Retour sur le voyage du Pape à Suède.
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Au fil de ses voyages et de ses interventions se dessine un axe majeur du pontificat du pape François, celui d’unir tous les chrétiens pour rapprocher tous les hommes de Dieu. De ses rencontres avec les patriarches orthodoxes de Constantinople, de Moscou et d’Athènes puis, lors de ce voyage, avec le président de la fédération luthérienne mondiale, le Pape a montré sa volonté de purger les désaccords et les fractures du passé pour sceller la réconciliation des chrétiens. Une unité voulue par le Christ qui doit permettre de donner un témoignage plus fort et véridique dans le monde.
En Suède, le Pape n’est pas venu pour prendre des parts de marché religieux à une église d’État en pleine décomposition. Comme il l’a affirmé dans un entretien accordé à La Civilta Cattolica peu avant son départ, l’Église ne progresse pas par prosélytisme, mais par attraction. Il s’agit donc d’attirer les gens vers le Christ en parlant de la parole de Dieu et en la faisant connaître. Or le scandale de la division étouffe la transmission de la parole.
Comme il le dit dans le même article, il ne pensait pas, à l’origine de la préparation de ce voyage, célébrer une messe pour la communauté catholique, afin de bien pouvoir insister sur le but essentiellement œcuménique de son voyage. Mais cela s’est présenté comme une nécessité afin de ne pas décevoir les catholiques de Suède.
Le message à l’Europe
Paradoxalement, ce pape d’Amérique latine est en train de donner une leçon d’unité européenne aux Européens mêmes. La Seconde Guerre mondiale a montré aux chrétiens, catholiques et protestants, qu’ils n’étaient pas ennemis, mais que leur ennemi était les régimes athées. Nombreux sont les protestants et les catholiques à être morts tués par les nazis, puis ensuite par les communistes, en raison de leur foi. Certains sont même morts ensemble, participant au même réseau de résistance. C’est ce que le Pape appelle l’œcuménisme du sang. Et cela se vérifie encore aujourd’hui au Proche-Orient. « Quand les chrétiens sont persécutés et tués, ils le sont parce qu’ils sont chrétiens et non parce qu’ils sont luthériens, calvinistes, anglicans, catholiques ou orthodoxes. Il existe un œcuménisme du sang. » (La Civilta Cattolica, 28 octobre).
Or, en travaillant à l’unité des chrétiens, c’est-à-dire des mondes orthodoxes et protestants autour du monde romain, le Pape cherche à rebâtir l’unité de l’Europe. Lors de sa visite au parlement de Strasbourg (2014), le Pape a fustigé une Europe grand-mère qui a peur de la vie et qui a peur d’avoir de grands idéaux. En Suède, comme auparavant à Sarajevo ou en Albanie, le Pape appelle les Européens à ne pas avoir peur d’eux-mêmes et à retrouver leur élan et leur souffle. Il a invité notamment les chrétiens à s’unir dans l’action humanitaire pour venir en aide aux plus faibles.
Si l’Europe perd son souffle, c’est qu’elle est fracturée. Le Pape veut panser ses fractures pour lui redonner sa jeunesse, ce qui passe notamment par l’œcuménisme.
Bâtir un monde de paix
De 1517 jusqu’au XIXe siècle, les rapports entre catholiques et protestants ont souvent été marqués par les guerres et les confrontations. Dans les pays touchés par la réforme protestante les couvents ont été fermés et les prêtres chassés, voire tués. La religion a été soumise à l’État. C’est le cas de la Suède où l’église nationale est sous la tutelle du pouvoir politique. Dans les pays catholiques, comme la France, la réforme a débouché sur des guerres civiles qui ont déchiré les pays. La réforme de Luther a introduit une rupture dans l’histoire européenne. Non seulement les pays d’Europe n’étaient plus unis par une même foi, mais c’est au nom de leur foi que les habitants se sont entredéchirés.
La guerre de Trente Ans (1618-1648) a ensanglanté l’Europe centrale. En proportion, certaines régions ont connu plus de morts pendant cette guerre que pendant la Première Guerre mondiale. À la déchire spirituelle et politique s’est ajoutée une déchire intellectuelle : c’est à partir de ce moment-là que beaucoup de philosophes ont perçu la foi chrétienne non comme un facteur de paix, mais comme un semeur de troubles et de haines.
La rencontre de Lund entre le Pape et les autorités protestantes cherchent à mettre un terme à ce cycle mortifère
Il s’agit donc de montrer l’unité des chrétiens face à un monde qui se déchire et qui est traversé par la violence. Le Pape veut aussi démontrer, par l’exemple, que le christianisme est source d’unité et de paix, non de division et de guerre. Il a souvent rappelé que tuer au nom de Dieu est satanique. C’est cette idée de la paix qu’il est venu porter en Suède. S’il a parlé depuis l’une des périphéries de l’Europe c’est pour mieux lui toucher le cœur.