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Détresse, mal de vivre : qui consulter, le prêtre ou le psy ?

séance chez le psy

psycho/shutterstock

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Ryta Rudzka - publié le 17/03/17
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Face aux épreuves, de (trop) nombreux catholiques imaginent qu’il faut se contenter de porter sa croix et s’interdisent le divan. Or pour s’en sortir, parler à la fois avec un prêtre et avec un psy est salvateur.

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Certaines personnes cachent parfois des vies très difficiles, des histoires lourdes derrière une façade catholique policée. Pour peu qu’elles se comparent aux voisins, aux amis qui connaissent, eux, des épreuves visibles  -perte d’un enfant, maladie au long cours, handicap…- ces personnes-là imaginent que leur croix à elle est bien légère par rapport à celle des autres et qu’il n’y a pas de raison de se plaindre et encore moins d’aller consulter.

Or il n’est pas rare, hélas, de lire des histoires tragiques dans les journaux. Comme celle de cette femme qui a fait subir l’impensable à ses enfants avant de se suicider. Son entourage était choqué. Personne n’arrivait à croire qu’elle ait pu faire une chose pareille. Ils étaient tous toujours si bien habillés et propres sur eux. Ils allaient à l’église tous les dimanches. Tout le monde semblait si heureux dans cette famille. Et pourtant, un jour, elle a volontairement laissé le gaz allumé. Les gens ont alors dit, “c’est l’oeuvre du diable !” Autre fait divers, celui de ce père de famille nombreuse, charmant d’après les voisins, invivable selon sa femme laquelle, après des années de mariage, ayant pris son courage à deux mains malgré un sentiment de culpabilité judéo chrétienne, ose lui annoncer qu’elle souhaite divorcer. Le mari le prend étonnement bien, demande d’attendre le retour de leur progéniture pour leur expliquer. Et le soir, une fois tout le monde à la maison, les tue tous.

Derrière ces histoires morbides, se cachent des troubles psychologiques très profonds. Souvent, les personnes qui en souffrent ne comprennent pas ce qui leur arrive. Et l’entourage proche, pensant faire son devoir, encaisse sans rien laisser paraître. Sans arriver jusqu’à ces situations extrêmes, certains patients catholiques disent ne pas avoir besoin de voir un psy voire ne pas croire en la psychothérapie. Or il ne s’agit pas de croyance mais de compétence.

Il peut être dangereux de se cacher derrière sa foi

Malgré sa souffrance, cette maman n’a pas demandé d’aide. Elle avait probablement honte, pensait que ces sentiments n’étaient pas normaux, et avait peur de ses propres réactions. Elle a commencé à avoir des hallucinations et à entendre des voix. Puis elle a négligé son apparence, a cessé de voir ses amies, sous prétexte d’être trop fatiguée. Son bébé pleurait toute la nuit, cette fatigue constante n’a donc pas semblé suspecte à son entourage. A force de nuit blanche, la fatigue accumulée a permis à des pensées malsaines de s’infiltrer dans son esprit. “C’est mon fardeau et je dois le porter. Je ne mérite ni d’être heureuse ni d’avoir un enfant. Je mérite d’être punie.”

Beaucoup de catholiques sont convaincus qu’il s’agit d’un problème de foi et non de santé mentale. “Un jour, raconte une psychothérapeute, un patient m’a raconté qu’il perdait facilement patience et avait régulièrement des accès de violence envers ses enfants. Il m’ a dit qu’il allait se confesser, afin de se repentir de ses actes et promettait de ne jamais recommencer. Mais il ne pouvait pas s’en empêcher et s’emportait de nouveau contre ses enfants. Il entrait alors dans le cercle vicieux de la culpabilité. Ils s’en voulait, et au lieu d’essayer de comprendre ce qui lui arrivait, il se punissait. Il se privait de tout, s’interdisait d’acheter quoique ce soit, ne sortait plus avec ses amis. Mais ce comportement ne l’aidait pas. Il se disait qu’il s’était égaré du chemin de la foi et que c’était la raison de sa faiblesse. Il s’en voulait alors de s’apitoyer sur son sort au fond de son lit alors qu’il aurait dû tout faire pour se rapprocher de Dieu”.

