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Les remarquables progrès de notre intelligence et de notre puissance nous font dominer notre planète et son évolution. Cette responsabilité nouvelle peut parfois être angoissante. Et si, par nos appétits et nos excès, nous en venions à détruire notre terre ? Cette hypothèse est de plus en plus souvent évoquée : guerre nucléaire, réchauffement climatique, explosion démographique, lutte pour l’eau et les matières premières. L’aventure humaine pourrait bien s’arrêter par notre faute.
Mais voici Noël : notre histoire ne peut plus échouer. En s’incarnant, Dieu s’y engage à nos côtés et nous en garantit la fin heureuse. Telle est l’espérance authentiquement chrétienne que Noël fait naître, le cadeau essentiel qui nous est offert. Toutefois, cette certitude de succès final découle d’un acte de foi, et laisse donc subsister l’anxiété propre à notre condition humaine.
Un cadeau pour le monde
La pensée de Teilhard est à rebours de celle de l’Église de son temps. Pour lui, en effet, Jésus n’est pas d’abord venu sur terre pour réparer un monde endommagé par le péché, mais pour conduire ce monde, à travers l’homme, à son suprême accomplissement, c’est-à-dire sa divinisation. Teilhard reprend l’affirmation d’Irénée de Lyon au IIIe siècle : « Dieu devient ce que nous sommes, pour nous permettre de devenir ce qu’Il est. »
L’infini se fait fini, et le fini peut ainsi accéder à l’infini. Noël est un cadeau essentiel pour le monde aussi : Dieu y révèle son projet, c'est-à-dire, tout rassembler en Jésus afin que « Dieu soit tout en tous ». Quelle chance nous avons de vivre ce temps où Jésus s’est révélé être la clé de l’histoire universelle et de notre destin !
Un cadeau pour Dieu
Encore plus décapant : Teilhard affirme que Noël transforme la nature même de Dieu, lequel trouve la plénitude de sa gloire en nous divinisant à travers le Christ. Celui qui reçoit le don de Dieu, l’homme, est aussi celui qui donne quelque chose à Celui auquel il doit tout, Dieu. Ce double mouvement est unique dans l’histoire du cosmos : Dieu intervient pour mettre dans l’humanité ce qu’aucune évolution n’aurait jamais pu y mettre, c'est-à-dire la personne même de Dieu.
Parallèlement, l’homme Jésus de Nazareth devient Dieu, ce que, seul, il n’eût jamais été, et nous entraîne à sa suite. Teilhard fait observer que cet extraordinaire cadeau n’arrive pas au hasard, bien au contraire. Noël a été pensé, voulu et préparé par Dieu dès l’aube de l’univers : « Dieu n’a pas voulu isolément le soleil, la terre, les plantes, l’homme. Il a voulu son Christ et, pour l’avoir, Il a du créer le monde spirituel, et notamment les hommes sur qui germerait le Christ. Et pour avoir l’homme, il a du lancer l’énorme mouvement de la vie. Les prodigieuses durées qui précèdent le premier Noël ne sont pas vides du Christ, mais pénétrées de son influx puissant. Il ne fallait pas moins que les labeurs effrayants et anonymes de l’homme primitif, et la longue beauté égyptienne, et l’attente inquiète d’Israël, et le parfum des mystiques orientales, et la sagesse des Grecs, pour que, sur la tige de Jessé et de l’humanité, la fleur pût éclore. Quand le Christ apparût entre les bras de Marie, il venait de soulever le monde ». (Mon Univers, 1924).