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François Fillon, une affaire d’État ?

© AFP PHOTO / Tobias SCHWARZ

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Alexandre Meyer - publié le 07/02/17
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Le candidat est-il la victime innocente d’un lynchage médiatique savamment orchestré ? (1/2)

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Avant de nous demander à qui profite le crime, il convient de passer en revue les accusations lancées contre François Fillon et de jauger leur crédibilité, mais aussi leur importance.


1. Penelope Fillon, très chère assistante parlementaire ?


Après avoir évoqué la somme de 500 000 euros, Le Canard enchaîné chiffre à 831 440 euros bruts la somme perçue par Penelope Fillon comme assistante parlementaire de son mari ou de son suppléant Marc Joulaud (édition du 01/02/2017). Des rémunérations portant sur les périodes de 1988 à 1990, de 1998 à 2002, de 2002 à 2007, ainsi qu’en 2012 et 2013.

D’octobre 2005 à décembre 2006, la fille aînée des Fillon a touché 57 084 euros brut, soit environ 3 800 euros brut par mois pendant quinze mois. Leur fils Charles a quant à lui perçu 26 651 euros brut de janvier à juin 2007, soit 4 846 euros brut par mois.

François Fillon pouvait-il embaucher son épouse et ses enfants ?

“Les faits évoqués sont légaux et transparents” (François Fillon lors de sa conférence de presse du 6 février). Les parlementaires rémunèrent leurs collaborateurs en puisant dans une enveloppe mise à leur disposition par l’une ou l’autre assemblée. Si l’Assemblée nationale prend en charge la gestion du contrat de travail et paye les charges sociales, le montant mensuel de ce budget est de 9 561 euros par député, et de 14 341 euros s’il gère lui-même le contrat de travail et s’acquitte des cotisations patronales.

Rémunérer ses proches à des postes laissés à discrétion de l’élu est une pratique commune dans le microcosme politique : “La pratique est courante, non interdite par la loi et connue de la presse depuis des lustres”, avance Régis des Marais sur Médiapart.

Le même site a fait le décompte : l’Assemblée a rémunéré 52 épouses, 28 fils et 32 filles de députés en 2014. Sans parler des maîtresses ou des amants.

“Si François Fillon est si mauvais [dans sa défense], c’est qu’il ne comprend pas ce qu’on lui reproche, et s’il ne comprend pas, c’est qu’à aucun moment il n’a eu le sentiment de commettre une faute. Il faut essayer de se mettre à sa place. D’abord, tout le monde le fait – au Parlement européen, où il est interdit d’embaucher sa famille, les élus échangent volontiers, semble-t-il, conjoints et enfants” abonde Elisabeth Lévy dans Causeur.

S’agit-il d’une rémunération de complaisance ou d’un emploi fictif ?

Entre 1988 à 2013, madame Fillon a été rémunérée pour un montant de 830 000 euros brut. “Soit 3 677 euros net sur 15 ans” précise François Fillon lors de sa conférence de presse du 6 février. “Un salaire cohérent avec son niveau d’étude et ses diplômes.”

En vertu du principe de séparation des pouvoirs – rappelé par le candidat d’un ton pugnace devant les journalistes – le juge ne peut connaître que de la validité des contrats de travail qui lient l’assistant parlementaire à son député et de la réalité du travail effectué. En aucun cas, il ne peut apprécier la nature de ce travail.

“Mon épouse a pris en charge les tâches simples mais essentielles : courrier, agenda, réunions, représentations” ajoute toutefois le candidat, voulant faire preuve de “cette transparence qui devrait s’appliquer à tous… Mes enfants ont perçu en moyenne 3 000 euros net mensuels, des sommes déclarées et imposées.” Et l’ancien Premier ministre de détailler en direct les activités de l’un comme de l’autre pour balayer les soupçons.

Vincent Goyet, conseiller municipal à Saint-Mitre-les-Remparts et ancien attaché parlementaire va dans le sens du candidat de la droite sur Facebook :

Le travail est gigantesque. (…) J’ai croisé des dizaines et des dizaines de parlementaires, davantage encore de collaborateurs, et la plupart d’entre eux sont des passionnés, qui ne comptent pas leurs heures. De même, il est inimaginable qu’un élu fasse une carrière politique durant 35 ans (François Fillon a été élu pour la première fois en 1981) sans que sa / son conjoint(e) ne lui apporte au quotidien un soutien et une aide de tous les instants, surtout si elle / il n’a pas une autre activité professionnelle à côté.”

Ses indemnités de licenciement sont-elles indues ?

