Découvrez de nouvelles oeuvres majeures, indisponibles depuis le XIXe siècle, de celui qui fut un maître spirituel au temps de Louis XIV.
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On trouve ici ou là, dans Magnificat par exemple, un texte de méditation signé Bossuet. Un passage d’un sermon ou d’une oraison funèbre ? Non. Référence tout autre. Ne le cachons pas : Bossuet, le prélat du Grand Siècle est aujourd’hui oublié. Respecté, mais ignoré. Il est vrai que l’œuvre de cet infatigable travailleur est un monde. Ses condisciples l’avaient vu en jouant sur son nom latinisé, Bos suetus (aratro), un bœuf fait pour la charrue : prédicateur, précepteur, historien, directeur de conscience, polémiste et avant tout évêque voué à son diocèse de Meaux.
Heureuse surprise : dans la collection “Bouquins”, Renaud Silly, dominicain, donne un ensemble de textes de Bossuet à peu près inaccessibles, en les présentant avec hauteur de vue et les connaissances appropriées qui jettent une vive lumière sur ce que ces œuvres de toute nature doivent à son imprégnation biblique.
En ouverture, comme la clé d’une partition, le texte Sur la brièveté de la vie et le néant de l’homme écrit par Jacques-Bénigne à la veille de son ordination au sous-diaconat : il avait 21 ans. Puis les douze sermons du Carême de Saint-Germain (1666) éclipsés, bien à tort, par les sermons du Carême du Louvre (1662). Voici alors le cœur du recueil : Élévations à Dieu sur tous les mystères de la religion chrétienne et Méditations sur l’Évangile, écrites les unes et les autres pour des religieuses de son diocèse, bénédictines de Jouarre, visitandines de Meaux.
Aisance de la plume, abondance du cœur. « Cela ne me coûte aucune application et me délasse plutôt. » Mille pages ! Et des titres qui font un peu peur ! Et bien non, profonde erreur. Ces textes, brefs, un quart d’heure de lecture, estime Bossuet, peuvent faire usage de prière quotidienne sur deux années ou presque. Les premières suivent la Bible de la Genèse aux Évangiles de l’enfance, les secondes, qui s’ouvrent avec les Béatitudes, portent sur toute la vie publique du Christ. Pourquoi sont-elles si prenantes ? Parce que, pourvues des « sortilèges d’une langue somptueuse » (R. Silly), elles révèlent les trésors cachés de l’Écriture.
Suivent des textes encore moins connus, dont trois courageuses lettres à Louis XIV (1675 et 1676) pour l’inviter à se séparer de ses maîtresses au nom de la sainteté royale qu’il se doit d’incarner. Les sentences et maximes glanées par le précepteur pour apprendre à lire au Dauphin (une bonne centaine ; la seconde, tirée de la Cyropédie, montre qu’il pense aussi au père : « Il se faut, disait Cyrus, approcher des belles femmes avec plus de crainte que du feu. Car le feu ne brûle que ceux qui le touchent au lieu qu’elles brûlent même ceux qui ne font que les regarder »). Enfin une série d’opuscules, dont son Discours de réception à l’Académie française.
Le père Silly a cru bon d’ajouter les vers que composait Bossuet à la fin de sa vie, traduction des Psaumes, extraits du Cantique des cantiques. Ils ont l’avantage de prouver que, s’il savait versifier, comme tous ceux de son temps, il n’était poète et sublime que dans la prose qu’il répandait de la chaire.
Bossuet, Élévations sur les mystères, méditations et autres textes, Édition établie et présentée par Renaud Silly o.p. Coll. “Bouquins” Robert Laffont, 1676 p., 35 euros.