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Le combat s’annonçait comme une mêlée générale où les coups seraient portés sans ménagement, directement dans l’estomac, à même la viande. Les corps à corps devaient être violents et les adversaires s’échanger des estocades résonnantes. Ce devait être concret, physique, saignant, jupitérien. On avait convoqué la foule dans les gradins de l’arène pour lui donner son lot de spectacle afin qu’elle puisse défouler ses passions démocratiques.
Seulement voilà, lorsque la grille par où devaient paraître les gladiateurs s’ouvrit, alors que toute l’assemblée retenait son souffle, une silhouette diaphane et insaisissable parut. Ses contours étaient flous, comme brouillés – on parvenait à peine à la distinguer du décor dans lequel elle se dessinait imprécisément. C’était quelque chose, assurément, mais quoi ? Nul n’aurait pu le dire. Le regard peinait à suivre ses mouvements imprévisibles. Tantôt à droite, tantôt à gauche, il gambillait avec aisance, improvisant une danse incompréhensible devant la foule médusée. “C’est un hologramme !” hurla un jeune enfant juché sur une ballustrade, en pointant l’énigmatique créature du doigt.
Relire le premier épisode : « Benoît et Manuel, un fauteuil pour deux »
Les autres gladiateurs, qui avaient aiguisé leurs sabres, lustré leurs massues et graissé leurs fléaux, se trouvèrent parfaitement dépourvus. L’un essaya de piquer le fantôme au flanc du bout de sa dague, mais la lame traversa la matière vaporeuse dont il semblait constitué. Un autre lui asséna un coup de marteau sur le crâne de la main droite, tentant en même temps de lui sectionner la gorge d’une faucille qu’il tenait dans la main gauche ; rien n’y fit, les instruments, aussi dangereux fussent-ils, lui passaient au travers. “C’est insensé ! Il n’existe pas !” grogna l’un d’eux, qui se décourageait à force de cogner dans le spectre. Ce dernier se tourna alors vers la foule et prononça d’une voix d’adolescent : “La culture française n’existe pas ! ».
Dans les gradins, la stupéfaction maintenait les spectateurs dans un silence de plomb, qui fit croire à de la subjugation, voire à de l’admiration. “Je suis pour la libération des talents !”, poursuivit-il avec le même aplomb, tandis qu’un sourire béat mais conquérant illuminait son visage. “Nous ferons un chemin !” cria-t-il avec assurance, seul au milieu de tous, les bras écartés et le visage légèrement relevé vers le ciel. Comme en transe, il paraissait seul face à un ciel éloigné où s’inscrivaient d’indéchiffrables formules éthérées. “Je veux réconcilier nos histoires !”, se mit-il alors à hurler, dans une folle extase, les yeux presque révulsés.
Relire le deuxième épisode : « Penelope, la désœuvrée »
Tout autour, l’arène commençait déjà à se vider, mais les spectateurs, une fois parvenus aux portes du colisée, trouvèrent celles-ci jalousement closes. On vérifia un peu partout : il n’y avait pas d’issue. On tenta d’escalader les portails, de creuser sous les murailles et même de faire passer un enfant par une fenêtre pour qu’il débloque l’accès depuis l’extérieur – impossible de sortir. Le bâtiment était condamné de toute part, semblable à une immense prison où résonnait inlassablement la voix extatique de l’hologramme qui continuait de réciter des phrases dépourvues de sens. “En marche ! Mes amis, en marche !”, scandait-il de temps à autres. Mais chacun sentait au fond de lui qu’il n’y avait déjà plus grand endroit où aller.