Saint Augustin nous rappelle que toutes les prières sont utiles.Le rapport à la prière est plus complexe qu’il n’y parait. Nous avons pu le réaliser dès notre plus jeune âge. Lorsque, malgré toutes nos prières, l’élu de notre cœur persistait à nous ignorer, les zéros en maths à s’accumuler, et la santé de notre grand-mère à péricliter, force a été de constater que la prière n’était pas toujours efficace. À l’âge adulte aussi, les prières déçues se multiplient : prier pour trouver un travail mais rester au chômage pendant des mois, prier pour que notre relation de couple s’arrange mais se séparer quand même. Prier pour trouver le bonheur, sans jamais y parvenir. Alors, à quoi bon tous ces efforts si nos désirs ne se réalisent jamais ?
Dieu nous écoute-t-il vraiment ?
Bien sûr, mais pas forcément comme nous nous l’imaginons. Dieu est souvent perçu, à tort, comme un être invisible dont la mission est de réaliser tous nos vœux. Lors de son Sermon sur la Montagne, Jésus a déclaré : “En priant, ne multipliez pas de vaines paroles, comme les païens, qui s’imaginent qu’à force de paroles ils seront exaucés. Ne leur ressemblez pas ; car votre Père sait de quoi vous avez besoin, avant que vous ne lui demandiez.” Cette déclaration en dit long sur la nature même de la prière. Nos prières n’apprennent rien à Dieu, puisqu’il sait déjà tout. Les païens sont persuadés que la prière est un moyen pour l’Homme d’informer Dieu de ce dont il a besoin. Jésus nous met en garde contre cette conception erronée de notre rapport à Dieu.
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Au contraire. Il ne faut rien demander à Dieu en priant. Il faut reconnaître sa puissance, et sa connaissance de toutes choses sur terre. “Voici donc comment vous devez prier” déclare Jésus dans l’évangile selon Saint Mathieu (6, 9–10) : “Notre Père qui es aux cieux ! Que ton nom soit sanctifié ; que ton règne vienne ; que ta volonté soit faite sur la terre comme au ciel.” Il n’y a aucune naissance ou mort, aucun gain ou perte, ni joie ou tristesse dont Dieu ne soit pas au courant. Comme Jésus le déclare : “Ne vend-on pas une paire de moineaux pour un sou ? Et pourtant, pas un seul d’entre eux ne tombe à terre sans le consentement de votre Père.” Tout arrive par la volonté de Dieu. Jésus affirme à ses disciples : “Quant à vous, même les cheveux de votre tête sont tous comptés. N’ayez donc aucune crainte, car vous, vous avez plus de valeur que toute une volée de moineaux.” Dieu est notre créateur. Il connaît le moindre de nos détails.
Se soumettre à la volonté de Dieu
Mais cette explication laisse cependant une question en suspens : pourquoi prier si Dieu est omniscient et qu’Il connaît nos besoins avant même que nous en ayons nous-même conscience ? Cela dépend de ce que nous attendons de la prière. Si nous espérons changer ce que Dieu a prévu pour nous, alors certes, c’est inutile. Dieu ne change pas d’avis. Mais si nous espérons que la prière nous aide à évoluer au niveau personnel, alors il faut prier comme Jésus nous l’enseigne.
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Il y a plusieurs siècle de cela, saint Augustin expliqua le mystère de la prière chrétienne à une femme noble appelée Proba. Cette jeune veuve en fuite après le sac de Rome, écrivit à saint Augustin pour lui demander conseil à propos de ses prières. Confuse et seule, Proba espérait que les mots de saint Augustin l’aideraient à mettre de l’ordre dans sa vie chaotique. Saint Augustin répondit qu’il lui fallait prier pour une vie heureuse : “Il n’est vraiment heureux que celui qui possède tout ce qu’il souhaite, et qui ne veut rien avoir qu’il ne souhaite pas.”
Quand nous prions pour un idéal de vie heureuse, explique Augustin, nos désirs rejoignent ceux de Dieu et nous rapprochent de lui. Ainsi, nous souhaitons recevoir ce que Dieu veut nous donner, et non plus ce que nous voulons pour nous même. C’est donc en ce sens que la prière nous fait grandir : nos désirs changent au contact de Dieu.
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Nous prions donc toujours, non pour faire connaître à Dieu nos besoins, mais pour désirer ce qu’il veut nous offrir, pour être heureux sur le chemin de la vie éternelle.
Le mystère de la prière décrite par saint Augustin se vérifie même dans les moments de grande détresse. Il n’est pas toujours évident de savoir comment prier lorsque nous devons faire face à des difficultés. Nous avons naturellement tendance à demander à Dieu de soulager notre souffrance. Augustin admet qu’il est tout a fait normal de réagir ainsi. Mais selon lui, il faut parvenir à se soumettre à la volonté de Dieu. Si Dieu ne soulage pas nos peines, il ne faut pas en être offensé. Cela n’est pas une preuve de négligence de sa part. Il faut au contraire endurer la souffrance, puisque sa puissance s’accomplit dans notre faiblesse. C’est ainsi que nous atteindrons un état d’épanouissement personnel.
Il faut donc reconnaître que ce qui nous ce qui nous affecte puisse en fait être le chemin qui nous mène au plus grand bien. Augustin nous incite à prier selon l’enseignement de Matthieu (26, 39) : “Mon Père, s’il est possible, que cette coupe s’éloigne de moi ! Toutefois, non pas ce que je veux, mais ce que tu veux.”
Nulle prière n’est inutile. À tous moments, nos prières sont la preuve de la soumission de nos cœurs à la volonté de Dieu. Créatures d’un Dieu providentiel, nous prions pour ne rien perdre de ce qu’il nous a donné. (Jean 6, 39).