Partager un repas dans la nef d’une église ou ses bas-côtés. Voilà une pratique chrétienne pas toujours bien perçue.
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Voilà un débat dont les italiens ont le secret. En Italie, de nombreuses personnes ont commenté l’organisation le week-end dernier d’un repas à l’intérieur de la basilique de San Petronio à Bologne. Le Souverain Pontife y a partagé un moment avec des pauvres, des réfugiés et des détenus. Il est ici question d’un lieu sacré à l’intérieur duquel s’exprime un geste de charité fraternel. Et en aucune façon, explique le père jésuite italien Antonio Spadaro sur les antennes de Radio Vatican, on ne saurait voir une violation de ce caractère sacré dans le geste du pape François.
Le directeur de la revue des jésuites en Italie, La Civiltà Cattolica, rappelle que la charité constitue “le sens fondamental du christianisme”, et qu’elle ne peut qu’exalter cette sacralité du lieu. Il ne s’agit pas d’un repas quelconque, simplement lié à la nécessité de manger et de boire, mais d’un geste accompli en reliant ceux qui le partagent, en créant entre eux des liens de solidarité et d’amour, dans un esprit communautaire.
Repas terrestre, repas céleste
Donc loin de désacraliser la basilique, le Pape a porté cette sacralité à son plus haut niveau, mettant encore plus en évidence la mission première de l’Eglise : servir ! Dans les évangiles, Jésus utilise beaucoup dans ses paraboles des histoires de repas comme illustration du Royaume de Dieu. N’est-ce pas autour d’un repas qu’il a réuni ses apôtres, le dernier soir de sa vie sur terre pour sceller son amour avec eux ? Ce geste, confirme Antonio Spadaro, s’inscrit “dans la continuité des deux repas : le repas eucharistique et le repas d’amour à partager avec des personnes démunies”. Si le Seigneur a choisi l’image du repas pour instituer le sacrement de l’Eucharistie, c’est bien dans ce sens là : “exalter la beauté et l’efficacité de la la grâce que confère l’Eucharistie”, qui le rend présent dans le pain rompu et à partager entre tous.
Ils étaient un millier de pauvres à déjeuner avec le Pape, ce dimanche 1 octobre, après avoir écouté sa catéchèse : “catéchèse-déjeuner, parole-pain… Cette association représente “une des traditions les plus anciennes et les plus solides de notre identité chrétienne”, souligne Mgr Stefano Ottani, vicaire général pour la Synodalité du diocèse de Bologne, sur Avvenire. Et les premiers chrétiens en faisaient un large usage. ” Les repas communautaire, la sainteté du lieu, la charité fraternelle, devenaient pour chacun source de vertus”, a-t-il ajouté. Le pape Saint Grégoire le Grand aussi, au IVème siècle, ouvrit les portes de l’Eglise pour faire manger les plus pauvres. L’archevêque de Bologne, Mgr Matteo Maria Zuppi, qui a eu l’idée du repas, a défendu son projet : “ce geste ne signifie pas désacraliser le lieu, mais bien au contraire nous aide à mieux comprendre l’Eucharistie, à la sentir encore plus humaine”.
Quel avantage pour le Christ ?
Pour un chrétien, en effet, le plus grand honneur qui puisse être rendu au Seigneur n’est pas de faire ce qu’il croit être le mieux pour le vénérer mais ce qu’Il veut Lui le Seigneur. Dans le cas présent : Ne pas l’honorer dans une église avec des tissus de soie, alors que dehors on le néglige (dans le pauvre) quand il pâtit le froid et la nudité. “Le corps du Christ qui est sur l’autel n’a pas besoin de manteaux, mais d’âmes pures; alors que ceux qui sont dehors ont besoin d’un grand soin”, souligne Giovanni Marcotullio pour Aleteia. Quel avantage pour le Christ que la table du sacrifice soit pleine de de vases d’or, son autel orné de voiles d’or, alors que dehors le pauvre meurt de faim et de froid ? Aux pharisiens qui le critiquaient, dans le même genre de circonstance, Jésus répondit : “N’avez-vous pas lu ce que fit David un jour qu’il eut faim, lui-même et ceux qui l’accompagnaient ? Il entra dans la maison de Dieu, prit les pains de l’offrande, en mangea et en donna à ceux qui l’accompagnaient, alors que les prêtres seulement ont le droit d’en manger” (Lc 6, 4-5).