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Comment faire face à l’omniprésence de la grossièreté et de la vulgarité dans notre société ?

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Christophe Levalois - publié le 22/05/17
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Il est un sujet qu’abordent très rarement les hommes politiques, sinon jamais, qui est absent des débats électoraux, et qui pourtant affecte en profondeur et négativement la société : la grossièreté et la vulgarité, sous toutes leurs formes possibles, ainsi que les conséquences de celles-ci, dont la violence et la pornographie. C’est pourtant aujourd’hui une réalité massive, omniprésente et profondément destructrice.

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« Sa bouche est pleine de malédiction,
De tromperie et de violence ;
Il a sous la langue forfait et méfait. »
(Psaume 10 (9) ,7)

La grossièreté gangrène les relations humaines

La grossièreté gangrène les relations humaines. Elle fait partie du paysage sonore quotidien que chacun subit. Elle s’est installée dans le langage à tel point qu’elle n’est guère remarquée, sauf s’il s’agit d’un excès, et semble aller de soi pour le plus grand nombre. Mieux, ou plutôt pire, elle devient posture, voire snobisme, un passage obligé pour faire montre d’un parler supposé vrai et authentique ! En somme la vulgarité s’érige en modèle et un mimétisme écervelé le propage. Les films, les séries, certaines émissions en regorgent, les réseaux sociaux l’étalent.

Peu se posent la question des conséquences d’un tel langage sur tout un chacun. Bien sûr, la grossièreté, qui est aussi un langage, n’est pas ici considérée comme un outil maitrisé, employé sciemment à des fins chirurgicales, mais comme une réalité qui domine et même possède celui qui en use et en abuse. D’une part, ce langage est pauvre, stéréotypé, répétitif, on est très loin de l’argot ou d’expressions populaires à la fois drôles, inventives, colorées, pertinentes tout en étant pleines d’une grande sagesse. D’autre part, il blesse, obscurcit et divise jusqu’au conflit. Mais surtout, trop peu imaginent à quel point les répercussions sont négatives sur la psychologie et plus généralement sur l’âme de chacun. Le mot grossier employé n’est pas un son neutre, il est à l’origine de bien des émotions, de perceptions qui perturbent et altèrent la vie intime, mais aussi parasitent et modifient durablement le regard porté sur le monde et la relation construite avec celui-ci ainsi qu’avec autrui.

Aussi, constater que bien des enfants, dès leur plus jeune âge, subissent ces agressions verbales et gestuelles, quand il ne s’agit pas d’actes, est profondément affligeant, d’autant plus qu’elles installent solidement en eux un terrible handicap, car ils construisent alors leur personnalité en absorbant cette pesanteur destructrice.

Quelle nourriture pour l’âme ?

Cette grossièreté se décline sous tous les modes d’expression de l’être humain. Il y a certes les mots, mais s’y ajoutent aussi les gestes, les attitudes, les images et toutes les productions où les êtres humains se parlent à eux-mêmes et aux autres, plus ou moins consciemment, en écho au présent pour édifier l’avenir.

Tout cela est d’abord une nourriture pour le psychisme et l’âme. En effet, de même que le corps se nourrit de nourritures matérielles qui lui apportent des éléments indispensables à son existence, le psychisme et l’âme se nourrissent aussi d’éléments qui sont eux plus subtils, mais tout aussi importants pour leur édification, pour la vie intérieure présente et son évolution. Si l’on note aujourd’hui une tendance générale à préconiser, à juste titre, une nourriture plus saine pour la bonne santé du corps, par contre, de manière tragique, cette démarche salutaire n’est pas étendue aux autres types de nourritures qui pourtant jouent un rôle tout aussi décisif pour l’être.

L’être humain édifie par ses paroles et ses actes, son univers au quotidien. Quel monde construisons-nous avec de tels mots et de tels modes d’expression marqués par la grossièreté ? Les obscurcissements de la pensée, puis les destructions intérieures qu’ils engendrent finissent par se concrétiser à l’extérieur, de manière tangible, en tragédies, petites et grandes, aussi bien individuelles que collectives.