Le Canard enchaîné poursuit ses révélations et dévoile dans son édition à paraître ce mercredi 8 février, le montant des indemnités de licenciement perçues par Penelope Fillon. Une information gracieusement fournie par les policiers chargés de l’enquête diligentée par le parquet national financier (voir la deuxième partie de notre dossier). Ces indemnités sont parfaitement légales : le contrat de travail des collaborateurs parlementaires prévoit, dans son article 8, que « la cessation, pour quelque cause que ce soit, du mandat du député-employeur, constitue une juste cause de rupture du contrat ». Ainsi, lorsque le député quitte son mandat prématurément (s’il devient ministre) ou s’il n’est pas réélu, ses collaborateurs sont licenciés. La procédure et les modalités sont les mêmes lorsqu’un ministre quitte son mandat et reprend son poste à l’Assemblée pour les collaborateurs du député suppléant. Le licenciement doit néanmoins respecter les règles de procédure prévues par le code du travail, c’est à dire le versement d’une indemnité, déterminée d’après la formule de calcul légale. Elle bénéficie d’exonérations sociales et fiscales.

Leur montant est-il trop élevé ?

Mme Fillon a touché à deux reprises des indemnités de départ : 16 000 d’euros en 2002 et 29 000 euros en 2013 selon le Canard. Citée par Le Monde, Marianne Darmon, coprésidente du Cercle des collaborateurs et attachés parlementaires de l’Assemblée nationale, assistante parlementaire du socialiste Christophe Borgel, député de Haute-Garonne, reconnaît elle-même que « les sommes évoquées paraissent possibles. On peut ajouter à ces indemnités les mois des congés non posés ou encore la prime de précarité à laquelle peuvent prétendre les collaborateurs parlementaires. »

 


2. Penelope Fillon et la Revue des deux mondes


Penelope Fillon a été salariée, entre mai 2012 et décembre 2013, de la Revue des deux mondes, propriété de Marc Ladreit de Lacharrière, PDG de Fimalac et ami de François Fillon (premières révélations du Canard enchaîné du 25/01/2017).

L’épouse de l’ancien Premier ministre a perçu 5 000 euros brut par mois pour cet emploi. Elle “a bien signé deux ou peut-être trois notes de lecture”, mais “à aucun moment (…) je n’ai eu la moindre trace de ce qui pourrait ressembler à un travail de conseiller littéraire”, affirme Michel Crépu, directeur de la revue à l’époque, dans les colonnes du Canard.

Est-ce légal ?

Pas si le travail s’avère aussi faible que le soutient Michel Crépu, mais nous n’en savons strictement rien. L’infraction « d’abus de biens sociaux » est caractérisée dès lors que la réalité du travail effectué par le salarié n’est pas établie. C’est la raison pour laquelle le parquet financier s’attache en ce moment même à faire toute la lumière sur la collaboration de madame Fillon à la Revue.

Les dépenses de toute société doivent être conformes à l’intérêt et l’objet de l’entreprise tels qu’ils sont définis dans les statuts. La loi a donné au juge pénal le pouvoir de l’apprécier. Le salaire d’un emploi fictif (versé sans contrepartie de travail effectif) est un abus de bien social dans la mesure où il est une charge déductible aux conséquences fiscales, qu’il lèse les actionnaires et le fisc.

Les auteurs d’abus de biens sociaux encourent 5 ans d’emprisonnement et 375 000 euros d’amende (L 241-3 et L242-6 du code de commerce). L’épouse de l’ancien Premier ministre et Marc Ladreit de Lacharrière auraient-il couru un tel risque ? C’est très peu crédible.

Suivons jusqu’au bout l’hypothèse défendue par la presse d’un salaire de complaisance. Ne pouvait-il pas offrir cette somme à Penelope Fillon ? Le don d’une somme d’argent entre deux personnes sans lien familial, est soumis à des droits de donations fixés à 60 %. Si M. de Lacharrière avait voulu gratifier madame Fillon de 100 000 euros, il lui en aurait coûté 160 000. Une paille pour un milliardaire et sans le moindre risque pénal. Mais une option dont on mesure le ridicule.


3. François Fillon et sa très lucrative société 2F Conseil


François Fillon a fait enregistrer le 6 juin 2012 au greffe du tribunal de commerce de Paris, la société d’études et d’analyse 2F Conseil.

Est-ce légal ?

La loi interdit à un parlementaire de travailler en tant que consultant, sauf s’il exerçait l’activité avant le début de son mandat, ce qui est le cas de François Fillon, qui a fait enregistrer sa société au greffe quelques jours avant son élection comme député de Paris (le 17 juin 2012), échappant ainsi à cette interdiction.

Une rémunération mirobolante ?

Dans son édition du 30 novembre 2016, Le Canard enchaîné avait révélé que cette « petite entreprise » aurait rapporté au député de Paris, « 624 000 euros de salaire net entre juin 2012 et décembre 2015 », auxquels s’ajoutent « 133 000 euros de bénéfices ».