Faire la différence entre problèmes psychologiques et problèmes spirituels

Ces patients-là ne pensent pas avoir besoin d’aide psychologique et c’est là que cela devient dangereux. La peur et la honte d’aller voir un psy sont encore très largement répandues. Certains, face à la persistance de leurs problèmes malgré leurs prières, préfèreraient presque aller voir un exorciste plutôt qu’un psychiatre. Or un prêtre peut être un soutien moral très important mais il ne remplacera jamais un médecin. Bien sur, la confession peut faire partie de la thérapie. Admettre ses fautes permet d’apaiser un sentiment de culpabilité. Mais c’est une solution à court terme car cela ne résout pas le problème. Tant que le mal n’est pas traité à la racine, les difficultés continueront de s’accumuler et la douleur persistera.

La confession est un acte de foi. La thérapie est un travail sur soi qui peut prendre beaucoup de temps. Aider une femme à comprendre pourquoi elle endure un mari alcoolique, ou les raisons d’un amour extrêmement possessif, ou encore la nature d’une honnêteté parfois agressive, peut être très difficile. Il est important de faire la différence entre les problèmes spirituels et les problèmes psychologiques. Au lieu de se sentir coupable en permanence, de souffrir et d’être en conflit avec soi même, il est crucial d’admettre que le problème n’est pas spirituel mais psychologique. Vous ne vous êtes pas égaré du chemin de la foi, vous êtes malade ou bien vous acceptez une situation personnelle inacceptable. Le péché de gourmandise peut s’avérer être de la boulimie, la fainéantise un signe de dépression et la vanité la preuve de troubles névrotiques. Des “pensées impures” a répétition peuvent être diagnostiquées comme des troubles compulsifs obsessionnels.

Les cathos ont autant besoin de consulter que les autres !

Devraient consulter un psy, toutes les personnes qui n’arrivent plus à gérer leurs émotions et qui sentent que cela représente un risque pour leur entourage. Généralement, ces personnes ne sont pas réceptives lorsqu’on leur demande ce qui ne va pas. Elles considèrent que leurs émotions sont très personnelles et que c’est à elles seules de se débrouiller avec ce fardeau. Mais lorsque vous avez mal aux dents, vous n’allez pas chercher une paire de pince pour soignez cette carie vous même, vous allez chez le dentiste ! C’est exactement la même chose avec les problèmes psychologiques. Si vous vous isolez de votre entourage, vous sentez désespéré sans raison valable et si des pensées suicidaires vous traversent l’esprit, vous devriez absolument consulter un médecin. Le psychiatre n’est pas Dieu. Nous n’avons pas besoin de croire en lui pour avoir confiance en ses connaissances médicales. Il ne faut pas avoir honte de souffrir de névroses ou de problèmes mentaux. Mais nier ses problèmes et refuser l’aide de quelqu’un de compétent est irresponsable. Un médecin ne jugera pas votre état, votre situation, il essaiera de vous comprendre et de vous aider.

Un  catholique ne doit pas choisir entre une aide religieuse et une aide médicale. Les pratiques thérapeutiques et religieuses ne sont pas en compétition. Au contraire, elles se complètent. Il est important de parler de votre traitement à votre confesseur car cela lui permettra de mieux comprendre vos actes, et d’appréhender différemment vos sentiments de culpabilité, de regret voire votre besoin de punition.

Un bon psy ne rejette pas la foi de son patient. Il sait que c’est une valeur fondamentale pour lui et que le soutien d’un prêtre ou d’un groupe de prières peut l’aider. Le patient et son entourage ne doivent pas se sentir stigmatisés ou exclus. Il peut arriver que les troubles psychologiques puisent leur nature dans la religion, auquel cas le psychiatre peut être mis en relation avec le prêtre.

Comme le disait sainte Thérèse de Lisieux “il faut toujours prier comme si l’action était inutile et agir comme si la prière était insuffisante”.  Prier et consulter, CQFD !

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