La pornographie et la violence, installées dans le quotidien

La violence et la pornographie, qui est elle-même une violence associée à la grossièreté, sont très répandues dans notre société et inévitables au quotidien. Cela à tel point que l’on peut considérer que le flot continuel des mots, des images et des actes constitue un véritable harcèlement pour tous. Violence dans les relations humaines, dans les médias, les jeux, les films, les séries, toutes les sortes d’images, etc., trop souvent même hyper violence, car ce gouffre est sans fond ! L’autre, privé du respect, est souvent soit un gibier, un domestique, voire un esclave en puissance ! Violence des mots, des gestes, des images, des sonorités, des actes. Tout est lié. Le monde que l’on construit décline ensuite l’esprit qui l’habite sous ses multiples aspects.

La pornographie est un fléau qui ne cesse de se développer en inondant les différents vecteurs de communication tout en se banalisant. Elle est parfois explicite, d’autre fois implicite et insidieuse. Pourtant, depuis bien des années des rapports tirent la sonnette, notamment pour les enfants, concernant le déferlement de la violence et de la pornographie diffusées par les différents médias et l’impact ravageur sur les comportements. Ce fut le cas, par exemple, en 2002, dans deux rapports, l’un commandés par le ministre de la Culture et de l’Information, l’autre par le ministre de la Justice. Récemment, un sondage de l’Ifop, pour l’Observatoire de la parentalité et de l’éducation numérique (OPEN), publié en mars 2017, révélait que « la moitié des adolescents âgés de 15 à 17 ans ont déjà surfé sur un site pornographique (51%) ». Un pourcentage en hausse par rapport à un sondage effectué il y a quatre ans où il s’établissait à 37%. Le même sondage montre aussi que pour près d’un adolescent sur deux (45%), le film pornographique a participé à l’apprentissage de sa sexualité… Aussi le décret de la ministre de la Culture, en février dernier, stipulant que les films avec des scènes de sexe non simulées ne seront pas automatiquement interdits aux mineurs suscite l’incompréhension et ne va assurément pas dans le bon sens.

« À chacun je demanderai compte de la vie de son frère » (Genèse 9, 5)

Les mots ouvrent le chemin aux gestes et aux attitudes, ils accaparent et stimulent les pensées, pour finir, au terme de cette logique, par des actes d’une violence parfois extrême dont les effets destructeurs pour la personne peuvent persister durant tout le restant de l’existence.

Les grossièretés enferment peu à peu l’être dans un monde à l’image de celles-ci. Ce n’est pas une libération, ni une croissance, encore moins une élévation, mais une chute et un emprisonnement dans la souffrance et l’absurde, car l’horizon se dérobe toujours plus et le sens disparaît. De plus, sans respect de l’autre, pas non plus de véritable respect de soi-même… agonie continuelle de l’âme !

L’éveil d’une nouvelle conscience partagée par le plus grand nombre, des citoyens et des responsables politiques, est indispensable. Celle-ci commence par la prise de conscience de l’ampleur de ce phénomène, de ses effets ravageurs et de ses conséquences dramatiques ; les chiffres très élevés des violences diverses et des agressions sexuelles ainsi que des viols témoignent du caractère massif de cette réalité. Elle se concrétise par la capacité de chacun à dire « non » et à être vigilant, y compris et d’abord vis-à-vis de soi-même, aux grossièretés, à la vulgarité des gestes et des comportements, aux émissions, films, images et textes qui s’en font les serviteurs, et « oui » à ceux qui œuvrent pour le respect, en paroles et en actes, de la personne. Il y a urgence !

 

la royauté et le sacré de Christophe Levalois est paru aux éd. du Cerf

La royauté et le sacré de Christophe Levalois est paru aux éd. du Cerf

Christophe Levalois est l’auteur de La royauté et le sacré, paru au Cerf dans la collection leXio en 2016, 128 p. 10 €

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