L’activité de conseil de l’ancien Premier ministre lui a donc rapporté 14 850 euros net par mois en moyenne entre son départ de Matignon et la fin 2015. À titre de comparaison, le traitement d’un Premier ministre s’élevait avant la réforme d’août 2012 à 21 300 euros brut par mois, soit sensiblement la même chose.

François Fillon est-il bien rémunéré en tant que consultant ? L’ancien Premier ministre Tony Blair, à l’instar du l’ancien président Nicolas Sarkozy, facturent chacun 100 000 euros la conférence internationale. La société de conseil d’Alain Minc, soutien affiché du candidat Emmanuel Macron, a réalisé pour la seule année 2015 un chiffre d’affaire de près de 6 millions d’euros (autant que le cabinet d’avocats de Nicolas Sarkozy) et enregistré un bénéfice net de 2,4 millions.

Des clients sulfureux ?

“J’ai exercé une activité de conseil et plus particulièrement de conseil aux entreprises. J’ai donné des conférences en Russie à titre gratuit” (François Fillon lors de sa conférence de presse du 6 février).

Monsieur Fillon a tiré de son activité de conseiller par le biais de sa société auprès du groupe Ricol-Lasteyrie, une rémunération annuelle comprise “entre 40 000 et 60 000 euros” (toujours selon le Palmipède), et serait membre du comité stratégique de cette entreprise.

Son co-fondateur, René Ricol, fut nommé commissaire général à l’investissement à partir de 2010, directement rattaché au Premier ministre et chargé à ce titre de gérer les 35 milliards du grand emprunt lancé par la majorité d’alors. Cité par Libération, il explique la collaboration de l’ancien Premier ministre avec son entreprise : « En 2012, (…) nous nous sommes engagés dans un rapprochement avec EY, l’un des leaders mondiaux de l’audit, et nos “senior advisors” – parmi lesquels François Fillon –, nous ont été très utiles pour nous dire comment ils voyaient les choses ». Il était alors difficile d’imaginer que François Fillon, en berne dans les sondages, jouerait un rôle de premier plan dans la campagne présidentielle, ajoute le quotidien. François Fillon “assistait à des réunions et des entretiens, physiquement, mais il n’a pas produit de notes ou de documents pour nous. Ce n’était pas sa mission”.

S’agit-il d’un délit ?

Le droit français ne pose presque aucune limite à l’exercice d’une activité professionnelle par un ministre quittant ses fonctions. Seules sont interdites par l’Ordonnance n° 58-1099 du 17 novembre 1958 et pendant six mois seulement, les fonctions de direction exercées dans des sociétés dont l’activité est sous la dépendance de l’État ou relève du secteur de la finance ou de la construction.

Le délit de prise illégale d’intérêts à la cessation des fonctions d’un fonctionnaire ou agent de l’administration publique, sanctionné par le Code pénal (article 432-13), veut limiter les possibilités de “pantouflage”.

Le fonctionnaire ou agent d’une administration publique qui a assuré la surveillance ou le contrôle d’une entreprise privée, ou a conclu des contrats avec elle, se voit interdire de “prendre ou de recevoir une participation par travail, conseil ou capitaux” dans cette entreprise avant l’expiration d’un délai de trois ans suivant la cessation de ses fonctions.

Le Premier ministre n’ayant pas supervisé les activités du groupe Ricol-Lasteyrie pendant ses fonctions. Il est donc parfaitement libre de lui proposer ses services.


4. François Fillon et son micro-parti aux maxi-revenus


La primaire de la droite et du centre a rapporté plus de 9 millions d’euros, qui sont venus remplir les caisses de l’association de financement du candidat Fillon. “Cet argent, récolté dans le cadre d’une primaire pour le vainqueur de la primaire, pourrait-il aller à un autre concurrent ? Je ne sais pas”, se demande Daniel Fasquelle dans le JDD.

La réponse est non. Cinquante collaborateurs ont déjà été embauchés pour sa campagne. Le candidat élu a déjà tenu des meetings et lancé sa campagne de tracts.

Vincent Chriqui, trésorier de campagne de François Fillon, revendique “lever des fonds pour l’action politique de François Fillon et de l’ensemble de la droite et du centre”. Selon lui, “cela peut passer par différents canaux”. En effet, le parti Les Républicains conserve ses propres appels aux dons.

Est-ce légal ?

La réponse est oui. Le micro-parti, parti fonctionnant au bénéfice d’un seul élu, est légalement un parti comme les autres. Il est donc une association devant se soumettre à la loi de 1988 (révisée en 1995) sur le financement et la transparence de la vie politique, reconnue par la Commission nationale des comptes de campagnes et des financements politiques (CNCCFP) comme formation politique, La transparence financière est donc obligatoire.

