Portrait des deux hommes qui ont marqué la vie de l’abbaye de Solesmes par leurs voix.
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Antoine de Saint-Exupéry avait un jour écrit ces mots : “Il faut rendre aux hommes une signification spirituelle, faire pleuvoir sur eux quelque chose qui ressemble à un chant grégorien” (extrait de la Lettre au Général X écrite en 1943). Reconnaissance involontaire –l’était-elle vraiment ? – de la grandeur de cet art catholique, il plaçait par ces mots le chant grégorien au dessus de toute musique simplement humaine. En complément de cette méditation proposée par l’aviateur de renom, nous vous proposons une brève rencontre des deux hommes qui ont su, il y a à peine plus d’un siècle, rendre à cette prière mélodieuse sa place de choix dans la liturgie.
Dom Guéranger (1805 – 1875)
Il fut, il est vrai, l’un des premiers de cette époque dans le clergé français, à privilégier le missel romain au rite gallican, par soucis d’unité dans l’Église. Nous voudrions pourtant simplement souligner le rôle de ce grand homme dans la valorisation du chant grégorien.
“Personne n’ignore que la liturgie toute entière appartient à la poésie et que c’est pour cela même que le chant en est le complément” (Institutions liturgiques, IV, p.304).
C’est en grande partie à travers la publication de son ouvrage L’année liturgique, qu’il débuta sa mission d’apôtre du chant grégorien. En 1862, il lance plusieurs de ses disciples à la recherche des sources du chant liturgique dans l’Église. De ces recherches fructueuses naîtra plus tard l’édition du répertoire de l’abbaye de Solesmes. Nous ne pouvons que vous conseiller de lire à ce sujet l’excellent ouvrage de l’abbé Maurice Blanc, L’enseignement musical de Solesmes et la prière chrétienne (disponible aussi en ligne sur le site dédié à Dom Guéranger).
Dom Guéranger formait musicalement ses moines, car selon lui, “le chant grégorien exigeait le rythme libre du discours latin, qui contribue à sa beauté”. Nous sommes désormais plus d’un siècle après son passage à Solesmes, et son enseignement musical perdure encore et reste caractéristique dans cette abbaye.
Dom Gajard (1885 – 1972)
Comment perdura cet enseignement du maître ? Par la fidélité de ses élèves. Quelques années plus tard, Solesmes est sous le priorat de Dom Gajard. Digne fils de Dom Guéranger, il poursuivra avec un zèle indicible la restauration et la mise en valeur du chant grégorien dans la liturgie de l’Église. Admirable maître de chœur, vous pouvez toujours vous procurer les enregistrements réalisés sous sa direction. Pour ce faire, nous vous recommandons de vous adresser au site de la revue Una Voce, incontournable pour les amateurs de musique sacrée.
En ce qui concerne ses ouvrages, s’il ne fallait en lire qu’un seul, ce serait Les plus belles mélodies grégoriennes commentées par Dom Gajard, édité par l’abbaye elle-même.
Chanter dit-on, c’est prier deux fois. Nous connaissions d’ailleurs un chef de chœur qui ajoutait à cet adage que “chanter juste, c’est alors prier trois fois”. Si vous vous demandez encore quel intérêt possède le chant grégorien et sa place dans l’Église, nous laisserons à ce bon Dom Gajard le mot de la fin :
“Le chant grégorien est avant tout une prière, mieux : la prière de l’Église catholique arrivée à sa plénitude d’expression. Il est donc une chose d’âme (…) : il est une spiritualité, une manière d’aller à Dieu, de conduire les âmes à Dieu” (La méthode de Solesmes).
https://www.youtube.com/watch?v=owocyzMlF-0