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Après le Brexit et l’élection de Donald Trump, que va-t-il se passer ?

© AFP PHOTO / Timothy A. CLARY

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Jean Duchesne - publié le 09/11/16
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La situation illustre la crise qui découle de la sécularisation.

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À qui se déclare abasourdi par l’élection de Donald Trump, il faut faire remarquer que c’est une répétition de ce qui s’est passé avec le Brexit. Intellectuels, journalistes, sondeurs et autres puissants dans la culture, la politique et l’économie doivent s’habituer à ce que le monde ne se comporte pas comme eux déclarent raisonnable. C’est un second précédent qui peut et doit être médité dans la perspective des élections chez nous au printemps prochain : après le Brexit au Royaume-Uni et Trump aux États-Unis, Marine Le Pen en France ?

Un vote d’exaspération

Ce qui peut étonner est que d’assez nombreux catholiques aient sans doute voté pour Trump, alors qu’il ne se présente pas comme un croyant spécialement convaincu ni fervent et qu’il s’est même fait taper sur les doigts par le Pape. Mais on peut voir dans ce soutien inattendu le rejet de l’évolution « sociétale » que symbolisent l’avortement et le mariage « gay » et que soutient la « libérale » Hillary Clinton. Le vote catholique pour Trump a donc été avant tout une protestation contre ce qu’incarnait la candidate démocrate.

Cependant, il ne s’agit pas d’un ralliement enthousiaste. Car l’élu des Américains est à l’image d’une société où la sécularisation ne signifie pas seulement la marginalisation du religieux, mais l’échec des “valeurs” (politiquement correctes, humanistes, républicaines…) à occuper le vide ainsi laissé. La terrain est livré à des pulsions égoïstes et à courte vue, que rien ne vient plus contrôler, en même temps qu’à des technologies qui permettent non seulement de satisfaire, mais encore d’exciter ces pulsions, qu’il s’agisse d’envies ou de peurs.

Si des catholiques ont voté Trump, c’est par exaspération et en passant par-dessus les remontrances du Pape et des évêques contre un personnage peu chrétien. Ces critiques ont piqué Trump, mais il est clair qu’elles ne l’ont pas amené à rectifier ses éructations ni à y renoncer. On peut y voir le signe inquiétant qu’il continuera de se fier à ses instincts.


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Quand les frustrations occultent l’avenir

Au-delà des catholiques, qui n’ont constitué qu’un apport marginal, même s’il a pu être décisif, à la victoire du candidat républicain, exactement comme le « bas peuple » (ou la plèbe) du Royaume-Uni qui a voté pour le Brexit, les électeurs de Trump savent vaguement ce qu’ils ne veulent pas : être appauvris et se sentir méprisés, mais pas ce qu’ils veulent au-delà de la satisfaction de leurs besoins et désirs immédiats, sans se rendre vraiment compte à quel point leurs aspiration sont manipulables et, de fait, manipulées. Il est difficile de leur prêter quelque vision que ce soit d’un destin. Qu’ils aient élu Trump est symptomatique : il a dit vouloir restaurer la grandeur de l’Amérique ; autrement dit, il a exploité des frustrations en se réfèrant à un passé mythique, et pas à un avenir dans le monde tel qu’il est.

La démagogie et la désinvolture dont le personnage avait fait preuve déjà comme businessman avant sa campagne ont de quoi inquiéter. C’est manifestement quelqu’un qui n’envisage que des réponses simplistes, voire brutales, à ces questions complexes. Il est seulement permis d’espérer qu’il n’a effectivement pas assez de suite dans les idées pour s’accrocher à des positions intenables et procédera à des revirements en déclarant qu’il est fidèle à lui-même.

Et maintenant ?

Ce n’est pas une voie royale qui s’ouvre devant l’élu qui a profondément divisé le pays. Le président des États-Unis n’est pas tout-puissant. Trump n’aura pas tout le monde à sa botte, loin de là. Il devra faire face à un establishment médiatique et culturel qui lui restera viscéralement hostile, et le soutien de son propre parti a déjà été loin d’être massif et inconditionnel pendant la campagne. Contrairement à un Premier ministre britannique, il n’a ni carotte ni bâton pour mettre au pas les parlementaires. Il faut donc s’attendre à des jours difficiles et conflictuels. Mais ce n’est qu’une retombée de ce qu’il faut bien appeler une crise : l’Amérique sécularisée peine à prendre la mesure d’une mondialisation et d’une ivresse technologique qui introduisent une cacophonie dans le domaine de l’anthropologie et du discernement du bien et du mal – et elle n’est pas la seule.


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