Réginald Gaillard signe avec “La Partition intérieure” un récit où tragédie et espérance émergent ensemble, dans les simples histoires d’un prêtre et de deux de ses paroissiens.
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Ce prêtre habitué au bruit de la capitale et qui arrive dans un village reculé du Jura, en 1969, n’est pas à la fête. Il troque les salons et la vie trépidante de Paris pour le silence de la campagne et le rythme immuable des saisons. Au milieu de ses nouveaux voisins taiseux, aussi rudes que leur pays, il manque de désespérer, craignant l’ennui, se disant qu’il n’a rien à faire là. Mais sa relative solitude, l’absence des rumeurs de la ville, décapent son univers du superflu, et il découvre l’expression de la foi, ou de la recherche de Dieu dans les plus inattendus de ses paroissiens.
On pense au Journal d’un curé de campagne de Bernanos et aux Âmes simples de Pierre Adrian devant ce roman qui prend pour cadre une campagne âpre. La recherche de Dieu et le mystère du mal se dessinent à nu, dans les destins de personnages apparemment anodins, voire marginaux. Le prêtre lui-même, narrateur et personnage central du récit, n’échappe pas aux questionnements angoissants et aux crises de foi. Que peut faire un prêtre dans une campagne qui semble oublier Dieu ? Que répondre aux paroissiens qui sont confrontés aux malheurs et aux injustices ? Avec son col romain, il est supposé savoir…
Le prêtre, cet aventurier
Il a pourtant, lui-même, son chemin à accomplir. Lui qui était un jeune prêtre brillant, appréciant les arts, et vivant authentiquement l’Évangile, il voit combien l’édifice de sa foi était fragile, vacillant devant les misères humaines. Catapulté en province, “le Parisien” est traité en étranger par ses coreligionnaires, en ces années 1970 qui voient la désertification des campagnes et des églises. Sa retraite jurassienne est une petite mort, mais elle le délivre de ses pesanteurs, et lui fait découvrir la radicalité du message de l’Évangile
Deux destins surtout le contraignent à quitter le monde. Un compositeur solitaire et une demi-folle qui, chacun à leur façon, se sont dédiés à une quête qui les dépasse. Ce sont deux “fêlés qui font passer la lumière” selon le mot de Michel Audiard. Et dans cette campagne dévastée, qui vit à la lumière crépusculaire du passé, même la foi, la quête de sens ou de beauté ressemblent à des malédictions tant elles écartèlent les personnages entre ciel et terre. C’est pourtant grâce à eux et à leur tragédie que le prêtre “recommence à croître”, et qu’il trouve dans son ministère une joie paradoxale selon l’ordre du monde. Avec les êtres étranges qui dominent ce roman, le prêtre, la mystique et l’artiste, Réginald Gaillard fait toucher du doigt les forces telluriques qui nous agitent tous.
La Partition intérieure de Réginald Gaillard. Éditions du Rocher. 18,50 euros.
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