Avant goût du Ciel dans un coin des plaines de la province wallonne, le monastère de Chevetogne est unique en son genre.
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Fondé en 1925 par Dom Lambert Beauduin, cette cité monastique se distingue par la coexistence, dans une seule et même communauté, de deux traditions liturgiques : d’une part celle de l’Occident (rite latin) et d’autre part celle de l’Orient (rite byzantin).
Ayant l’aspiration profonde d’une unité entre chrétiens, la vocation de ce monastère s’inscrit dans une démarche œcuménique que la célébration des deux liturgies inaugure et réalise par un “rapprochement des âmes” que formulait de ses vœux le père Beauduin. Un désir de rapprochement qui n’entre pas en dissonance avec l’identité bénédictine du monastère, bien au contraire.
En effet, saint Benoît, patriarche du monachisme en Occident, s’enracine dans la tradition patristique dont il invoque l’héritage dans sa règle monastique par les “enseignements des saints Pères, dont la pratique amène l’homme jusqu’aux sommets de la perfection” ou encore par les Vies des Pères du Désert et des Institutions de Saint Cassien qui sont d’après lui des “instruments de vertus pour moines vraiment bons et obéissants“. (1)
Des relations avec le monastère orthodoxe du Mont Athos
Cette proximité entre l’identité bénédictine de Chevetogne et l’Orthodoxie se traduit aussi par les relations du monastère avec le Mont Athos.
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En effet, si les relations entre le Mont Athos et les bénédictins cessèrent à partir de la fin du XIIIe siècle — période qui annonçait la clôture de la présence d’un monastère de bénédictins amalfitains sur la sainte Montagne installés depuis le Xe siècle — les moines bénédictins de Chevetogne s’attachèrent à renouer des liens étroits avec ce haut lieu de l’Orthodoxie.
Durant le XXe siècle, plusieurs moines de Chevetogne se sont plongés des mois durant dans le quotidien des moines du Mont Athos dans la perspective de redécouvrir les profondeurs de la spiritualité hésychaste, au cœur même de la règle athonite. (2)
Récusant toute logique d’uniatisme, c’est par l’immersion complète dans la spiritualité orthodoxe que ces moines bénédictins expriment le désir d’un dialogue fondé sur la connaissance mutuelle de l’Occident et de l’Orient chrétiens.
À chaque office au sein du monastère de Chevetogne, les cloches des deux églises latines et byzantines entonnent à l’unisson leurs mélodies qui rappellent la beauté de l’héritage spirituel des « deux poumons » de l’Église. (4)
L’église byzantine se singularise par son son architecture de tradition russe et ses fresques de tradition grecque conjuguant ainsi la beauté de l’art divin à l’histoire du christianisme.
Chaque jour y sont célébrés les matines et les vêpres en slavon, tout comme la Divine Liturgie de saint Jean Chrysostome, le dimanche matin. De plus, la célébration de la Liturgie en slavon permet d’instaurer une certaine proximité avec l’Église orthodoxe russe avec laquelle le monastère entretient des relations fraternelles. Des relations qui se traduisent par des invitations mutuelles en Belgique et en Russie pour mieux se connaître et s’aimer. (5)
L’Église latine, quant à elle, dispose d’un atrium et d’une coupole ornés de deux magnifiques fresques romanes — écrites du talent divin d’un moine iconographe russe — représentant la Jérusalem céleste et le Christ pantocrator. (6)
Également dotée d’une bibliothèque exceptionnelle qui recueille en son sein plus de 150 000 ouvrages, le monastère donne la possibilité à chaque retraitant de s’y documenter et étudier les écrits des Pères de l’Église, les théologies orientales et occidentales, la philosophie…
Les moines de Chevetogne, aussi connus pour être à la pointe dans la polyphonie orthodoxe de tradition russe, ont été amenés depuis les années 60 à réaliser de nombreux enregistrements dont il est toujours possible de se procurer les CDs.
Actuellement, le monastère bénéficie d’un système d’enregistrement qui permet de suivre, à distance, les offices en direct du monastère à partir de leur site Internet. (7) Chacun peut donc, chez soi, écouter les chants de Chevetogne et s’élever vers le Ciel.
Découvrez ce reportage réalisé par KTO, en 2015, sur le monastère de Chevetogne :
https://www.youtube.com/watch?v=Bf4BB8Nt41Q
(1) Cf Règle de Saint Benoit – verset 2 à 7 du chapitre 73
(2) Cf l’article « Pélerins bénédictins au Mont Athos » écrit par Fr. A. Lambrechts dans la revue Irénikon (1998)
(3) L’ « uniatisme » est une conception ecclésiologique qui visait à convertir les orthodoxes au catholicisme. Cette conception est aujourd’hui abandonnée par l’Église catholique depuis la déclaration de Balamand datant de 1993.
(4) Cette expression fut utilisée par saint Jean Paul II dans son encyclique Ut Unum Sint (1995) pour désigner l’Occident et l’Orient chrétiens comme les deux poumons de l’Eglise.
(5) Cf l’article « Les contacts entre l’Église orthodoxe russe et le monastère d’Amay-Chevetogne », écrit par Fr. A. Lambrechts dans la revue Irénikon (2003)
(6) Cf histoire et photos https://www.monasteredechevetogne.com/LatinChurch
(7) https://www.monasteredechevetogne.com/webcast