Quel est son intérêt ?

Les dons ou bénéfices des partis sont limités à un plafond. Dès lors, la création d’un ou de plusieurs micro-partis permet de multiplier les sources de financements.

Le micro parti offre une flexibilité et une indépendance très précieuse à l’élu désireux de bénéficier d’un financement direct.

Le micro-parti peut être financé par des ressources privées (cotisation ou dons déductibles à 66 % jusqu’à 7 500 euros).


5. Ce qui reste à éclaircir


L’interview de madame Fillon

Dans une interview au Guardian, en parlant de la carrière politique de son mari, madame Fillon affirmait “n’avoir jamais été son assistante ou quoi que ce soit de ce genre”. François Fillon affirme que la journaliste ayant fait l’interview se dit “choquée” de l’exploitation hors contexte de celle-ci.

Effectivement, la journaliste a demandé que la phrase de Penelope Fillon ne soit pas utilisée “hors contexte”. Cependant, la journaliste ne se dit pas “choquée” mais simplement “désolée” de l’usage qui en est fait. Et, selon Le Monde, elle ajoute par ailleurs : “J’ai écrit ce qu’elle a dit, nous avons filmé ce qu’elle a dit. Ce n’est pas une opinion, c’est un élément matériel”. Si les preuves de l’activité réelle de madame Fillon apportées au juge sont solides, comme l’affirme François Fillon, l’opinion pourra considérer la déclaration de madame Fillon comme hors contexte. Sinon, cette déclaration pourrait faire pencher son intime conviction.

Les écarts de rémunération

La rémunération de madame Fillon n’est pas linéaire dans le temps, d’une année sur l’autre il y a des écarts, parfois importants, qui restent à expliquer.

Penelope Fillon a-t-elle perçu le chômage ? 

Le Canard enchaîné du 8/02/2017 évoque les indemnités de licenciement de l’épouse de François Fillon. Reste encore à déterminer si elle a, oui ou non, touché une indemnisation chômage. La réponse du Palmipède de la semaine : “Rien ne le laisse présumer, dans l’état de nos investigations”.

Les tâches confiées à ses enfants

François Fillon est resté vague, au cours de sa conférence de presse, sur les activités de ses enfants lorsqu’ils étaient ses collaborateurs parlementaires.

“Mon fils n’a jamais participé à la campagne présidentielle. J’ai indiqué aux enquêteurs qu’il avait constitué des bases documentaires pour me permettre de préparer le projet politique qui a été le nôtre et pour me préparer à être pendant 5 ans Premier ministre, notamment sur les questions institutionnelles. Quant à ma fille, elle a travaillé sur beaucoup de sujets mais en particulier sur la base documentaire permettant d’écrire ce livre.”

L’Affaire de l’Union républicaine du Sénat

Une autre affaire ne vient pas de l’Assemblée mais du Sénat. François Fillon a perçu sept chèques à son nom tirés sur le compte de l’Union républicaine du Sénat quand il était sénateur de la Sarthe, entre 2005 et 2007, pour un montant total de l’ordre de 21 000 euros. Ces sommes correspondaient à des reliquats de crédits d’assistants.

Ce n’est pas encore une affaire à ce stade. Une soixantaine de sénateurs seraient concernés par ce système, mais la justice n’enquête que sur des faits postérieurs à 2009.


6. François Fillon, plus à plaindre qu’à blâmer ?


Notre chroniqueur Philippe de Saint-Germain a parfaitement résumé la situation : “La politique n’est pas un moralisme et la perfection est un mythe dangereux. Rien ne permet de penser que François Fillon mérite tant d’indignité, et s’il s’agit de choisir un homme d’État, c’est sur sa capacité d’homme d’État qu’il faut le juger d’abord. Si l’exercice consiste à le démolir au prétexte qu’il a péché, quelles seront les conséquences politiques de l’opération ? C’est à l’aune de cette mesure sur le bien commun qu’il faut peser l’accusation.

Moralement, les qualités personnelles nécessaires au gouvernement requièrent du courage, de la sagesse, de l’honnêteté, indépendamment des compétences et de l’expérience. Mais il vaut mieux avoir un chef imparfait avec les moyens de sa politique qu’un mystique irréprochable sans expérience ou qu’un savant inapte au commandement. Si le chef est un saint, nul ne s’en plaindra, mais nous ne vivons pas au Ciel, et il serait opportun de s’en souvenir.”


Lire aussi le deuxième volet de notre dossier spécial : L’affaire Fillon, à qui profite le crime ?


 

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