Le directeur de l’hôpital catholique de la ville témoigne : “Nous sommes appelés à faire fleurir l’espérance dans cet enfer”.
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Après une journée de blocage en raison des tirs de mortier effectués sur les couloirs humanitaires, l’évacuation des habitants d’Alep-Est semble avoir repris lentement. Parallèlement, le Conseil de sécurité de l’ONU a décidé à l’unanimité, y compris la Russie, qui soutient le régime de Bachar Al-Assad, de déployer des observateurs dans la ville pour y superviser ces évacuations et évaluer la situation des civils.
Plus de 3 000 personnes auraient été évacuées dans la seule matinée de ce lundi. Mais de nombreux civils n’ont pas attendu la reprise, et ont pris la fuite vers la zone ouest de la ville, restée sous contrôle de l’armée syrienne, rapporte l’agence Fides. Selon Emile Katti, chirurgien et directeur de l’hôpital al-Raja d’Alep, soutenu par la Custodie franciscaine de Terre Sainte, malades et blessés commencent à remplir “de manière insoutenable” les structures sanitaires locales, qui travaillent déjà, depuis des années, dans des conditions d’urgence.
“Chaque jour et pendant on ne sait encore combien de temps, nous sommes appelés à faire fleurir l’espérance dans cet enfer”, a confié le docteur Katti. Le 15 décembre dernier, à plusieurs reprises, une colonne de 20 autobus verts a pu sortir des quartiers est d’Alep, transportant à chaque passage quelques 1 200 personnes jusqu’aux zones proches de la frontière turque. L’accord relatif à l’évacuation des miliciens et des civils de l’est d’Alep, grâce à la médiation de la Russie et de la Turquie, prévoyait comme contrepartie la fin du siège de deux villages chiites de la province d’Idlib, encerclés depuis longtemps par les djihadistes.
Situation confuse
Divers récits recueillis auprès des personnes évacuées font émerger des détails souvent ignorés par les médias. La plupart raconte avoir souffert d’une faim inimaginable, “forcés à manger de l’herbe, les vivres suffisants étant destinés aux seuls miliciens et à leur entourage”. Sur le nombre de personnes se trouvant à Alep, il semble difficile de vérifier y compris par les agences d’information.
Beaucoup répètent, sans le vérifier, qu’il y avait plus de 250 000 habitants dans cette partie de la ville mais les données réelles semblent de loin inférieures”, commente Fides. L’Onu parle de 40 000 civils et rebelles encore bloqués. Impossible également de chiffrer le nombre de personnes ayant pris la fuite, beaucoup s’échappant comme “elles le peuvent, dans de nombreuses directions”, souligne-t-on sur place. Selon un post du ministre des affaires étrangères turc, Mevlut Cavusoglu, sur Twitter, 2 000 civils auraient déjà quitté l’est d’Alep.
Au cours des dernières semaines, l’ONG CARE, l’un des plus grands réseaux d’aide humanitaire au monde, et ses partenaires ont soutenu 17 000 Syriens qui ont fui Alep ainsi que les familles qui les accueillent, distribuant parmi eux des kits pour l’hiver (comprenant des matelas, des couvertures et des bâches en plastique), de la nourriture et des produits d’hygiène. Craignant que leurs équipes manquent de ressources suffisantes pour poursuivre leur action, ils lancent un appel à la générosité de leurs lecteurs, dont le formulaire est accessible sur leur site.
Message du cardinal Tagle
En Syrie, ce sont près de 13,5 millions de personnes qui ont besoin d’aide, et 6,5 millions sont des déplacés internes. La Syrie est devenue la plus grande urgence de Caritas. À ce propos, le président de Caritas Internationalis, le cardinal Luis Antonio Tagle, consacre son message de Noël au conflit en Syrie et à la situation humanitaire dramatique qui y règne, au coeur de l’hiver. Dans le sillage du pape François, qui est “l’un des sympathisants” de leur campagne “ Syrie : la paix est possible “, le cardinal philippin implore “la grâce de la conversion des cœurs de ceux qui ont la responsabilité de la destinée […] de cette région”. Cela fait une demi-décennie que “le peuple souffre des cruels vents de la guerre”, déplore-t-il. Des millions de personnes sont sans domicile. Et même ceux qui ont un abri n’ont pas le chauffage ou l’électricité, et “notre propre personnel aussi commence déjà à brûler ses meubles pour se chauffer”.