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Birmanie : de la souffrance à la révolte

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Michel de Remoncourt - publié le 19/02/17
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De nombreux ingrédients sont réunis pour favoriser l’émergence d’une insurrection violente. (2/2)

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Lire la 1ère partie : La Birmanie en proie à un violent conflit religieux


Si la situation décrite dans la première partie montre bien que tous les ingrédients propices à une réaction violente sont réunis, une politique adéquate du gouvernement aurait pu tenter d’inverser la tendance. Malheureusement les deux parties semblent se diriger vers une dangereuse escalade de tensions.

L’émergence d’une nouvelle résistance violente et organisée

Le 9 octobre 2016, plusieurs centaines de musulmans locaux, armés de couteaux, lance-pierres et seulement trente armes à feu, se sont lancés à l’assaut de trois postes de police (BGP ou Border Guard Police) : neuf policiers et huit assaillants ont été tués, deux capturés, soixante-deux armes à feu et 10 000 munitions ont été volées. Ces attaques marquent un tournant majeur dans l’escalade de la violence au Rakhine : d’autres attaques le 12 novembre et les escarmouches les jours suivants ont révélé un niveau de planification sans précédent : usage de contre-guérilla, EEI (Engin Explosif Improvisé), etc. Le gouvernement birman doit donc maintenant faire face à un groupe organisé, possédant une solide ressource humaine mais surtout économique. Le groupe est ainsi commandé depuis l’Arabie Saoudite et possède des relais expérimentés sur le terrain, formés notamment en Afghanistan ou au Pakistan.

Une réponse d’État disproportionnée et dangereuse

La police semblant dépassée, les opérations sont maintenant menées de manière combinée avec l’armée. Celle-ci a révélé mener des « opérations de nettoyage de zone », en appliquant la technique des « four-cuts » développée dans les années 1960 et qui vise à priver les rebelles des quatre supports essentiels (nourriture, argent, renseignement, recrues). Il s’agit là d’une véritable « politique de terreur calculée » visant à déplacer des populations, détruire des villages, saisir ou détruire les réserves de nourriture. Malheureusement ces actions indiscriminées touchent aussi de plein fouet les populations. S’y ajoute la mise sur pied de milices locales, information confirmée par des enquêtes de terrain. Des vidéos de combat et des images satellites prouvent que les civils sont autant visés que les rebelles en arme. Le 12 novembre à 6h45, les troupes gouvernementales prises à partie se sont repliées, appuyées par des hélicoptères d’attaque qui ont fait de nombreuses victimes, femmes et enfants.

Un rapport de l’ONU accablant

Le haut commissariat des Nations-Unies aux droits de l’homme (HCDH) a dépêché une équipe d’observateurs sur place, bien que l’accès à la zone soit difficile et souvent limité. Les conclusions de cette mission ont été publiées dans un rapport le 3 février dernier. Parmi les observations, l’équipe a conduit 204 entretiens auprès de réfugiés : 26 ont été blessés, 91 ont perdu un membre de leur famille, 96 n’ont plus de nouvelles d’un de leurs proches, 89 ont été passés à tabac, 50 % des femmes avouent avoir subi des violences sexuelles (dont viol), 102 ont vu leur maison brûler. Certains cumulent plusieurs des maux cités…

La liaison maritime vers le Bangladesh a été coupée par le gouvernement, empêchant le départ des réfugiés. La plupart de l’aide humanitaire (nourritures, médicaments) est bloquée et l’accès au secteur reste fortement restreint. Cette zone n’est pour l’instant pas une priorité pour le djihadisme international, mais les événements conduisent inévitablement à la radicalisation du conflit. En stratégie, déjà Sun Tzu rappelait qu’il faut laisser une porte de sortie à son adversaire, sous peine de le voir lutter à mort comme une bête prise au piège (chapitre 7 de l’Art de la Guerre). Et c’est ce sentiment qui peut à peu s’étend. Et comme à chaque fois, ce sont les populations qui en feront les frais.

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