Un cheminement aussi spirituel que psychologique…
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Cessez de vous acharner à vouloir pardonner ! Et pourtant… « Pardonne à ton frère ! ». Que de parents répètent cette injonction quand leurs petits se disputent, avec la croyance que le pardon se donne sur commande, voire en plein conflit. Vous l’avez peut-être vécu enfant et avez été contraint, bouillant intérieurement de rage ou d’humiliation, de murmurer du bout des lèvres un « je te pardonne », histoire de sentir se relâcher sur votre bras la main de votre père et de pouvoir aller dans votre chambre exprimer seul votre chagrin.
Vos parents se trompaient, le pardon ne dépend pas que de notre volonté. Pas plus que le pardon n’empêche la justice, ou exige du repentir de votre offenseur, n’effacerait ce qui s’est passé ou encore vous donnerait une supériorité morale.
Alors comment se pardonner, en couple ou en famille, les petites offenses ou grosses blessures, voire l’impensable comme l’adultère ou le décès d’un enfant ?
Jean Monbourquette, psychologue canadien, nous balise la route avec un chemin intérieur en 12 étapes développées dans Comment pardonner ? aux éditions Bayard.
L’auteur propose un chemin spirituel et psychologique, qui nous demande d’aller chercher dans notre âme ce que nous sommes impuissants à réaliser seuls.
Les conditions préalables au pardon sont :
1. Le choix de ne pas se venger et faire cesser l’offense : pas question de continuer à subir, vous êtes responsable de restaurer votre dignité et de refuser le statut de victime. Vous venger, que ce soit par de petites allusions ou une contre-attaque, ne servirait qu’à alimenter votre rancœur, à retarder la paix, comme une blessure dont vous empêcheriez volontairement la cicatrisation.
La guérison psychologique est la phase émotionnelle de votre chemin :
2. Reconnaître sa blessure et sa pauvreté : votre souffrance peut être mêlée de honte et d’humiliation, les accueillir vous évite qu’elles ne se déguisent en colère ou déni.
3. Partager sa blessure avec quelqu’un : trouvez dans votre entourage une personne qui saura vous permettre de verbaliser vos émotions, de prendre du recul, de vous sentir compris.
4. Bien identifier sa perte pour en faire le deuil : ne minimisez pas ! on ne peut pas comparer deux blessures, votre souffrance est unique. La nommer permet de mieux la cerner sans la nier ni se laisser envahir. Qu’est-ce qui a été touché à l’intérieur de vous dans cette offense ?
5. Accepter sa colère et l’envie de se venger : vous êtes… normal ! Accueillez votre colère pour éviter qu’elle ne se projette sur un autre ou contre vous-même, et trouvez des exutoires sains, comme le sport.
6. Se pardonner à soi-même : cela vous étonne ? C’est pourtant un risque de s’en vouloir de s’être montré trop vulnérable, confiant, patient… Demandez la grâce de retrouver de la compassion pour vous-même.
7. Comprendre l’offenseur peut être possible après ce temps de travail de guérison de sa blessure, et vous aidera à distinguer l’acte de la personne.
8. Trouver un sens à l’offense, aussi difficile que ça puisse paraître. Chacune de mes blessures, une fois guérie, peut devenir occasion de croissance. Demandez-vous par exemple ce que vous avez découvert sur vous-même, limites et fragilités, quelles ressources nouvelles vous pouvez identifier, en quoi vos rapports avec les autres vont changer.
Vient enfin l’étape du pardon intégral, qui fait appel à toutes vos ressources spirituelles.
9. Se savoir digne de pardon et déjà pardonné : faites l’expérience de vous laisser aimer de manière inconditionnelle, par une source d’Amour qui vous dépasse, que vous pouvez nommer Dieu si vous êtes croyant. C’est dans cette certitude d’être aimé et la grande force intérieure qu’elle procure que vous pourrez continuer votre chemin de pardon.
10. Cesser de s’acharner à vouloir pardonner : votre pardon vous dépasse, il demande plus qu’une générosité purement humaine. Demandez cette force à Dieu.
11. S’ouvrir à la grâce de pardonner : laissez Dieu agir en vous !
12. Décider de mettre fin à la relation ou la renouveler : ce pardon vous permet de retrouver votre liberté dans la relation. À vous de la renouveler s’il est possible pour vous deux de le faire, mais mettre fin à la relation peut s’imposer. De toute façon votre regard sur vous-même et sur l’offenseur seront transformés en profondeur, même sans réconciliation ou après le décès de votre offenseur.
Même spirituel, le pardon n’est pas une affaire de religion ! Sa valeur curative est prouvée, avec comme effet une baisse de l’anxiété, de la dépression, des accès de colère et une augmentation de l’estime de soi. Cassandra, que son mari a quittée en la laissant seule avec deux enfants en bas âge, est tombée en dépression. Elle peut témoigner aujourd’hui du parcours de pardon qu’elle a pu accomplir : le pardon qu’elle s’est donnée et qu’elle a donné à son mari lui ont permis de retrouver une force de vie en elle, d’enlever la chape de plomb qui pesait sur ses épaules, d’arrêter de se dévaloriser. Alors, vous aussi, pour être libéré, pardonnez !