L’hiver arrive. Si pour beaucoup il est synonyme de fêtes de Noël et de feux de cheminée, il est aussi annonciateur de froid et de désarroi pour ceux qui dorment dehors. Avec peu ou beaucoup de temps et de moyens, comment leur venir en aide ? Lille, le premier soir de novembre. Dans les rues pavées, un homme entouré de quelques couvertures est assis par terre. Une femme, élégante vient à sa rencontre, s’accroupit à côté de lui en lui prenant les mains. L’image est belle, mais combien d’entre nous sommes capables d’un tel geste ? S’asseoir parmi les plus pauvres, franchir la barrière de la crainte et du rejet, si cela paraissait naturel pour cette femme ce soir-là, c’est loin de l’être pour tout le monde. Sans forcément devenir un “abbé Pierre”, il existe de nombreuses façons d’aller vers les plus fragiles..
Une appli solidaire
À Lille justement, comme à Lyon et Grenoble, l’application Entourage vient de créer son réseau. Les Parisiens ont déjà pu l’étrenner et le principe est simple : permettre aux voisins de se réunir autour d’une cause et rompre l’isolement d’un sans domicile fixe. Si vous êtes un peu gêné face aux sans-abri, que vous ne savez pas comment vous y prendre, « Entourage » vous aidera en vous proposant de rejoindre les actions solidaires de vos voisins. Ainsi, Jean peut proposer sa cave comme local d’entrepôt, Claire ses compétences pour remplir des papiers administratifs, et Marc qui, n’a guère qu’une pause déjeuner comme temps libre, en profitera pour un brin de causette réconfortante. Chacun, avocat, secrétaire, infirmière, peut offrir ses compétences professionnelles ou tout simplement sa chaleur humaine.
Pour une bouchée de pain
À Saint-Malo, Chloé a pris l’habitude d’acheter une baguette en attente à la boulangerie Picquart de Paramé. Pour cette jeune cadre, mère de famille, qui n’a pas beaucoup de temps libre, c’est une manière simple et à portée de toutes les bourses d’agir pour les plus démunis. On ne peut guère faire plus simple : lorsque vous achetez votre baguette, il suffit d’en acheter une seconde, que le boulanger mettra de côté avant de la redistribuer au sans-abri.
Le principe de la baguette en attente, présent dans de nombreuses villes en France, se calque sur celui du café en attente ou suspendu, le “caffè sospeso”, concept de solidarité pratiqué dans les bars napolitains. Et si la boulangerie du coin de notre rue ne le fait pas encore, pourquoi ne pas l’inviter à mettre le système en place ?
À la pause déjeuner
Pour ceux qui ont plus de temps, la distribution d’un bol de soupe lors d’un repas partagé sur une table est l’occasion de donner une soirée par semaine. Hermine a commencé il y a un mois et demi avec la paroisse Notre-Dame du Lys à Paris. Pour la jeune maman, c’est un moyen de se décentrer de ses propres problèmes. Elle sait aussi sa chance d’avoir un toit et la rapidité avec laquelle la vie de chacun peut basculer. « Ça va très vite de se retrouver à leur place. J’aimerais qu’on fasse ça pour moi si j’étais comme eux. » La dimension chrétienne d’un tel service est bien présente à l’esprit d’Hermine : « Je me dis que ce sont mes frères en humanité. »
Si la famille est la priorité des soirées, la paroisse de la Trinité, à Paris, nous enlève une épine du pied en proposant de distribuer la soupe sur le temps… du déjeuner ! De 12h45 à 13h, plutôt que d’aller au restaurant avec nos collègues, nous pouvons toujours retrousser nos manches et servir les plus pauvres.
Un petit sacerdoce
Enfin, les traditionnelles maraudes sont légion dans la solidarité hivernale. Il suffit de frapper à la porte de la Croix Rouge, pour qui toute aide est la bienvenue. Dans le froid glacial de l’hiver, c’est un petit sacerdoce pour les équipes qui tournent à plein régime, tous les soirs de la semaine, dès que le plan grand froid est activé. De la nourriture, des kits alimentaires ou d’hygiène sont ainsi distribués.
Avec l‘association de la paroisse de la Trinité à Paris, le macadam café distribue son amitié un soir par semaine après un temps de prière. « Nous servons une boisson chaude, mais c’est un prétexte pour engager la discussion. Ils nous remercient souvent, eux qui souffrent de tant d’indifférence » explique David, membre des équipes de maraude depuis trois ans.
Avec tout ça, nous n’aurons plus aucune excuse pour rester tapi dans notre confort douillet en fermant les yeux ! Que nous ayions 45 minutes, une soirée ou 90 centimes à donner, chacun peut agir, en se souvenant de la parole de Jésus : « Amen, je vous le dis : chaque fois que vous l’avez fait à l’un de ces petits qui sont mes frères, c’est à moi que vous l’avez fait. » (Mt 25, 31-46).