Ce jeudi 1er juin, l’évêque d’Autun remet le tout premier prix Cardinal Perraud au romancier Marcus Malte. Entretien.
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Aleteia : Pourquoi avoir créé un prix catholique de littérature ?
Mgr Benoît Rivière : Chaque année en France, des œuvres contemporaines sont primées par des grands prix littéraires. Avec un groupe de lecteurs catholiques de notre diocèse, nous pensions non seulement encourager la lecture de la littérature française actuelle, mais aussi récompenser par un nouveau prix l’un des ouvrages déjà primés par un grand prix littéraire. Nous voulions par là soutenir un roman posant de manière fine et admirable la question de l’énigme de la condition humaine aujourd’hui. Et par là, nous pensions simplement honorer une belle œuvre littéraire en laquelle nous-mêmes, avec notre regard éclairé par la foi en la personne du Christ, trouvions matière à nourrir notre espérance et notre recherche d’une vie selon le bien, en quête d’un véritable amour. Nous n’avons pas la prétention de créer un « nouveau prix littéraire catholique » au sens académique du terme, mais plus modestement un prix décerné par un jury de lecteurs catholiques du diocèse d’Autun à un auteur français contemporain déjà primé lui-même par l’un des grands prix littéraires.
Pourquoi l’avoir mis sous le patronage du cardinal Perraud ?
Le cardinal Adolphe Perraud a été évêque d’Autun pendant 32 ans, de 1874 à 1906. Il était historien. Il a connu les débuts de la Troisième République, et les préparations des lois de séparations des églises et de l’État ainsi que le fameux procès Dreyfus. Le cardinal Perraud était membre de l’Académie française, occupant le siège sur lequel sera installé plus tard Henri Bremond, prêtre, historien et critique littéraire, et plus récemment Pierre Gaxotte, historien lui aussi. Le cardinal Perraud académicien, c’était une marque élevée de reconnaissance publique de sa qualité d’homme de culture et d’historien, au-delà de son statut de cardinal. J’ajoute que cet illustre prédécesseur était un homme discret, humble et attentif aux personnes, auteur de nombreuses lettres pastorales.
Marcus Malte a été étonné d’être primé par l’Église. C’est un auteur qui n’est pas spontanément cité parmi les auteurs catholiques de notre temps. Pourquoi mérite-t-il d’être lu ?
Oui, en effet, Marcus Malte a été étonné de se voir décerner notre prix, étonné dans le bon sens du terme. Je me réjouis particulièrement de la rencontre que nous aurons à l’occasion de la remise du prix. Monsieur Marcus Malte n’est pas un auteur « catholique », et ne se situe pas comme tel. Et si nous lisons son roman « Le Garçon », c’est pour y entendre son questionnement d’écrivain se confrontant à la tension, ou plutôt au paradoxe de la condition humaine plongée dans la violence et dans la recherche éperdue du bel amour, plongée dans l’histoire de la guerre et dans le grand désir de vivre après l’horreur. C’est au fond le questionnement silencieux de l’âme qui veut bien s’examiner avec lucidité et espérance tout à la fois.
Vous avez déclaré à l’AFP qu’il « n’y a pas de foi sans culture ». Quel est donc selon vous le lien qui les unit ?
Oui, la foi chrétienne n’est ni hors sol, ni vécue dans un ailleurs de la réalité du monde ; elle n’est pas je ne sais quelle « vapeur cosmique », même parfumée, quelque part au-dessus du monde ! Elle n’est pas destinée à des âmes sans corps ! Elle est la rencontre personnelle, intelligible et confiante, vitale et transformante, avec une personne, Jésus-Christ, en qui s’accomplissent aux yeux des croyants les promesses faites au peuple des hébreux et en qui je peux lire et déchiffrer ma propre histoire. Cette rencontre vient rejoindre pour chacun les racines de sa propre culture ; le fruit et le bonheur de cette rencontre ne sont pas communicables en dehors des cultures du monde.
Propos recueillis par Angélique Provost.