c’est le mercure qui absorbe l’or. Vous le voyez, c’est un travail périlleux et qui plus est, très mal rémunéré compte-tenu de ce qu’il peut rapporter aux exploitants de ces carrières. Or mon diocèse regorge de ces sites d’orpaillages illégaux. Mon évêque a donc considéré qu’il y avait là un défi à relever pour l’Église : celui de dire à ces travailleurs qu’ils devaient prendre soin de leur vie toute entière, et de se préoccuper de la vie de leurs jeunes enfants. Ce qui est terrible, c’est de voir que des enfants de 6 à 12 ans effectuent les mêmes tâches que des adultes et qu’ils ne vont pas à l’école.

Ouahigoya

Fondation Raoul Follereau

Mais vouloir venir au sein de ces sites illégaux au secours des enfants alors que des familles ont besoin de leur force de travail pour subsister, n’est-ce pas peine perdue ?
Certainement pas. Mon équipe et moi, nous sommes neuf, ce qui nous motive c’est que l’Église a le souci de s’occuper de l’homme et de tout l’homme. Partout où nous sentons une difficulté humaine, partout où le message de compassion de l’Église peut être donné, nous y allons. Nous devons montrer à ces familles et à ces enfants qu’il existe d’autres chemins que celui qui conduit à ne pas prendre soin de notre vie toute entière. La vie, dans notre foi, est un don sacré de Dieu. Il faut en prendre soin. A nous, prêtres et chrétiens, de leur donner les moyens pour prendre soin de cette vie-là. Nous ne nous battons pas pour qu’une famille survive, nous leur disons à toutes qu’il existe d’autres chemins, bien moins risqués, que l’orpaillage illégal pour que chacun s’accomplisse tout entier. Parce que l’enfant qui travaille au contact de produits toxiques, quoi qu’on dise n’aura pas la même longévité que l’enfant qui va à l’école. Et quoi qu’on en dise, l’intelligence et la connaissance développées à l’école sont une richesse qui dépasse de loin celle de l’or.

Concrètement, comment se passe ce “travail” auprès de ces jeunes ?
Nous avons commencé notre mission autour du plus grand gisement illégal, à Namissigma. Mais les gens se déplacent au grès de leurs besoins. Avec le soutien de la Fondation Raoul Follereau, nous intervenons donc désormais sur six autres sites. Au quotidien, nous sommes neuf personnes, dont un ancien orpailleur, à intervenir sur les sites à travers des distributions de nourriture ou de l’accompagnement pour convaincre parents et enfants d’aller à l’école. C’est un travail de longue haleine. Le fait que je sois prêtre est un grand avantage. Car vous savez, au Burkina-Faso, les prêtres jouissent d’un grand prestige. Quand je vais sur les sites d’orpaillage, je m’habille en soutane pour que les gens sachent qu’un prêtre est au milieu d’eux. Les gens se disent que je ne suis pas une personne venue pour leur faire du mal. Ils se disent ce n’est pas un policier qui vient les arrêter. À leurs yeux, ma soutane est un gage d’ouverture. Quand je dialogue avec eux, je sens qu’ils n’ont pas peur, que nos échanges sont faits de confiance mutuelle. Ils savent que mon message est un message du cœur. Ils m’écoutent et écoutent notre équipe. Un prêtre selon eux mérite la confiance et c’est vraiment une grâce pour la mise en œuvre de cette mission.

Travail des enfants

Fondation Raoul Follereau

Qu’est-ce que vous leur dites pour qu’ils choisissent un autre chemin ?
Lorsque nous sommes avec une famille, nous l’encourageons simplement à s’investir dans un autre domaine que l’orpaillage. Ils s’agit de les convaincre que ce n’est pas une place favorable à l’établissement d’une famille. Quand nous sommes avec les jeunes, nous les alertons sur les stupéfiants et tous ces produits qu’ils prennent pour tenir le coup. Nous les invitons à se protéger, à se ménager dans la vie. Je leur dis souvent : “Quand on perd la vie, on la perd, quand on la possède, on la possède pour de bon”. Nous invitons aussi tous ces jeunes à se former. Aux très jeunes enfants, nous leur prions d’être prudents quand ils s’approchent des trous et des machines qui sont dangereuses. Lorsqu’ils sont malades, nous les emmenons à l’hôpital pour qu’ils ne restent pas à la maison. Et surtout, nous tâchons de leur faire comprendre que leur place à leur âge, c’est l’école.

Quel rôle joue la fondation Raoul Follereau auprès de vous ?
J’aime bien dire que la fondation Raoul Follereau est un ange gardien pour nous. Parce que l’ange gardien, c’est celui qu’on ne voit pas mais qui est là et qui sauve. La Fondation nous épaule depuis cinq ans. Mais surtout, elle nous fait confiance. Chaque année, selon ce que nous identifions comme besoins avec les animateurs sur place, nous les soumettons à la fondation qui étudie nos projets.

Mais concrètement ?
L’an dernier par exemple, la Fondation nous a appuyé pour accompagner dix jeunes filles et seize femmes à choisir d’entreprendre une activité dans un autre secteur que l’orpaillage. Au quotidien, la fondation nous aide pour assurer la distribution de quelques 200 repas par jour pour les enfants sur place. C’est une façon de contribuer à leurs croissance et, au contact de notre parole, de réaliser qu’ils existent des alternatives à l’orpaillage. L’an dernier, la Fondation nous a permis d’acheter un véhicule pour faciliter nos tournées auprès des parents et le transports de certains jeunes pour aller à l’école. Rendez-vous compte, cette année nous en avons scolarisé 52 enfants au total !

FATHER CHARLEMAGNE

Franck Perrin pour la Fondation Raoul Follereau

Est-ce qu’une rencontre avec l’un de ces jeunes vous a plus particulièrement marqué ?
Oui, et elle peut paraître anodine alors qu’elle ne l’est pas du tout selon moi. Je me souviens d’une rencontre avec un groupe de jeunes juste avant un repas. Je remarque que l’un d’entre eux n’est pas là. Je suis surpris parce que c’est un enfant intelligent et brillant qui me semblait vouloir choisir un autre chemin que l’orpaillage. Je demande aux autres, qui ne sont pourtant pas ses amis. Et là, tous me disent qu’il est malade. Rassurez-vous, il est rétabli depuis. Mais à cet instant j’ai été heureux, car je voyais sous mes yeux comment un lien de fraternité s’était noué entre tous ces jeunes. Ils étaient attentifs les uns aux autres. Notre message entraient manifestement dans les cœurs.

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